MISSION ECONOMIQUE BELGE AU SENEGAL - 21 - 25 MAI 2023

SENEGAL CHALLENGER

Le magazine radiophonique de CREDO FM

Diffusé le 15/04/2023

Sur Radio Sénégal International - 92.5 FM

CONTEXTE DE L’EMISSION

Une mission économique belge se rendra au Sénégal du 21 au 25 mai 2023. Elle sera dirigée par Son Altesse Royale la Princesse Astrid, mandatée par le Roi des Belges, et sera composée de plus de 360 personnes, 160 entreprises, 20 institutions académiques, et des hauts représentants du gouvernement et des institutions belges.

Le Sénégal s’honore de recevoir une si importante délégation et mobilise son secteur privé pour que cette opportunité de partenariat ouvre de nouvelles perspectives dans la coopération belgo-sénégalaise déjà florissante.

S.E. M. Hubert ROISIN, Ambassadeur du Royaume de Belgique au Sénégal et M. Ivan KORSAK, Conseiller Economique et Commercial de l’Ambassade de Belgique au Sénégal nous présentent cet événement qui fera date dans l’agenda de la diplomatie économique du Sénégal.

S.E. M. Hubert ROISIN - Ambassadeur du Royaume de Belgique au Sénégal

Le Sénégal est une terre d’opportunités et une économie ouverte qui exerce une forte attractivité sur le secteur privé, les citoyens et les autorités belges.

360 opérateurs économiques, 160 entreprises et 20 institutions académiques, cette importante délégation sera dirigée par son Altesse Royale la Princesse Astrid, soeur du Roi des Belges. C’est le plus haut niveau de représentation de la Belgique à l’étranger.

La Belgique va se parer de ses plus beaux atours pour rendre visite au Sénégal, et nous ne doutons pas que le pays de la Téranga fera honneur à sa réputation.

M. Ivan KORSAK - Conseiller Economique et Commercial de l’Ambassade de Belgique au Sénégal

Nous avons créé le site web www.belemb.eu pour faciliter les contacts entre les opérateurs belges et sénégalais et leur permettre de préparer leur rencontre dans les meilleures conditions.

Les sessions de B2B sont dédiées aux entreprises des deux bords qui sont outillées pour faire des affaires à l’international. Disposer d’un site web et d’une adresse Linkedin sont des prérequis incontournables.

Nous invitons les entreprises sénégalaises à s’investir dans cette opportunité avec professionnalisme, en préparant dès à présent la mise en relation avec leurs homologues belges afin de faire connaissance en amont de leur rencontre

SOUVERAINETE : LA NUMERISATION DU FICHIER D'ETAT-CIVIL

SENEGAL CHALLENGER

Le magazine radiophonique de CREDO FM

Diffusé le 01/04/2023

Sur Radio Sénégal International - 92.5 FM

CONTEXTE DE L’EMISSION

Le premier acte de souveraineté d’un pays est de compter ses troupes et identifier ses citoyens. C’est à partir de cette cartographie que les pouvoirs publics sont en capacité d’élaborer des politiques efficientes et pérennes.

Au Sénégal, le débat reste circonscrit au recensement de la population et à la refonte du fichier électoral qui restent en perpétuel renouvellement, alors que la mise à jour du fichier d’état-civil et surtout sa numérisation sont des préalables incontournables qui garantiraient une base de projection répondant aux exigences des politiques publiques.

Deux éminents experts, Pr Abdoullah CISSE et M. Mouhamed Tidiane SECK nous livrent ici leur vision sur les enjeux et la méthode.  


Pr. Abdoullah CISSE

Pr Abdoullah CISSE

 

Abdoullah CISSE, est avocat au Barreau du Sénégal (Associé fondateur de B&C – Bitèye & Cissé, Association d’avocats). Expert international en légistique et en politiques publiques, il est spécialisé en cyberdroit et en droit des affaires. Agrégé des facultés de droit, il est professeur titulaire des universités. Il intervient également en qualité d’arbitre et médiateur et anime pour le compte des organisations des ateliers de transfert de compétences en intelligence juridique et stratégique. M. CISSE a conduit plusieurs réformes en Afrique pour le compte d’Etats (notamment le Sénégal, le Mali, la RDC, la République du Congo, le Gabon etc.) ou d’organisations régionales (UEMOA, OHADA, CEDEAO, Union africaine, CEEAC-CEMAC) dans divers domaines (technologies de l’information et de la communication, justice, économie, affaires, énergie, environnement, santé, éducation). Il a été doyen de la faculté de droit de l’Université Gaston Berger de Saint-Louis et premier Recteur de l’Université Alioune Diop de Bambey. Affiliation scientifique : • Membre titulaire de l’Académie Nationale des sciences et Techniques du Sénégal ; • Membre associé de l’Institut de droit international ; • Membre de la Société de Législation Comparée ; • Membre du Conseil scientifique international de la Fondation pour le Droit continental, • Membre du Comité directeur de Institut international de Droit d’Expression et d’inspiration Françaises.

Mouhamed Tidiane SECK 

-      Enseignant-Chercheur à la retraite,

-      Ancien Chef du Département Informatique de l’ESP

-      Ancien Directeur des systèmes d’informations de l’UCAD

-      Ancien Directeur Général de l’ADIE

Il a une carrière très diversifiée :

·        D’abord dans l’enseignement et la recherche,

·        Puis dans l’administration universitaire,

·        Puis dans l’administration centrale comme DG de l’ADIE,

·        Puis dans le secteur privé comme Directeur Associé du cabinet de conseil Performances Group.

·        Aujourd’hui il fait principalement du coaching de dirigeants d’entreprises et de jeunes développeurs.

il a piloté la création, l’organisation et la mise en place opérationnelle de l’Agence Nationale des Infrastructures Numériques et des Fréquences du Gabon.  

Il a coordonné l’élaboration et la rédaction de la Stratégie Nationale du Numérique au Sénégal (SN2025).

Pour le compte du gouvernement Togolais, il a dirigé la mission d’élaboration des cadres institutionnels, juridiques et les plans de démarrage de l’Agence de l’Informatique de l’État (AIE), de l’Agence Nationale de Cyber sécurité (ANC) et de l’Instance de Contrôle et de Protection des Données à Caractère Personnel (ICPDCP).

Ces 5 dernières années ont été en partie consacrées au développement de divers projets dont le projet APHIA, un outil digitalisation des postes et centres de santé en zones péri-urbaines et rurales, ainsi qu’un projet de déploiement d’un réseau IOT (LoraWan) au Sénégal.

 Ses domaines de prédilection actuels sont la transformation numérique, la cybersécurité, la blockchain, le Web décentralisé et l’IoT (internet des objets).

SOUVERAINETE : LA PROTECTION DES DONNEES PERSONNELLES

SENEGAL CHALLENGER

Le magazine radiophonique de CREDO FM - Le Réseau Social Engagé

Diffusé le 8 avril 2023

Sur Radio Sénégal International - 92.5 FM

CONTEXTE DE L’EMISSION :

La protection des données personnelles est un des enjeux majeurs de notre époque marquée par la numérisation tous azimut. Le Sénégal est partie prenante des conventions internationales qui régissent cette question, et sous la gouverne de la Commission Nationale pour la Protection des Données Personnelles – CDP, a mis en place une stratégie de sensibilisation et de contrôle des données personnelles en direction des entreprises et des citoyens.

Entre déclarations obligatoires pour les entreprises et plaintes des citoyens auprès de la CDP, la culture de la protection des données à caractère personnel se consolide au Sénégal, contribuant ainsi à son insertion dans la civilisation de l’Information.

Avec comme invités :

-Pr. Mamoudou NIANE – Secrétaire Permanent de la Commission de Protection des Données Personnelles - CDP,

-Mme Khoudia GUEYE NDOYE – Directrice des Infrastructures et des Systèmes d'Information de l'Université Numérique Cheikh Hamidou Kane du Sénégal - ex Université Virtuelle du Sénégal - UVS.


Conducteur de l’émission:

Pr Mamoudou NIANE - CDP :

03’ 47” : La protection des données personnelles au Sénégal : genèse;

14’ 12” : L’implantation de la protection des données personnelles en entreprise au Sénégal;

22’ 58” : Le modus operandi de la protection des données personnelles;

27’ 27” : Les points d’amélioration et les recommandations;

32’ 07” : Comment les citoyens peuvent-ils saisir la CDP ?

Mme Khoudia Guéye NDOYE - UNCHK - ex UVS :

36’ 54” : Développer la culture de la protection des données personnelles ? L’expérience des milieux académiques

SOUVERAINETE PHARMACEUTIQUE : TERANGA PHARMA RELEVE LE DEFI

SENEGAL CHALLENGER

Le magazine radiophonique de CREDO FM - Le Réseau Social Engagé

Diffusé le 1er avril 2023

Sur Radio Sénégal International - 92.5 FM

CONTEXTE DE L’EMISSION

La pandémie du Covid-19 a mis en lumière l’impérieuse nécessité pour les Etats de reprendre le contrôle de la production des médicaments destinés à leurs populations, afin de ne plus être dépendants des importations. Ce challenge a été relevé au Sénégal par des professionnels de la pharmacie qui, à l’initiative du Dr Mouhamadou SOW, se sont regroupés pour créer Téranga Pharma, un label répondant aux standards de qualité internationaux, et qui a l’ambition de répondre aux exigences du marché national et régional.

Financé par un capital entièrement sénégalais, Téranga Pharma entend exploiter des molécules à bas prix afin de porter les médicaments au niveau de la bourse des populations, développer la connexion avec la médecine traditionnelle et la pharmacopée, stimuler la culture de la souveraineté pharmaceutique à travers la prescription responsable, le conseil responsable et la consommation responsable, afin d’assurer une autonomie pharmaceutique à l’horizon 2030.

Dr Mouhamadou SOW - DG de Téranga Pharma


Dr Mouhamadou SOW - Promoteur et Directeur Général de Téranga Pharma :

La pandémie du Covis-19 a mis en évidence l’urgence absolue pour les Etats du tiers-monde de reprendre en mains la fabrication de leurs médicaments stratégiques, gage de souveraineté pharmaceutique,

Téranga Pharma est un défi industriel, technologique, scientifique, financier et patriotique car partant d’une production actuelle couvrant moins de 5% de la consommation locale, notre ambition est de couvrir 90% des besoins des populations à l’horizon 2030,

80% des revenus tirés de l’industrie pharmaceutique repartent à l’étranger. Notre ambition est de faire homologuer d’ici 2030 75 molécules couvrant 90% des besoins du Sénégal en médicaments,

Nous voulons démontrer que le Sénégal est capable de relever le défi de la souveraineté pharmaceutique avec un capital exclusivement national, et faire de Dakar un hub régional à l’horizon 2026,

A travers la prescription responsable, le conseil responsable et la consommation responsable, nous invitons les acteurs de la chaîne de valeur à un concept novateur, condition sine qua none pour garantir la disponibilité et la baisse de coûts des médicaments, par une économie d’échelle: c’est investir sur nous-mêmes pour mieux subvenir à nos besoins de santé,

Nous entendons développer les plantes médicinales et la pharmacopée traditionnelle pour trouver des réponses pérennes aux maladies chroniques non transmissibles telles que le diabète et l’hypertension,

Nous avons des attentes fortes vis-à-vis de l’Etat, qui nous a déjà apporté un précieux soutien:

-Renforcer les acteurs locaux par le développement de la sous-traitance,

-Instaurer la primauté de la prescription sur les médicaments produits localement,

-Donner la priorité à la production locale dans les commandes de la Pharmacie Nationale d’Approvisionnement,

-Etablir une ligne de crédit au niveau du FONGIP pour financer l’extension du secteur pharmaceutique.

La réussite de Téranga Pharma fera école et contribuera à décomplexer bien des secteurs d’activités tels que les industries, le tourisme, les services qui jusqu’ici, subissent la domination du grand capital et des majors internationaux.

LA STRATEGIE D'INDUSTRIALISATION DU SENEGAL

L’ENTREPRISE CITOYENNE

Le magazine radiophonique du Conseil National du Patronat

En partenariat avec la Fondation Konrad Adenauer 

Diffusé le 21/08/2021

Sur Radio Sénégal International - 92.5 FM

CONTEXTE DE L’EMISSION

Le Sénégal a élaboré une nouvelle stratégie d’industrialisation basée sur la consolidation des secteurs traditionnels, et la promotion de nouveaux secteurs émergents tels que le pétrole et le gaz, l’industrie pharmaceutique, et l’industrie du numérique.

Cette nouvelle orientation a été définie selon une démarche participative et doit répondre aux défis de la souveraineté économique, alimentaire et sanitaire, tout en prenant en compte les enjeux et conséquences de la pandémie du Covid-19 et le développement durable.

-        Comment les entreprises industrielles comptent-t-elles tirer avantage de cette stratégie pour renforcer leur compétitivité et leur durabilité ?

-        Comment les structures d’appui à l’entreprises envisagent-t-elles de répondre à ces nouveaux challenges ?

Réponses dans l’émission.

 

CONDUCTEUR DE L’EMISSION :

00’ 18” - Introduction

02’ 15” - M. Ibrahima SONKO - Directeur des Stratégies Industrielles - Ministère du Développement      Industriel et des PMI,

18’ 06” - M. Cheikh Bamba FALL - Président du SPIS, 

26’ 44” - M. Pierre NDIAYE - PDG de Yaourt Jaboot, membre de l'UPIC, 

33’ 40”  - Mme Fatou Dyana BA - Directrice Générale du Bureau de Mise à Niveau,                                              

49’ 31” - Conclusion                                              

50’ 23” - Générique

50’ 59” - Fin

ANNONCE DU CNP

Le Conseil National du Patronat - CNP vous donne rendez-vous samedi 21 août 2021 de 11h à 12h sur Radio Sénégal International - RSI 92.5 FM pour son émission radiophonique "l'Entreprise Citoyenne", produite en partenariat avec la Fondation Konrad Adenauer.

Thème : La stratégie d'industrialisation du Sénégal

Avec comme invités :

- M. Ibrahima SONKO - Directeur des Stratégies Industrielles - Ministère du Développement Industriel et des PMI,

- Mme Fatou Dyana BA - Directrice Générale du Bureau de Mise à Niveau, 

- M. Cheikh Bamba FALL - Président du SPIS, 

- M. Pierre NDIAYE - PDG de Mamelles Jaboot, membre de l'UPIC.

Pour tout savoir sur la stratégie d'industrialisation du Sénégal, rendez-vous samedi 21 août 2021 de 11h à 12h sur Radio Sénégal International - RSI 92.5 FM,

Avec le CNP.

INCIVISME ROUTIER DANS LE MACKY

INCIVISME ROUTIER DANS LE MACKY

Dis-moi comment tu (te) conduis, je te dirai qui tu es !

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L’exception sénégalaise :

Il est de bon ton de considérer le Sénégal non pas comme un pays à part entière, mais comme un pays entièrement à part.

Ainsi, les problèmes qui ont trouvé des solutions pérennes à travers le monde font ici l’objet de débats sans fin. C’est le cas de la circulation routière qui, fruit de l’urbanisation galopante et de l’émergence des classes moyennes, draine quotidiennement des torrents de véhicules dont la logique de fonctionnement défie le bon sens et illustre la théorie des rats :

- Isolés, ce sont des animaux sans histoires,

- Mis en communauté, ils laissent apparaître des signes d’organisation, voire d’intelligence,

-Plus ils se reproduisent, et plus cette organisation se perfectionne, jusqu’au seuil de surpopulation où ils s’entre-dévorent, revenant à l’état sauvage.

Le principe de base sur lequel se fonde la mobilité routière est que la route appartient à tout le monde, et elle doit être partagée en responsabilité, chacun prenant soin de l’outil et de son environnement. Il semble qu’au Sénégal, nous ayons pris le parti de considérer que la route n’appartient à personne, dès lors chacun y fait ce qui lui plait, en toute impunité.

Et ceux qui sont sensés veiller à l’harmonie du système sont souvent les premiers à lui porter des coups, soit par un usage abusif de leurs prérogatives, soit par une démission face à leurs responsabilités.

Les 10 péchés capitaux :

Le catalogue des « bonnes pratiques » est quasiment sans limite :

-La voie : On choisit son couloir selon sa sensibilité politique, donc majoritairement à gauche, et en changer reviendrait à se renier. Plutôt crever ! En revanche, s’il y a quelque espace ou intérêt à glaner à droite, on peut s’autoriser une incursion furtive, quitte à se rabattre sur un innocent ;

-La vitesse : Elle est définie par l’état d’esprit du conducteur sans tenir compte du panneautage et de son environnement. Cette remarque concerne particulièrement ces conducteurs de transports en commun âpres au gain, qui n’hésiteraient pas à rouler sur plus petit qu’eux pour gagner un client ;

-Les passages piétons : Purement décoratifs, zones à risques par excellence car si un conducteur averti s’arrête pour vous laisser passer, attention au crétin de service qui va accélérer et voyant un espace vide, fauchera sans états d’âme cette personne âgée ou cet enfant qui ne se doutait pas qu’on pouvait croiser aussi bête et méchant par une si belle journée ;

-Les distances de sécurité : sacrifiées depuis belle lurette au profit de l’aspiration, supposée réduire la consommation et faire gagner du temps. A vouloir chasser le dernier centimètre, en ville comme sur autoroute, le moindre écart ou ralentissement se transforme en carambolage ;

-La priorité aux intersections : Le casse-tête par excellence entre la priorité à droite, la voie à grande circulation et l’avantage donné sur les rond-points au véhicule déjà engagé. La confrontation donne droit à une guerre des nerfs où celui qui a la priorité avance à pas feutrés, parce que celui qui doit lui laisser l’avantage continue d’avancer insidieusement, fermant l’angle jusqu’au point de contact. Il serait tellement plus simple de marquer son intention de laisser l’avantage quelques mètres avant l’intersection en ralentissant clairement, et s’arrêter à la ligne blanche qui la délimite…

-Le téléphone au volant : Les sénégalais seront comblés le jour où une application leur permettra de conduire leur véhicule à partir de leur smartphone. On a beau leur dire que l’hémisphère du cerveau qui gère la conversation téléphonique est le même que celui qui gère la conduite et qu’entre conduire et téléphoner, il faut choisir, ils restent convaincus d’être assez brillants pour combiner les deux. Résultat des courses, chaque fois que vous voyez une voiture quitter sa ligne ou décrocher sa vitesse sans raison apparente, regardez à l’intérieur, vous y verrez un écran allumé et un conducteur en train de « régler des problèmes », au risque de vous en créer…

-Le sens giratoire : Pourquoi diable faire le tour d’un rond-point pour prendre la bretelle à gauche alors qu’elle nous tend les bras, Quitte à se trouver nez-à-nez avec ceux qui arrivent dans le bon sens ? La question reste sans réponse…

-L’arrêt et le stationnement : Ce qui restait la spécialité des taxis a basculé dans le tronc commun : rétroviseur, clignotant et feu de stop sont ravalés au rang d’encombrants, on s’arrête où et quand on veut, sans préavis, et comme en cas d’accident, celui qui est derrière est déclaré fautif pour n’avoir pas respecté la distance de sécurité, la messe est dite. Sauve-qui-peut ;

-La conduite sous la pluie : quelle pluie ??? Les voitures et les conducteurs étant étanches, on ne change rien, ni la vitesse, ni les distances de sécurité, pas même les essuie-glaces ;

-La conduite de nuit : Voir et être vu présuppose des phares bien réglés, utilisés en mode « feux de croisement » alias feux de code. Dans la pratique, et surtout sur route non éclairée et autoroute, il est de bon ton de rouler en phares, surtout si on est au volant d’un 4x4 surélevé afin qu’aucun détail de la route ne nous échappe, au risque d’éblouir ceux qui nous précèdent ou nous croisent.

N’en jetez plus, la coupe est pleine… Enfin, non !

Car il y a ces policiers qui règlent la circulation téléphone en main, laissant filer sous leurs aisselles un essaim de scooters et motos lestés de 3 équilibristes sans casque ni masque, qui se paient le luxe de brûler un feu rouge et une priorité dans l’indifférence générale, car se croyant exemptés de code ;

Sans oublier cette gestion fantaisiste de la circulation par la maréchaussée, qui s’éclate en libérant en simultané et non en alternance deux files de voitures opposées, qui ont la ferme intention de se croiser ET de se contourner – méli -mélo garanti ;

Et ces piétons qui débarquent sur le macadam sans crier gare, téléphone à l’oreille, en tournant le dos aux véhicules, s’en remettant à leur bonne étoile à défaut de couverture médicale.

Voilà comment un pays de Droit devient un pays de non-Droit.

La politique de contournement :

Ce capharnaüm est le triste résultat d’un anticonformisme congénital et contagieux, car les étrangers vivant au Sénégal, toutes origines confondues ont vite fait de se dépouiller de leur discipline acquise pour prendre le pli local comme s’ils l’avaient tété au biberon.

Preuve s’il en est que la discipline n’est pas innée, mais le fruit d’un conditionnement.

Dans un système normé, un accident est un incident survenu alors que tout a été fait pour l’éviter, il constitue donc par définition l’exception. Au Sénégal, au regard de l’état général des véhicules et du comportement des usagers de la route, l’accident constitue la règle, la suite logique de comportements erratiques répétés par des serial-gaffeurs. Rentrer chez soi sans une éraflure ou une aile défoncée relève du miracle quotidien.

Comment en est-on arrivé là ? Probablement par notre incapacité à s’autoévaluer, notre goût immodéré pour l’autosatisfaction, et cette conviction d’être plus malins que tous les autres peuples réunis, au point de trouver des parades « innovantes » à tous les problèmes classiques :

-Les automobilistes empiètent sur le bas-côté, transformant une 3 voies en 5 voies ? On met des trottoirs infranchissables. Résultat, plus de voies de dégagement, la moindre panne ou le moindre accrochage se traduit par 30 minutes de bouchons, puisque même les gendarmes et les secours ne trouvent pas d’accès aux lieux des sinistres ;

-Les rond-points sont des goulots d’étranglements ? On construit des ponts et des tunnels afin de supprimer les points de croisement, mais on laisse des centaines de marchands ambulants transformer une voie rapide en marché aux souks où on s’arrête pour négocier les prix ou attendre sa monnaie, annulant de ce fait des milliards de francs cfa d’investissements.

Pourtant, une rapide comparaison avec des pays candidats à l’émergence comme le Sénégal tels que le Ghana, le Rwanda, le Cap-Vert et le Botswana permettrait de comprendre que les solutions aux problèmes complexes sont souvent simples, et reposent avant tout sur une volonté politique inflexible, l’éducation des populations afin d’atteindre une masse critique de citoyens conformistes, et le refus de solutions en trompe-l’œil proposées par les bailleurs toujours prêts à vendre leur expertise à prix d’or, moyennant des montages financiers complexes « d’aide liée » qui au final, remontent l’essentiel de la ressource financière à la source sous forme de sociétés concessionnaires, honoraires de consultants et de formateurs, licences d’exploitation et tutti quanti.

La solution est en nous, individuellement et collectivement, à travers le retour à une conduite vertueuse et responsable, reflet d’une citoyenneté conquérante.

Le retour aux fondamentaux du code de la route :

Langage commun à l’ensemble des citoyens de ce monde, le code international de la route a été conçu pour prévenir toutes sortes de conflits entre les usagers, grâce à un catalogue de règles de conduite à appliquer sans interprétation, afin d’éviter les incompréhensions sources d’accidents.

La version francophone conçue par ce cher Monsieur Rousseau, pas celui de l’Encyclopédie, l’autre, est un best-seller sur lequel le temps n’a pas de prise, et qui a rendu service à des millions d’usagers.

Tout conducteur est supposé le maîtriser suite à un processus de formation en auto-école sanctionné par l’obtention d’un permis de conduire.

Dès lors, comment admettre que sitôt le permis obtenu, ces conducteurs reviennent à l’état primitif, sans foi ni loi ?

De même que les excès de vitesse ont été résolus par les radars et l’alcool au volant a été jugulé par l’alcootest, l’incivisme routier sera neutralisé par un dispositif répressif basé sur la force de la Loi et la pédagogie.

Ainsi, il convient de rétablir le code de la route dans ses prérogatives :

-Par une formation de mise à niveau des agents de police, de gendarmerie, les ASP et agents communaux afin de lever toutes les ambiguïtés quant à l’application de la réglementation routière ;

-La même démarche devra être menée auprès des entreprises de transport public et privé : taxis, bus, camions, des entreprises à flotte de véhicules lourds, ainsi que des corps d’élus et d’élite : gouvernement, députés, élus locaux, ordres des professions libérales, groupements professionnels d’employeurs et de travailleurs ;

-Par une campagne nationale de sensibilisation aux enjeux de la citoyenneté routière via la télévision, les radios, journaux et presse en ligne, les écoles, lycées et universités, à travers des spots didactiques et des tutoriels quotidiens afin que nul n’ignore les fondamentaux de la sécurité routière,

-Par une application stricte du code de la route, avec identification rigoureuse et impartiale des infractions, suivie d’une application sans complaisance des sanctions prévues par la loi, dans un souci permanent de pédagogie, de sensibilisation et de responsabilisation.

Et que l’on ne nous divertisse pas avec le spectre du permis à points, ce sera encore une fois l’occasion de nous refiler une technologie importée coûteuse et contre-productive, à l’image du défunt visa de tourisme. De toutes façons, la modicité des contraventions ne permettrait pas de rembourser l’investissement, et la multiplication débridée des conducteurs sans permis deviendrait vite une équation sans issue pour nos autorités.

D’autant que dans ce pays où chacun est à la recherche d’un parent bien placé en politique, dans l’administration ou dans les confréries pour lui régler ses problèmes, quitte à fouler les règlements du pied, les règles communautaires priment sur les règles de la République.  

Voilà comment un pays de non-Droit devient un pays de passe-Droit.

Ainsi donc, la solution devrait être recherchée dans la transition numérique, à travers :

-La généralisation des caméras de surveillance du trafic automobile, avec identification automatisée des infractions, couplée à la vigilance des agents de la circulation, et transmission des contraventions via les smartphones pour un paiement par transfert d’argent ;

-L’informatisation des permis de conduire incluant l’historique des infractions constatées, et un lien avec le téléphone personnel du conducteur afin d’assurer une bonne traçabilité ;

-L’élaboration d’une échelle des infractions avec des sanctions appropriées : pécuniaires pour les premières commises, puis assorties de travaux d’utilité publique : aide à la circulation urbaine avec la police, séances de sensibilisation dans les écoles ou nettoyage des rues avec les équipes de l’UCG.

Et en cas de conduite sans permis suite à un retrait pour multirécidive, incarcération en commissariat de police pour 24 heures, et plus si affinités.

Afin que cesse le règne de l’irresponsabilité et de l’impunité.

Dieggelou xeewina : l’appel à la responsabilité :

La manière dont on se conduit sur la voie publique est le reflet du niveau d’éducation et/ou de répression des citoyens. Il n’est donc pas étonnant que les pays scandinaves, du fait de leur haut niveau de citoyenneté, soient des modèles en matière de prévention et de responsabilité routière qui s’appuient sur des principes accessibles à tous : prévisibilité, bienveillance, courtoisie et responsabilité :

-On respecte les infrastructures, le mobilier urbain et l’environnement (voitures, piétons) ;

-On respecte son prochain et partage la route en bonne intelligence (bien commun) ;

-On annonce ce qu’on va faire (arrêt, ralentissement, changement de direction) et on s’y tient ;

-On s’abstient d’interpréter le code de la route, source de malentendus, pour une application stricte ;

-On s’assure et adopte un comportement responsable en toutes circonstances : on casse, on paie !

Le Sénégal pourra prétendre être sur la rampe de l’émergence le jour où ses citoyens auront intégré le fait que leur attitude au quotidien, notamment sur la voie publique, est le reflet de leur prise de conscience de leurs droits et leurs devoirs. Elle traduit leur capacité à vivre en société en bonne intelligence, avec un objectif commun tendant vers un développement durable.

Aussi longtemps que chacun continuera de suivre ses bas instincts, convaincu d’être soit intouchable, soit insolvable, nous continuerons à être guidés par des comportements irresponsables ponctués par ce sempiternel mot d’excuse « mangui dieggelou » qui résume à lui-seul l’incurie de notre société du « maslaa ».

Il est grand temps que les citoyens aient des actes au quotidien en accord avec leur éthique afin d’assumer ici-bas les conséquences de leurs turpitudes, ce qui ne les empêchera pas d’en répondre lors de leur jugement dernier.

Coach Barma

credo.sn@gmail.com

CNP : L'OEIL OUVERT DES EMPLOYEURS SUR LE TELETRAVAIL AU SENEGAL

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CNP : L'OEIL OUVERT DES EMPLOYEURS SUR LE TELETRAVAIL AU SENEGAL

La pandémie du Covid-19 a entraîné des bouleversements sans précédent dans l’univers professionnel, avec notamment les contraintes de distanciation, de confinement et la généralisation du télétravail.

Celui-ci s’est imposé comme une mesure d’urgence et a été appliqué dans la précipitation. Un an après, comment est-il perçu par les employeurs et les travailleurs ? Comment adapter la réglementation pour qu’il reste une solution et non un problème pour l’entreprise ? Comment l’entreprise va-t-elle devoir s’adapter aux nouvelles formes de relations professionnelles ? c’est autant de questions que le CNP a pu soumettre à ses membres et parties prenantes à travers une étude inédite présentée le 15 juillet à Dakar.

« L’œil Ouvert » - Etude du CNP sur le télétravail au Sénégal – Enjeux et perspectives : cliquez sur le cadre ci-dessous pour accéder au document en pdf.

 

CONDUCTEUR DE L’EMISSION :

00’ 18” - Introduction

01’ 52” - M. Meissa FALL - Président de la Commission Dialogue Social et Normes de Travail du CNP

06’ 27” - M. Abdoul Alpha DIA - Expert, réalisateur de l'étude du CNP,

31’ 49” - M. Mody GUIRO - Secrétaire Général de la CNTS, 

36’ 33”  - M. Dramane HAIDARA - Directeur de l'Equipe d'Appui Technique de l'OIT à Dakar,  

40’ 50”  - Mme Innocence Ntap NDIAYE - Présidente du Haut-Conseil du Dialogue Social,

43’ 22”  - M. Samba SY - Ministre du Travail, du Dialogue Social et des Relations avec les Institutions,                                         

49’ 36” - Générique

50’ 03” - Fin

cliquez dans les cadres ci-dessous pour écouter ou télécharger l’émission radio du CNP ou l’expert

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UN OUVRAGE SUR LES ENJEUX ET LES PERSPECTIVES DU TÉLÉTRAVAIL

Agence de Presse Sénégalaise - APS : Publication 16/07/2021         

Dakar, 15 juil (APS) - Le Conseil national du patronat (CNP) a présenté jeudi, une publication intitulée "L’œil ouvert des employeurs sur le télétravail au Sénégal. Enjeux et perspectives’’, a appris l’APS.
 
Cet ouvrage de 62 pages est le résultat d’enquêtes menées au sein des entreprises dans le but de connaître la perception des patrons d’entreprises du travail à distance. 
 
Il a été produit par la Commission technique "Dialogue social et normes du travail" du Conseil national du patronat (CNP) avec le concours du Bureau des activités des employeurs (ACT/EMP) de l’Organisation internationale du travail (OIT).
 
"80% des chefs d’entreprises du Sénégal ont soutenu avoir commencé le télétravail après l’avènement de la crise sanitaire liée au Covid-19", a dit Abdoul alpha Dia, Expert-Consultant ‘’RH-Organisation’’ lors de la cérémonie de présentation de la publication.
 
Dans cet ouvrage, les entrepreneurs, répondant aux questions des éditeurs, ont souligné les avantages et les inconvénients de ce type de travail qui a été imposé par la pandémie du Covid-19 apparue au Sénégal au mois de mars 2020.
 
"Le télétravail a permis aux personnes ayant des problèmes de mobilité de trouver du travail sans bouger de chez eux. Les salariés qui ont fait recours au télétravail ont vu leurs charges de travail se réduire, les horaires devenir flexibles, entraînant un gain de temps ainsi que la souplesse du travail", a fait savoir M. Dia.
 
Par contre, le travail à distance comporte aussi des inconvénients allant de la perte du lien social à la difficulté dans la gestion des performances, a indiqué l’expert-consultant.
 
"Nous avons noté des problèmes dans la supervision en continu, une augmentation des charges de télétravail et surtout la difficile conciliation entre la vie professionnelle et celle familiale. Des sentiments d’isolement et des phénomènes de dépression ont été aussi enregistrés depuis que les salariés ont entamé le télétravail au Sénégal", a-t-il relevé.
 
Pour sa part, le ministre du Travail, du Dialogue social, des Organisations professionnelles et des relations avec les Institutions, Samba Sy a soutenu que la perturbation que connaît le monde du travail est historique.
 
Citant un rapport de l’Organisation internationale du travail (OIT), il a laissé entendre qu’en 2020, 8,8% des heures de travail ont été perdues au niveau mondial par rapport au deuxième trimestre de 2019, équivalent à 255 millions d’emplois à temps plein.
 
"Les pertes en heures de travail pour 2020 ont été 4 fois plus importantes que pendant la crise financière mondiale de 2009. Pour 2021, on s’attend à une baisse de 3% de perte en heure de travail comparativement au quatrième trimestre de 2019, ce qui équivaut à 90 millions d’emplois en temps plein", a dit M. Sy.
 
Il a fait savoir que le télétravail a montré que le monde est dans un saut civilisationnel et personne ne peut se mettre à l’écart de cette dynamique. 
 
"Qu’on le veuille ou non, le mouvement du monde nous emporte et nous impose par rapport à notre législation du travail de nous ajuster et de nous adapter", a-t-il ajouté.
 
D’après le ministre, la règle des trois unités que sont : lieu, temps, et l’action, ’’socles’’ de l’exécution du contrat de travail, a été sérieusement remise en question.
 
"Avec la pandémie, lorsque les mesures de confinement sont entrées en vigueur, de nombreux travailleurs ont été invités à télétravailler si leur fonction le permettait", a-t-il déclaré.
 
La crise sanitaire a aussi révélé l’existence d’un vide juridique et règlementaire du télétravail dans les Conventions collectives et le Code du Travail au Sénégal, selon la publication.

QUAND LE COVID MET À NU LES INÉGALITÉS HOMMES-FEMMES

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PAR ADRIENNE DIOP

QUAND LE COVID MET À NU LES INÉGALITÉS HOMMES-FEMMES

EXCLUSIF SENEPLUS #SilenceDuTemps - Nos espoirs collectifs post Covid-19 devraient émaner de la prise en charge des impacts de la pandémie sur les femmes au regard du rôle fondamental qu’elles ont joué dans sa gestion

Adrienne Diop  |   Publication 08/07/2021

#SilenceDuTemps - Depuis la survenue du Covid-19, notre santé, nos politiques sanitaires, nos économies, nos méthodes de travail, nos relations familiales et amicales, en un mot, nos vies ont été bouleversées de manière profonde et irréversible. Même dans l’espoir que cette pandémie soit maîtrisée et vaincue, nous ne vivrons plus et ne travaillerons plus comme avant. Son étendue géographique, le lourd tribut en vies humaines, l’impact négatif sur les économies de nos États, les bouleversements intervenus dans le système éducatif, les conséquences désastreuses sur certains corps de métier, les répercussions sur la vie en société et la vie privée, font du Covid-19 une pandémie à nulle autre pareille. En effet, le Covid-19 s’est révélé être beaucoup plus qu’un problème sanitaire. La pandémie a non seulement mis à nu la fragilité de nos systèmes sanitaires, mais elle a également déstabilisé nos économies et modifié notre mode de vie.

Le Covid-19 a permis de mettre les projecteurs sur certaines professions essentielles dont le rôle a été fondamental dans la gestion et prise en charge des malades dans les structures sanitaires et sociales. Ces personnels sont pourtant mal rémunérés et rarement appréciés à leur juste valeur.

Ma réflexion sera principalement axée sur un aspect peu évoqué par les gouvernements et les médias durant cette crise sanitaire : son impact différencié selon les genres. En effet, cela a été l’un des enseignements les plus marquants de cette pandémie. Le Covid-19 a impacté de manière inégale les femmes et les hommes. Les femmes, par la centralité de leur rôle dans la communauté et leur position dans la structure de notre économique, ont beaucoup plus souffert que les hommes de la crise sanitaire. Le Covid-19 a mis en lumière les inégalités et les disparités socio-économiques déjà existantes entre les hommes et les femmes. Avec les plus bas revenus, vivant souvent dans des logements précaires et insalubres et ayant peu d’accès aux soins de santé adéquats, les femmes sont plus exposées aux infections.

Cette pandémie pourrait anéantir les progrès modestes mais importants, acquis en matière d’égalité des genres et des droits des femmes. À cause de la crise sanitaire, les avancées réalisées dans le cadre de l’équité sociale et de l’élimination de la pauvreté sont menacées.

Les conséquences de la crise sanitaire sont nombreuses, mais son impact sur les femmes est considérable et affecte par ricochet tous les autres secteurs. Nos espoirs collectifs post Covid-19 pourraient émaner de leur prise en charge, si l’on considère le rôle fondamental qu’elles ont joué dans sa gestion. Le Covid-19 est une opportunité pour revisiter et redéfinir nos politiques de santé en y renforçant le rôle des femmes et par de-là contribuer à la réduction des inégalités.

Bien qu’ayant été moins affecté que les autres continents si l’on considère le nombre de décès, l’Afrique a le plus souffert des conséquences du Covid-19.  Les pays africains ont payé un lourd tribut aux plans sanitaire, économique et sociétal. Le Covid-19 est venu affaiblir des structures sanitaires déjà fragiles, souffrant de politiques de santé souvent inadaptées, de manque d’infrastructures adéquatement équipées, de financement suffisant, de personnels pas toujours bien formés et souvent mal rémunérés. La pandémie a exacerbé les carences de nos systèmes sanitaires.

- Les femmes en première ligne - 

L’impact de la majorité des crises (guerre et conflits, climat, économique, chômage) est toujours plus sévère sur les femmes que sur les hommes. Le Covid-19 ne fait pas exception. En raison de leur rôle dans la société et de leur forte présence dans les structures sanitaires et sociales, elles sont sur la ligne de front des intervenants de la lutte contre la pandémie, ce qui qui font d’elles les personnes les plus exposées au Covid-19. En effet, les femmes constituent 75% des infirmières, des aides-soignantes et du personnel de soutien. Il faut ajouter à cela que 86% des assistantes sociales et des aides à domicile sont des femmes. 

Au niveau économique également, les femmes ressentent de façon plus prononcée les effets de la pandémie. Elles sont majoritaires dans les secteurs les plus affectés par crise sanitaire comme l’hôtellerie, la coiffure, le commerce et la vente, la restauration et la transformation de produits locaux. Selon les Nations unies, elles constituent également près de 60% des travailleurs qui évoluent dans le secteur informel. L’économie informelle est caractérisée par une certaine précarité, des bas salaires et moins de protection sanitaire. L’OIT informe qu’en 2020 la perte d’emploi des femmes atteint 5% contre 3,9% chez les hommes. Selon ONU Femmes, 75% des Sénégalaises évoluent dans l’économie informelle. Pour atténuer l’impact de la pandémie, le gouvernement sénégalais a soutenu des entreprises. Cependant, seules celles formellement constituées ont le plus bénéficié de cette aide, laissant un grand nombre de femmes livrées à elles-mêmes. Ces dernières sont également désavantagées par l’absence de prise en compte du travail domestique non rémunéré et l’augmentation des soins qu’elles prodiguent à domicile durant la pandémie. En 2020, les femmes représentaient 39% du monde du travail mais ont subi 54% des pertes d’emploi. À cause du Covid-19, près de 50 millions de femmes dans le monde vont basculer dans l’extrême pauvreté.

L’un des effets les plus inattendus et les plus dramatiques de la pandémie est la hausse de la violence domestique. En 2020, une femme sur cinq dans le monde a été victime de comportements violents dans son foyer. Confinement oblige, la situation des victimes de violence conjugale est aggravée par la présence permanente du partenaire en état de stress causé par le Covid-19. Il a été enregistré une hausse de 32% du nombre de plaintes relatives aux violences conjugales. À cette situation, il faut ajouter, les difficultés des services sociaux à répondre à un plus grand nombre de sollicitations dans un contexte de ralentissement économique.

La pandémie est venue nous rappeler que la santé est la chose la plus importante pour un être humain. Le Covid-19 a bouleversé nos vies par la transformation de notre organisation et méthode de travail, l’arrêt des industries, du commerce, des voyages. Nos systèmes d’enseignement ont subi des modifications majeures et la fermeture des hôtels, des restaurants, des lieux de spectacle et de divertissement nous a obligés à changer notre façon de vivre.

Pour faire face à ce défi, il est fondamental de mettre sur pied un système sanitaire performant basé sur des personnels de santé bien formés et bien rémunérés, une infrastructure de dernière génération régulièrement entretenue et des médicaments à suffisance. Ce système repose sur un financement adéquat, de solides politiques sanitaires fondées sur les besoins réels.

Si aucune action n’est prise, la pandémie va creuser l’écart de pauvreté entre les hommes et les femmes d’ici 2030. Les progrès durement acquis pourraient être anéantis par la crise sanitaire si des programmes qui intègrent la dimension genre ne sont pas adoptés. Il est donc important de placer les femmes au centre des mesures sanitaires visant à prévenir et à lutter contre les pandémies.

Le Covid-19 nous donne l’opportunité de revoir et de redéfinir nos politiques de santé à la lumière des enseignements de cette crise en renforçant la contribution des femmes. Elles devraient être impliquées au plus haut niveau lors de la formulation de ces nouvelles politiques de santé et de la prise de décision. La prise en compte de leurs préoccupations et l’identification de mécanismes est indispensable pour atténuer les impacts spécifiques sur les femmes.

- Pour un changement d'approche -

Une nouvelle approche est nécessaire. Elle passe par une volonté individuelle et politique ainsi que par l’implication du secteur privé. Il devrait y avoir des politiques de santé avant et après le Covid-19.

Le volet sanitaire doit être complété par des mesures visant réduire la vulnérabilité financière des femmes. Parmi ces mesures, le soutien des secteurs de l’économie dans lesquelles les femmes évoluent et l’accompagnement de l’économie informelle sont essentiels.

Le renforcement de la résilience économique des femmes passe également par le mentorat des petites et moyennes entreprises dirigées par les femmes, par la facilitation des prêts à taux réduits et par des mesures d’incitation fiscale.

Face à cette pandémie sans précédent, les pays africains ont la formidable opportunité de repenser leurs politiques de développement, de procéder à une redéfinition des objectifs et des moyens pour y parvenir. Nous devons réfléchir sur une politique économique post-Covid qui met l’humain au centre de ses préoccupations. Les hommes, les femmes, les jeunes, le gouvernement, les secteurs privé et informel, les ruraux et les citadins, tous doivent contribuer à l’élaboration de cette nouvelle politique qui devra être solidaire et inclusive

Cette politique passe par le renforcement de notre autonomie pour la satisfaction de certains besoins fondamentaux. Plus que jamais, la nécessité de compter sur nos propres forces pour la production de notre alimentation et pour la maîtrise de notre système sanitaire notamment les médicaments essentiels et le matériel médical. Pour y parvenir, la transformation de nos produits agricoles, halieutiques, d’élevage et miniers est une condition sine qua non. Les nombreux discours et engagements sur cette question ont été, à ce jour, très peu suivis d’actions concrètes.

Au vu des conséquences dramatiques du changement climatique sur nos économies, la protection de notre environnement est l’une des questions qui doit être inscrite au titre des priorités de cette nouvelle vision.

Le numérique s’est imposé comme incontournable durant cette pandémie. Le Covid 19 a eu des répercussions inégales sur les travailleurs et les entreprises. Certains secteurs se prêtent moins au télétravail soit par leur nature soit par manque personnel ayant une bonne maîtrise de l’outil informatique. Seules les sociétés connectées et dotées d’infrastructures et de technologies numériques ont pu continuer à opérer sans trop de dommages. La pandémie a accentué le problème de la fracture numérique. Sans une technologie numérique de pointe, les défis liés au développement et à la croissance économique ne pourront être relevés. Cet élément doit être intégré dans toute nouvelle politique de développement.

Cette pandémie a révélé l’immense potentiel de créativité des Sénégalais, prouvant à suffisance qu’elle ne demande qu’à être stimulée pour éclore. Le potentiel d’innovation des Sénégalais dans les domaines artistique, sanitaire, économique et industriel est immense. L’État a le devoir, par la création d’un environnement favorable à l’innovation et l’esprit d’entreprise, de faire révéler l’ingéniosité, le génie créateur et salvateur présent dans l’imaginaire des citoyens.

Une redéfinition de notre coopération basée un partenariat réellement « gagnant-gagnant » en misant davantage sur nos propres ressources que sur l’assistance étrangère.

L’augmentation des budgets relatifs à la santé, l’éducation, les affaires sociales, l’agriculture et l’infrastructure numérique contribuerait au renforcement de la résilience des populations.

Paradoxalement, cette tragédie que constitue le Covid-19, est une incroyable opportunité à saisir par nos gouvernants pour revisiter notre trajectoire de développement, lui donner une nouvelle direction qui permettrait l’avènement d’une société prospère, solidaire, équitable, inclusive et respectueuse de son environnement.

Adrienne Diop est une journaliste qui a fait ses gammes à la RTS et au magazine Démocratie locale entre autres. Docteure en Sciences de l’information, elle a enseigné au Cesti et à l’IFP Dakar avant d’être nommée ambassadrice du Sénégal en Malaisie entre 2015 et 2018.

SANTE PUBLIQUE : J’ACCUSE MÉDECINS ET POLITIQUES

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J’ACCUSE MÉDECINS ET POLITIQUES

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EXCLUSIF SENEPLUS - J'ai toujours pensé que ceux qui ont prêté le serment d’Hippocrate n’enverront jamais volontairement un patient à la mort. C'est pourtant ce qui est arrivé avec MB qui pouvait être sauvée si les médecins s’étaient bien occupés d'elle

Serigne Saliou Guèye de SenePlus | Publication 28/07/2021

Nous sommes le vendredi 16 juillet 2021 vers 15 h, la dame MB, habitant à Ouest Foire, ressent des douleurs au niveau de la poitrine. Direction Samu municipale où on fait savoir à ses accompagnantes qu’elle a les poumons bouchés. Elle souffre d’une détresse respiratoire selon le diagnostic établi. Souffrait-elle d’une embolie pulmonaire ? Tout laissait croire après les déclarations de la patiente qu’elle souffrait d’un infarctus du myocarde ou d’une angine de la poitrine. Cela nécessite une hospitalisation d’urgence afin de pallier la déficience d’oxygène. Pourtant, pour traiter cette détresse respiratoire, il lui faut un apport supplémentaire d'oxygène inhalé par l’utilisation des lunettes à oxygène, d’un système d'oxygénothérapie nasale à haut débit, ou d’un masque naso-buccal apportant de l'air sous pression au patient. Mais rien de tout cela. Malgré cette détresse respiratoire, le médecin trouvé sur place lui a administré une perfusion qu’elle ne supportait pas. Nonobstant les interpellations de la patiente qui déclare insupporter la perfusion, on lui administre deux bouteilles avant de la laisser partir avec sa douleur qui s’est intensifiée du fait des bouteilles de liquides insupportables.

Le lendemain samedi 17 juillet, MB se plaint à nouveau de la même douleur vers 19h. On constate le début d’une hémiplégie au côté gauche assortie d’une déformation de la bouche. Ce sont là les signes d’un AVC.

Direction toujours Samu qui, cette fois-ci, se rendant compte de la gravité du mal qui consume la stoïque MB, indique à ses accompagnants de l’acheminer dare-dare à l’hôpital Fann sans aucun soin préalable. C’est en ce moment, informé de la douleur de MB, que je me dirige vers Fann. Au Service d’Accueil des Urgences (SAU) de Fann, la dame en souffrance est consultée après plusieurs minutes d’attente. On lui demande de faire un scanner thoracique. Puisqu’elle est en crise convulsive du fait de sa respiration quasi-bloquée, il lui est impossible de faire le scanner. Faut-il l’endormir pour la passer au scanner faut-il la laisser avec ses convulsions ? Les médecins sont divisés sur la question. Finalement, elle a été perfusée dans les couloirs du SAU avec une dose de valium. Mais l’intensité de la douleur à la poitrine ponctuée par des convulsions répétitives empêche la patiente de dormir en dépit de la dose de valium. L’espace du SAU est bondé de patients perfusés qui n’ont pas de place dans les salles d’hospitalisation. La situation est intenable et les images insoutenables. Les malades se tordent de douleur devant l’impuissance de leurs accompagnants et les médecins en sous-nombre sont débordés. En dépit de leur nombre insuffisant, ils se transbahutent d’un malade à un autre pour les soulager du mal qui les consume. On nous dit que plusieurs de ces patients souffrent de la grippe. Mais cette grippe qui ravage les familles n’est-elle pas une manifestation du Covid-19 version Delta ? Le docteur Mamadou Mansour Diouf, médecin anesthésiste réanimateur au CHU de Bordeaux, a confirmé que cette grippe en réalité est une manifestation du Covid.

Revenant à ma patiente, je l’ai quittée vers une heure du matin, la laissant avec mon neveu qui, depuis la veille, ne la quitte pas d’une semelle. Le dimanche 19 juillet vers 4h du matin, je m’enquiers de l’état de santé de MB. On vient de lui ingérer une forte dose de Bialminal (six comprimés de 100 mg) connu pour ses propriétés anticonvulsivantes et sédatives-hypnotiques et un demi-comprimé de Rivotril pour l’endormir. Pourtant, il est indiqué que Bialminal ne doit pas être administré aux patients présentant une dépression respiratoire sévère.

Le site https://medikamio.com/pt-pt/medicamentos/bialminal/pil indique ceci sur le Bialminal : « En tant que sédatif : chez l'adulte, la dose usuelle est de 30 à 120 mg par jour, à répartir en 2 ou 3 prises, mais il n'y a pas d'intérêt à diviser la dose journalière. Chez les patients âgés et affaiblis, il peut être nécessaire d'utiliser des doses plus faibles. Chez l'enfant, la dose habituelle est de 2 mg/kg de poids corporel ou de 60 mg/m2 de surface corporelle, 3 fois par jour. Lorsqu'il est utilisé chez l'enfant avant la chirurgie, la dose habituelle est de 1 à 3 mg/kg de poids corporel. En tant qu'hypnotique : chez l'adulte, la dose hypnotique est de 100 à 200 mg. La dose maximale de Bialminal ne doit pas dépasser 600 mg sur une période de 24 heures. Une surdose ou une intoxication peut provoquer une dépression du système nerveux central (SNC), allant du sommeil au coma profond. Dans les intoxications graves, les complications pulmonaires et l'insuffisance rénale peuvent entraîner la mort. »

Pourtant, c’est une patiente âgée de 45 ans affaiblie souffrant depuis plus de 24 heures de dépression respiratoire à qui on a fait ingérer 600 mg de Bialminal et la moitié d’un Rivotril pour l’endormir. L’overdose est atteinte et malheureusement, MB est plongée dans la voie de la mort. Le dimanche 18 juillet vers 9h, on notifie à mon neveu l’accompagnant de faire le scanner dans son état de veille. Il fallait justifier les 90 000 francs payés la veille pour faire le scanner. Cela fait, aucune maladie n’a été notifiée par les médecins à mon neveu sinon que la patiente a un besoin d’oxygène parce que l’hôpital Fann n’en a pas. Ce qui veut dire qu’il faut sortir rapidement la patiente cliniquement morte de cet hôpital avant qu’on ne le lui impute la responsabilité.

Malgré l’interpellation de mon neveu sur l’état d’inertie de la patiente, on lui fait savoir qu’elle dort et qu’elle ne tarderait pas à se réveiller après l’effet des médicaments combinés. Vers midi, mon neveu me fait savoir qu’il se dirige vers la clinique Casahous à la recherche désespérée d’oxygène parce qu’il n’y en a point dans l’hôpital Fann d’après les médecins. Immédiatement, j’appelle à la Clinique Médic’Kane pour une prise en charge immédiate, mais c’est saturé. SOS Médecins : on me fait savoir que la structure réanime, mais n’hospitalise pas. Suma injoignable. Je tente avec Casahous. Même réponse : clinique archi-pleine. Mon neveu y est déjà, mais tout en étant convaincu que la patiente n’est plus de ce monde. Et c’est vers 12h30 qu’il m’appelle pour me dire que MB a tiré sa révérence. Ce que je refuse. Je refuse de penser que cette dame que j’ai connue pétillante de vie quitte ce monde de cette façon injuste. Et je lui demande de requérir l’avis d’un médecin. Hélas, ce dernier confirme ce que je ne veux pas entendre. C’est en ce moment que je réalise toute l’injustice dont ma parente a été victime du début de son mal jusqu’à sa mort.

J’ai l’habitude d’entendre des gens se plaindre de la mort d’un proche pour négligence médicale, mais je me dis toujours et à tort qu’il y a de l’exagération dans leurs plaintes parce que, pour moi, ceux qui ont prêté le serment d’Hippocrate n’enverront jamais volontairement un patient à la mort. Pourtant c’est ce qui est arrivé avec MB qui pouvait bien être sauvée si les médecins s’étaient bien occupés d'elle depuis le Samu jusqu’à Fann. Vers 13h30, MB est retournée à Fann, mais cette fois-là pour être déposée à la morgue. Aucune mention sur le certificat de décès délivré par le médecin n’indique la ou les cause(s) du décès de MB. Et c’est le lendemain lundi 19 juillet que nous sommes passés à Fann récupérer dans la colère et la tristesse le corps de notre chère MB pour les besoins de l’inhumation à Yoff et l’organisation des obsèques.  

Ainsi, j’accuse les services de la santé du Samu et du SAU de Fann d’être responsables de la mort de MB même si je réalise que les conditions dans lesquelles ces médecins en sous-effectifs travaillent sont insupportables. Mais la vie précieuse et Hippocrate excluent toute discrimination ou favoristime dans le traitement des patients.

J’accuse les services de la santé du Samu et du SAU de Fann de n’avoir pas livré à ce jour les véritables causes de la mort de la patiente MB.

J’accuse les services de la santé du Samu et du SAU de Fann d’avoir prodigué des soins négligents à MB qui ont fini par un empoisonnement létal.

J’accuse le président de la République et le ministre de la Santé de n’avoir pas suffisamment doté nos structures de santé de lits et d’oxygène en quantité suffisante alors les citoyens s’acquittent de leurs impôts pour bénéficier de soins de qualité. 

J’accuse le ministre le président de la République et le ministre de la Santé de condamner à mort tous les patients qui n’ont pas de relations avec des personnalités influentes pour bénéficier de certains passe-droits dans les structures de santé.

Pour finir, j’invite les médecins du SAU de Fann et du Samu à qui je voue un respect profond à revisiter ces passages du serment d’Hippocrate :

« Je respecterai toutes les personnes, leur autonomie et leur volonté, sans aucune discrimination selon leur état ou leurs convictions.

Je donnerai mes soins à l’indigent et à quiconque me les demandera. Je ferai tout pour soulager les souffrances. Je ne prolongerai pas abusivement les agonies. Je ne provoquerai jamais la mort délibérément. »

sgueye@seneplus.com

SÉRIES TÉLÉVISÉES AU SERVICE D’UNE CRÉTINISATION DE LA SOCIÉTÉ SÉNÉGALAISE

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Par Abdoul Aziz TALL

SÉRIES TÉLÉVISÉES ET OBSCÉNITÉS AU SERVICE D’UNE CRÉTINISATION DE LA SOCIÉTÉ SÉNÉGALAISE

La tyrannie de la vulgarité imprime ses marques dans notre société pour qui, traditionnellement, la pudeur, le «kersa» ne sont pas des mots vides de sens. Les danses et les séries dont la télévision nous matraque mettent en scène de piètres acteurs

Abdoul Aziz TALL | Publication 30/07/2021

« Au Sénégal, on dirait que la danse constitue l’activité dominante ; mais pas n’importe quelle danse. Celle que l’on y pratique est à la fois vulgaire et indécente. Il suffit de regarder vos Télévisons pour s’en convaincre» Cette remarque, pour la moins cinglante Abdoul, est celle d’un étudiant américain qui a séjourné au Sénégal et que j’ai rencontré, il y a quelques années, à la Florida Mémorial University. Estimant sans doute avoir heurté ma sensibilité, il s’empressa d’ajouter : «Je me suis laissé dire que sous Senghor, il était inimaginable de voir les danseuses de Sorano ou même celles des manifestations publiques auxquelles il assistait, se livrer à des gestes obscènes. Je suis sûr qu’il serait scandalisé par certaines images de vos Ttlévisions, s’il ressuscitait aujourd’hui».
 
C’était là un réquisitoire sans doute très sévère mais qui hélas, traduit aujourd’hui encore plus que jamais, une triste réalité. En effet, qui se risquerait à réfuter ce constat dressé par un observateur étranger, de surcroît originaire d’un pays dont le peuple, pour être viscéralement attaché à la liberté, sous toutes ses formes, n’en est pas moins gardien, dans certains de ses états, d’un puritanisme connu de par le monde ?

Salvador Dali, célèbre peintre surréaliste espagnol, disait de la télévision, que «ce n’est rien d’autre qu’un instrument de crétinisation des masses». Il suffit de regarder les programmes de la plupart de nos télévisions pour prendre l’exacte mesure de la véracité de ses propos. Nous sommes envahis, à longueur de semaine, par des clips et séries télévisées insipides, qui regorgent d’inepties déconcertantes et où l’obscénité le dispute à la vulgarité, l’irrespect à l’indécence.

Quand on regarde certains des programmes de nos télévisions, l’on ne peut s’empêcher de donner raison à ce psychologue qui affirmait que, dans ces images impudiques, tout ce qui concourait à l’intimité de la vie conjugale se trouve ravalé au rang de pratique banale aujourd’hui. C’est dire que la tyrannie de la vulgarité imprime ses marques, progressivement, dans notre société pour qui, traditionnellement, la pudeur, le «kersa» ne sont pas des mots vides de sens. Les danses et les séries dont la télévision nous matraque mettent en scène de piètres acteurs, sans référentiels dans le pays.

Les thèmes qui y sont abordés et les dialogues qui s’y engagent dénotent simplement de l’idiotie. L’apologie sournoise de la banalisation de l’adultère, des relations coupables ainsi que des tares sociales, suscite bien des frissons chez les pères de famille avertis.

Le souci de dénoncer et d’enrayer tous ces phénomènes sociaux dévastateurs devrait motiver la conception d’une politique culturelle digne de ce nom dans notre pays. On ne saurait créer «un Sénégalais de type nouveau» sur la base d’un syncrétisme dont les composantes sont elles mêmes fondées sur des mirages, des rêves qui modifient de manière fort négative notre façon de penser, de nous habiller, de nous comporter dans la vie familiale, sentimentale, dans nos relations avec nos parents, les personnes âgées etc. Ces séries télévisées, véritables instruments de destruction de notre société, finissent par planter le drapeau du renoncement sur le champ de notre pudeur traditionnelle, fondement de nos valeurs ancestrales, culturelles et religieuses.

 Comble de malheur, ceux qui, sans scrupules, nous imposent ces spectacles affligeants, nous considèrent, sans conteste, comme des demeurés. L’argument selon lequel c’est le public qui en est friand et qui le réclame est purement fallacieux et défie le bon sens. C’est plutôt le public qui est formaté et qui, la mort dans l’âme, se contente de ces moyens d’autodestruction culturelle et sociale. Car, comme le rappelle souvent, et de manière fort pertinente, le sociologue Djiby Diakhaté, « les travaux de Freud ont permis de montrer que le « moi » n’est pas maître dans sa propre demeure ». En plus d’être devenus des poubelles télévisuelles de l’Occident et de l’Amérique du sud, pour reprendre les propos du défunt Khalife Général des Tidjianes, le vénéré El Hadji Abdoul Aziz Sy Dabakh (RTA), ce sont nos propres télévisions qui nous offrent des productions locales, porteuses des germes d’une destruction de nos valeurs culturelles.

Le saint homme n’avait de cesse de lutter, toute sa vie, contre la tyrannie innommable des images attentatoires à nos consciences citoyennes. En fait, l’effet dévastateur de ce tapage médiatique pourrait, à bien des égards, se comparer à l’action néfaste du stupéfiant qui crée l’accoutumance chez les victimes de la drogue. Nos consciences individuelles et collectives sont menacées au plus haut point. Aujourd’hui, hélas, nombre de jeunes croupissent dans le désœuvrement et sont, bien souvent, intellectuellement anesthésiés par des manipulations médiatiques.

Pour eux, l’avenir apparaît comme un gouffre sans fin, un horizon inatteignable. Des lors, que leur reste t-il sinon le suicide mental d’abord, physique ensuite : Ils succombent à l’attrait des mers lointaines, effectuant, ainsi, un terrible saut dans l’inconnu. Quant à la femme au foyer meurtrie par l’oisiveté du quotidien, il ne lui reste plus, comme dérivatif à ses angoisses, que la consommation passive de ces clips et séries télévisés. Ce qui n’est pas sans rappeler l’enfant malade qui se voit administrer un médicament inapproprié et qui, à la longue, lui est dommageable. C’est, osons-le dire, à un «ndeup» collectif que nos télévisions nous invitent régulièrement.

Le Conseil National de Régulation de l’Audiovisuel (CNRA) devrait s’impliquer davantage dans le contrôle des programmes de Télévision. Les Associations de consommateurs de même que celles qui militent pour la défense du droit de l’enfant et de la femme devraient également jouer leur partition. Au demeurant, ces clips et films sont, pour la plupart, des supports publicitaires. Dès lors, il me paraît opportun de s’interroger sur la portée réelle de la loi 83- 20 du 28 janvier 1983, relative à la publicité et dont l’exposé des motifs rappelle, de façon explicite, les règles fondamentales auxquelles celle-ci doit obéir, notamment en matière de décence, de loyauté, de protection de la personne privée, des enfants et des adolescents.

La publicité doit donc être saine et conforme aux us et coutumes de la société sénégalaise. Cette loi, serait-elle tombée en désuétude ? On ne répétera jamais assez, qu’il est plus dangereux, au double plan sociologique et culturel, de nous laisser envahir par certaines images de télévision, que d’accepter la mort pure et simple de notre patrimoine immatériel. Car, dans le cas d’espèce, ce sont les consciences poreuses qui sont détruites, au risque de voir disparaître, progressivement, tous les repères culturels et moraux pourtant si indispensables à une vie harmonieuse, équilibrée. Face à ce tableau sombre qui vient d’être dépeint, n’est-il pas grand temps, pour nos autorités morales et religieuses, d’intervenir vigoureusement ? Comme des sentinelles de l’éthique, Il leur revient plus qu’à toute autre personne de défendre et de préserver leurs concitoyens contre toutes les formes d’agression qu’ils subissent. Il fut un temps où, pour un Sénégalais, décliner son identité était un motif de fierté : Etre Sénégalais avait une certaine signification culturelle positive.

Pour l’heure, un constat amer s’impose : la plupart du temps, les parents font montre de renoncement, Un renoncement que rien ne justifie. Il est temps que des voix autorisées s’élèvent pour dire non ! Pour exiger l’arrêt de cette crétinisation à laquelle nous sommes soumis en permanence, pour dénier à l’ineptie la place de choix que certains s’obstinent à lui attribuer au sein de notre société. Il vaut mieux se priver de télévision que de voir, tous les jours, se déverser dans nos consciences des images qui détruisent tout ce que nous avons de culturellement positif, ce faisceau de valeurs qui, naguère, faisaient la fierté de nos ancêtres.

Tout le monde est interpellé : les pouvoirs publics, les enseignants, les éducateurs, les religieux, imams et prêtres, dans les mosquées et les églises, les prêcheurs de la bonne parole qui officient dans les médias publics et privés, mais aussi et, surtout, les femmes et les jeunes eux-mêmes, victimes toutes désignées. Il incombe à tout un chacun de défendre la culture, la conscience citoyenne de ce pays. Faute de quoi, les jeunes risquent d’avoir, pour seule ambition, de devenir de vulgaires danseurs ou de piètres comédiens, modèles achevés de ridicule et de niaiserie. Tout cela, à n’en pas douter, est le résultat d’un brouillage culturel savamment entretenu par des télévisions qui ne cessent d’envoyer, décidément, des signaux troublants.

Le Professeur Cheikh Anta Diop nous a toujours invités à l’enracinement d’abord et à l’ouverture après. Nos racines sont en train, hélas, de s’effriter, face à l’agression culturelle et au mimétisme nocif dont nous sommes les principaux complices, pour ne pas dire les véritables acteurs. Une ouverture vers l’autre mal contrôlée nous conduit, inéluctablement, vers des anti- valeurs, avec des habits d’emprunt d’autant plus ridicules qu’ils nous donnent l’image d’individus hybrides, en errance dans un désert culturel accablant.

 

LE CONTENU LOCAL DANS LE SECTEUR DES HYDROCARBURES

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L’ENTREPRISE CITOYENNE

Le magazine radiophonique du Conseil National du Patronat

En partenariat avec la Fondation Konrad Adenauer 

Diffusé le 12/06/2021

Sur Radio Sénégal International - 92.5 FM

CONTEXTE DE L’EMISSION 

Le Sénégal s’est engagé dans une exploitation pétrolière et gazière vertueuse, respectueuse de l’intérêt public et inspirée des meilleures pratiques en matière de gouvernance, de transparence, de respect de l’environnement.

Cette démarche inclusive s’appuie sur la Loi sur le Contenu Local, et sur le Comité National de Suivi du Contenu Local logé au Ministère du Pétrole et des Energies.

L’Entreprise Citoyenne propose d’en examiner les enjeux, les modalités pratiques et les perspectives d’avenir.

Avec comme invités :

Administration Publique : Ministère du Pétrole et des Energies :

- Mr Thierno Seydou Ly, Directeur des Hydrocarbures,

- Mr Mor Ndiaye MBAYE, Secrétaire Technique du Comité National de Suivi du Contenu Local - CNSCL,

CNP :

-Mr Tidiane SARR – Membre du Bureau Exécutif d’OPTIC.

CONDUCTEUR DE L’EMISSION : 

00’ 18” - Introduction

02’ 15” - M. Thierno Seydou LY – Directeur des Hydrocarbures,

20’ 01” -M. Mor Ndiaye MBAYE – Secrétaire Technique du Comité National de Suivi du Contenu Local,

36’ 09” - M. Tidjane SARR – Membre du Comité Exécutif de OPTIC, 

47’ 31” - Conclusion                                              

48’ 09” - Générique

48’ 46” - Fin

L’ENTREPRISE CITOYENNE

Le magazine radiophonique du Conseil National du Patronat

Un produit REZO Communication - Tel : (221) 76 682 09 67 - email : rezo.sn@gmail.com

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Macky Sall invite le privé sénégalais à saisir les opportunités

Le Président de la République, M. Macky Sall a invité les opérateurs économiques sénégalais à saisir les opportunités offertes dans le cadre du ‘’contenu local’’ afin de bénéficier des retombées de l’exploitation des hydrocarbures. Il a fait cette adresse à l’occasion d’un atelier qu’il a présidé le mardi 02 juillet 2019, au Centre International de Conférence Abdou Diouf (CICAD).

La mise en œuvre de la loi sur le contenu local dans le secteur du pétrole et du gaz a réuni, le mardi 02 juillet 2019 au Centre International de Conférence Abdou Diouf (CICAD) de Diamniadio, un parterre d’experts, investisseurs, secteur privé et acteurs de la société civile pour échanger sur la portée du mécanisme qui a pour but de garantir, mais aussi de sécuriser l’exploitation des ressources pétrolières et gazières. Sous la présidence du président de la République, l’atelier a permis au chef de l’Etat, M. Macky Sall, de rappeler d’emblée les dispositions constitutionnelle, légale et règlementaire mises en place pour encadrer la gestion et l’exploitation des ressources pétrolières et gazières découvertes.

Outre l’adhésion du Sénégal à l’ITIE dans le cadre de la transparence de la bonne gouvernance, le président de la République a évoqué tour à tour, l’adoption du nouveau code pétrolier, la création du COS-PETROGAZ, la loi sur le contenu local ou « local content », objet de l’atelier.

Sur la problématique du contenu local, le Chef de l’Etat dira qu’il réserve une part capitale au secteur privé. Il a dit vouloir, à travers ses actes et des initiatives, prendre des mesures de sauvegarde des intérêts du Sénégal dans les contrats pétroliers et gaziers. 

’L’exploration et l’exploitation des ressources de pétrole et de gaz nécessitent des investissements immenses, qui sont hors de portée du budget national (…). Mais la bonne nouvelle, c’est que la chaîne de valeur du pétrole et du gaz offre une large gamme d’activités génératrices de revenus et à la portée du secteur privé national’’, a expliqué le chef de l’État.

C’est dans ce cadre qu’il a invité les opérateurs économiques sénégalais à saisir les opportunités offertes dans le cadre du ‘’contenu local’’ pour bénéficier des retombées de l’exploitation des hydrocarbures.

Le président Macky Sall a également lancé un appel à la jeunesse pour mieux se former et se préparer à intégrer le marché de l’emploi dans le secteur du pétrole et du gaz. ‘’J’appelle la jeunesse sénégalaise à s’investir dans la formation, pour acquérir le savoir et le savoir-faire. (…) Avec la création de l’Institut national du pétrole et du gaz, je souhaite que nos jeunes se préparent dès maintenant à la prise en charge intégrale de la filière pétrole et gaz’’, a lancé Macky Sall aux jeunes.

Pour conforter son engagement à soutenir les acteurs locaux dans le cadre du contenu local, le chef de l’État a promis de signer ‘’sans délai’’ les décrets d’application du ‘’contenu local’’, qui doivent permettre d’adapter le secteur des hydrocarbures aux ‘’meilleures pratiques internationales’’.

Garant de la réussite

‘’Au terme de la concertation d’aujourd’hui, avec les conclusions, je prendrai sans délai les décrets d’application relatifs au contenu local. Sans délai, parce que je veux qu’on avance en mode Fast Track‘’, a-t-il soutenu, faisant allusion à la rapidité d’exécution qu’il dit désormais attendre de l’administration publique.

Les participants à l’atelier, qui se sont exprimés lors de cet atelier ont, à l’unanimité, salué la pertinence de l’initiative qui pose le débat pour des solutions de conservation et de sécurisation des ressources pétrolières et gazières, non sans demander au chef de l’Etat d’être le garant de la réussite de ce projet, avec toutes les contraintes qui peuvent compromettre sa mise en œuvre.

Clôturant les travaux, le Chef de l’Etat a tenu à remercier tous les participants qui ont répondu à l’appel, en particulier le privé national et les forces vives de la nation. Il a tenu également à rassurer les acteurs, toujours en commençant par les privés nationaux, dont il veut faire des « champions », les entreprises étrangères qui investissent dans la recherche et, la communauté nationale. Enfin, il a tenu à revigorer l’ensemble des acteurs car, dira-t-il, « en nous organisant mieux, nous pouvons réussir le contenu local parce que nous avons beaucoup de potentialités pour participer activement dans les activités connexes du pétrole et du gaz ».

Pour rappel, cet atelier de mise en œuvre de la loi sur le contenu local dans le secteur du pétrole et du gaz a été organisé par le Ministère du Pétrole et des Energies, à la tête duquel, le Ministre Mouhamadou Makhtar Cissé que le Président a tenu à féliciter, pour l’excellent travail qu’il abat dans le secteur, depuis sa prise de fonction.

 

Pétrole-gaz : comment le Sénégal atteindra 50% de contenu local en 2030 ?

Pour conjurer la malédiction des ressources naturelles, le Sénégal qui devrait entamer sa production gazière en 2022 balise le terrain par une réglementation en faveur de l'inclusion. Au cœur du dispositif, une loi sur le contenu local pour permettre aux entreprises locales de mieux saisir les opportunités dans la chaîne de valeur pétro-gazière. Le texte en attente d'un decret d'application repose sur cinq points.

Maimouna Dia

29 Nov 2019, 10:58

 

Dans la nouvelle constitution révisée et adoptée en mai 2019, l'article 25 stipule que les ressources naturelles appartiennent au peuple sénégalais. (Crédits : DR)

« Au terme de la concertation d'aujourd'hui, avec les conclusions, je prendrai sans délai les décrets d'application relatifs au contenu local [dans le pétrole et gaz, ndlr]. Sans délai, parce que je veux qu'on avance en mode Fast Track », promettait le chef de l'Etat Sénégalais Macky Sall le 2 juillet dernier aux experts, investisseurs, acteurs de la société civile, réunis dans un atelier à Diamniadio. Quatre mois plus tard, les entreprises privées, les syndicats d'hydrocarbures et la société civile sénégalaise s'impatientent et réclament le décret d'application. Le contenu local est un mécanisme de sauvegarde des intérêts du Sénégal dans les contrats pétroliers et gaziers, un secteur où les investissements se chiffrent à coups de milliards de dollars, hors de la portée des entreprises locales. Toutefois, la chaîne de valeur de ce domaine offre des opportunités et activités génératrices de revenus, à la portée du secteur privé sénégalais que la loi sur le contenu local entend favoriser.

Rehausser la part des nationaux dans les hydrocarbures

Une loi qui s'applique sur l'ensemble du territoire, traite de l'amont et de l'aval pétrolier, concerne à la fois les bénéficiaires des contrats directs, les prestataires et les fournisseurs. Une manière pour le Sénégal d'atteindre son objectif de parvenir à 50% de contenu local dans l'industrie pétrolière et gazière en 2030. Fer de lance de cette ambition, la loi sur le contenu local met l'accent sur la formation des ressources humaines, le renforcement des petites et moyennes entreprises (PME) et des petites et moyennes industries (PMI), ainsi que  la réalisation de projets sociaux dans les domaines de la santé, de l'éducation, de l'eau potable et de l'électrification rurale, entre autres. Le contenu local a aussi été conçu pour booster la création d'une industrie de valorisation des hydrocarbures, notamment la pétrochimie, les engrais, la raffinerie, apportant de la valeur ajoutée.

Le contenu local dans le code pétrolier sénégalais

Cette loi sur le contenu local intervient en renfort d'un arsenal juridique mis en place par le Sénégal depuis les premières découvertes pétrolières et gazières en 2014. Au tout début de l'année, le pays a adopté la loi n°2019‐03 du 1er février 2019 portant Code pétrolier, en remplacement de la loi n°98‐05 de 1998. Le texte fixe de nouvelles règles relatives à la prospection, à l'exploration, au développement, à l'exploitation, au transport, au stockage des hydrocarbures ainsi qu'à la liquéfaction du gaz naturel sur l'ensemble du territoire national. Il définit certaines dispositions du régime fiscal de ces activités.

La question du contenu local a été abordée dans l'article 58 du code pétrolier en 5 points. Il stipule que les titulaires de contrat pétrolier ainsi que les entreprises travaillant pour leur compte doivent donner la possibilité aux investisseurs privés nationaux, disposant de capacités techniques et financières, de participer aux risques et aux opérations pétrolières. Le texte prévoit d'accorder la préférence aux entreprises sénégalaises pour tous les contrats de construction, d'approvisionnement ou de prestation de services, à conditions équivalentes en terme de qualité, quantité, prix, délais de livraison et de paiement.

Lire aussi :Hydrocarbures : le Sénégal annonce son prochain cycle d'octroi des licences pour octobre

 L'article 58 stipule qu'employer, à qualification égale, il faudra accorder la priorité au personnel sénégalais pour la réalisation des opérations pétrolières sur le territoire national. Dans le nouveau code pétrolier sénégalais, le troisième dispositif du contenu local garantit le transfert technologique en direction des entreprises sénégalaises à travers un accompagnement des multinationales en place. Elles sont tenues de contribuer à la formation professionnelle des cadres et techniciens sénégalais à travers un programme annuel de formation défini dans le contrat pétrolier applicable. Enfin, le contenu local devrait permettre le versement dans une institution financière de premier rang le montant d'une caution pour la réhabilitation et la restauration des sites. Un ensemble de mesures à confirmer et à clarifier par la loi sur le contenu local tant attendu pour le pays de 16 millions d'habitants selon les chiffres de la Banque Mondiale.

Lire aussi :Sénégal-Mauritanie : sur fond du scandale Petro-Tim, Kosmos cède 10% de ses parts dans le projet GTA-1

 Le Sénégal qui a aussi adopté le 16 octobre un projet de loi portant code gazier a rejoint en 2013 l'Initiative pour la Transparence dans les Industries extractives (ITIE). Toujours dans les réformes juridiques, la nouvelle constitution sénégalaise révisée et adoptée en mai 2019 stipule en son article 25 que les ressources naturelles appartiennent au Peuple sénégalais. L'objectif est d'en assurer une gestion optimale pour le pays, déjà secoué par des scandales de corruption dans le secteur pétro-gazier, où les premières productions sont attendues dans trois ans. Le Sénégal s'apprête à exploiter son gisement Ahméyim-Grand Tortue (GTA) de 700 milliards de mètres cubes de gaz, à partager avec la Mauritanie à partir de 2022. Des réserves de 473 millions de barils de pétrole brut ont été découvertes dans le champ SNE, rebaptisé « Sangomar », dont la production est attendue en 2023. Des volumes importants mais qui classent le pays loin dernière les géants africains des hydrocarbures : Le Nigéria, l'Angola, l'Algérie, la Libye et dans une moindre mesure le Congo, le Gabon, et le Tchad.

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Loi sur le «contenu local» au Sénégal : un vœu pieux ?

Par Ouestafnews

16/10/2019

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Photo d'illustration /crédit ITIE Sénégal

Ouestafnews – Pressé par la société civile pour apporter de plus de justice sociale dans l’exploitation et la gestion de son secteur extractif, le Sénégal a adopté une loi sur le «contenu local» dans la gestion du secteur pétrolier et gazier, votée en janvier 2019. Que recouvre cette loi sur le contenu local ? Quelle efficacité pour des populations qui régulièrement se disent lésées et continuent de revendiquer plus de retombées sur les richesses tirées du sous-sol ? Une telle loi suffit-t-elle pour mettre fin aux controverses qui agitent un secteur ultra sensible? Ouestaf News a tenté d’y voir plus clair.

La loi relative au «contenu local» dans le secteur des hydrocarbures fait référence à l’ensemble des initiatives prises en vue de «promouvoir l’utilisation des biens et des services nationaux ainsi que le développement de la participation de la main-d’œuvre, de la technologie et du capital national dans toute la chaine de valeur de l’industrie pétrolière et gazière», selon le texte de la loi du 24 janvier 2019.

Pour Fatou Cheikh Dieng, juriste et environnementaliste, le contenu local est synonyme de plus de «justice sociale».

C’est un «concept globalisant qui intéresse le développement durable et qui a une vocation compensatrice. En effet, son objectif premier est de promouvoir les potentialités locales et d’impulser un développement à travers la formation et l’achat local», souligne-t-elle dans un texte envoyé à Ouestaf News.

Abondant dans le même sens, M. Omar Cissé, coordonnateur du Pôle Industrie Extractives et Développement Durable à Enda Lead Afrique (ONG internationale basée à Dakar) souligne l’intérêt que revêt une loi sur «le contenu local» dans la mesure où elle cadre avec les meilleures pratiques dans le secteur.

Cette loi sur le contenu local concerne le secteur des hydrocarbures (pétrole et gaz). En ce qui concerne le secteur minier, le code minier voté en 2016 ne prévoit que quelques dispositions favorisant ce «contenu local».

«Les titulaires de titres miniers, leurs fournisseurs et leurs sous-traitants utilisent autant que possible des services et matières d’origine du Sénégal, des produits fabriqués ou vendus au Sénégal dans la mesure où ces services et produits sont disponibles à des conditions compétitives de prix, qualité, garanties et délais de livraison», précise l’article 85 du code minier.

Dans la Constitution sénégalaise, votée par référendum, le 05 avril 2016, l’article 25-1 souligne que «les ressources naturelles appartiennent au peuple. Elles sont utilisées pour l’amélioration de ses conditions de vie. L’exploitation et la gestion des ressources naturelles doivent se faire dans la transparence et de façon à générer une croissance économique, à promouvoir le bien-être de la population en général et à être écologiquement durables». La loi sur le contenu local est, pour certains, une suite logique de cette disposition de la charte fondamentale.

Contenu local et défi de la transparence

Parmi, les objectifs fixés par la loi sur le contenu local on note l’augmentation de la valeur ajoutée locale et la création d’emplois locaux dans la chaîne de valeur des industries pétrolières et gazières, la favorisation du développement d’une main-d’œuvre locale qualifiée et compétitive. Surtout, il s’agit de promouvoir des biens et services locaux et de renforcer la compétitivité nationale et internationale des entreprises sénégalaises.

Toutefois, cette générosité des textes n’est pas facile à transformer en réalité sur le terrain. Neuf mois après le vote de la loi, certains acteurs de la société civile attendent encore la matérialisation des objectifs définis.

Lire aussi : Sénégal : le pétrole toujours en débat 

«Pour l’instant, une bonne partie de ces dispositions ne sont que de vœux pieux qui doivent être mieux encadrés par le décret d’application qu’on attend avec impatience», déclare Omar Cissé dans un entretien accordé à Ouestaf News.

Demba Seydi, le coordonnateur de l’organisation internationale Publiez Ce que Vous Payez (PCVP), nuance aussi quelque peu l’espoir que suscite le contenu local.

«Ce que l’Etat pourrait mobiliser comme ressources peut ne pas dépendre directement du contenu local, parce que nous sommes dans une situation de partage de revenus, la plupart des contrats sont des contrats de partage. Le contenu local est plus adressé au secteur privé national et aux chercheurs d’emplois », a-t-il expliqué au téléphone à Ouestaf News.

Alors que la production des hydrocarbures n’est pas encore entamée, la gestion de la manne pétrolière fait déjà l’objet de plusieurs controverse depuis 2012, notamment avec l’affaire Petro-Tim.

Considérée comme une nébuleuse par des observateurs, l’affaire a poussé la société civile à exiger la publication de tous les contrats pétroliers pour plus de transparence. La publication des contrats dans le secteur extractif figure d’ailleurs parmi les normes de transparence fixées par l’Initiative pour la transparence dans les industries extractives (ITIE).

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Dans un rapport publié en octobre 2019 et intitulé : «Blanchiment de Capitaux et Financement du Terrorisme liés au secteur de l’Industrie Extractive et Minière en Afrique de l’Ouest », le Groupe intergouvernemental d’action contre le blanchiment d’argent en Afrique de l’Ouest (Giaba), souligne que «la corruption constitue une des infractions sous-jacentes les plus graves du secteur extractif ».

Cité par le quotidien privé  «Le Quotidien», Fary Ndao, ingénieur-géologue et auteur d’un livre sur le pétrole et le gaz au Sénégal, estime que pour réussir, le «contenu local» nécessite d’abord une vraie volonté politique.

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«Il faut veiller à ce que les compagnies ne mettent pas des barrières à l’entrée (…), il faut que l’Etat joue un peu des coudes pour que les entreprises locales aient accès aux marchés et éviter les conflits d’intérêts», souligne-t-il.

«Contenu local» et emplois

Le secteur extractif en 2017 a contribué à hauteur de 108,7 milliards au Budget de l’Etat sénégalais (…) dont 96 milliards FCFA fournis par les mines, souligne le rapport publié en novembre 2018 par l’Initiative pour la transparence dans les industries extractives (ITIE/Sénégal).

Au Sénégal, alors que l’industrie pétro-gazière est naissante (années 90), l’industrie minière est présente depuis les années 50 avec l’ouverture de deux grandes mines de phosphates à Taïba et à Lam-Lam dans la région de Thiès (Ouest).

Cette industrie s’est étoffée avec l’exploitation actuelle de minerais comme l’or, le zircon, l’ilménite, le fer et les produits de carrière tels que les calcaires et argiles industrielles ainsi que l’attapulgite.

Dans le domaine des hydrocarbures, le Sénégal exploite du gaz depuis la fin des années 90 à Diender et à Gadiaga avec un potentiel estimé à 357 millions de m3, selon le rapport 2018 de l’Initiative sur la transparence des industries extractives (ITIE).

Mais c’est récemment que le potentiel pétro-gazier s’est accru de manière notable avec les découvertes relativement importantes en offshore, notamment le gisement dénommé Grand Tortue Ahmeyim que le Sénégal va exploiter conjointement avec la Mauritanie via un accord signé avec le britannique British Petroleum (BP).

Doté d’un potentiel de 15 billions de pieds cubes de gaz, ce gisement devrait, selon les prévisions, entrer dans la phase production en 2022 et va durer 30 ans, d’après les statistiques fournis par BP. Pour ce qui est du pétrole, la première découverte a été annoncée par Cairn Energy fin 2014. Aujourd’hui les réserves sont estimées à 1 milliard de barils.

Au total 26 entreprises (dont 18 dans les mines) sont actives dans le secteur extractif sénégalais et d’après les donnés de ITIE-Sénégal compilées par Ouestaf News. Ces sociétés comptent 7.981 employés (permanents et contractuels) dont près de 95% sont des nationaux. Seulement le haut degré de technicité et la provenance des capitaux font que l’essentiel des emplois stratégiques sont tenus par les étrangers, là où les Sénégalais occupe la grande masse des emplois non qualifiés. D’ailleurs, l’impact de tous ces chiffres chez les Sénégalais reste encore peu perceptible.

Le taux de pauvreté au Sénégal atteint 34% de la  population selon des chiffres de la Banque mondiale mis à jour en avril 2019. Curieusement, cette pauvreté reste très marquée dans les régions minières comme Kédougou (est), un haut lieu de l’exploitation aurifère.

« Le paradoxe de l’abondance dont témoignent ces régions combine l’existence de ressources minières à une pauvreté ironique et appelle à une convergence d’actions émanant de la société civile, de l’Etat et des populations locales directement impactées par l’exploitation des mines », estime la juriste Fatou Cheikh Dieng.

Au niveau régional, le contenu local est encouragé par la Directive minière de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao). Cette directive qui date de 2009 formule cinq objectifs pour les Etats membres dont le premier est de « … promouvoir les droits de l’homme, la transparence et l’équité sociale et de garantir la protection des communautés locales et de l’environnement dans les zones minières de la sous-région».

Ce texte exhorte aussi les Etats membres à créer «un Fonds de développement socio-économique auquel les titulaires de droit et titre miniers et autres parties prenantes, ont l’obligation de contribuer pour le développement des activités de conversion de l’après mine dans les communautés locales affectées».

AS/mn/ts

LA DEPORTATION, L’INTERNEMENT ET LA MORT DE ALINE SITOË DIATTA EN 1944

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PAR IBRAHIMA MAIGA

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A seulement 24 ans, le destin de Aline Sitoë Diatta s’est accompli tragiquement à Tombouctou en 1944. Elle y avait été condamnée à purger une peine d’internement de dix ans ; elle n’a pas tenu un an, victime du scorbut

Ibrahima MAIGA | Publication 24/04/2021

A seulement 24 ans, le destin de Aline Sitoë Diatta s’est accompli tragiquement à Tombouctou en 1944. Elle y avait été condamnée à purger une peine d’internement de dix ans ; elle n’a pas tenu un an, victime du scorbut. A Tombouctou, la mémoire locale n’a pas gardé d’elle beaucoup de souvenirs . Par contre, au Sénégal, le débat sur le rapatriement de ses restes est encore d’actualité dans un contexte où l’engagement mémoriel toise la lecture politique.

On en sait beaucoup sur Gbéhanzin , Samori, Chérif Hamahoullah, tous capturés et brandis comme des fauves de foire avant d’être déportés dans des territoires aux conditions climatiques rudes ; en Martinique, en Guinée, en Côte d’Ivoire, en Mauritanie, au Gabon, à Madagascar, au Soudan français,… S’y ajoute le flot d’assignation à l’intérieur de chacun des territoires colonisés par la France, la « grande nation des droits de l’Homme ». C’était l’époque des « camps d’internement », des « camps d’enfermement administratif » et même des « camps de concentration » sous les tropiques, dans l’ombre de la deuxième guerre mondiale !

Aline Sitoë Diatta, elle, a été « affectée » au Soudan français. D’armes, elle n’avait que son intelligence ! De munitions, elle n’avait que son charisme, et son verbe ! Elle n’a pas été jugée par un tribunal, car l’administration n’a jamais pu réunir contre elle des preuves. Elle a cependant été condamnée à « internement administratif à titre préventif » parce que son engagement en faveur de l’autonomie et de la renaissance de son peuple dérangeait. Mue par une force intérieure propre à l’univers animiste des diolas de la Casamance, Aline était tout simplement un leader. Elle avait des pouvoirs mystiques.

Le Lieutenant-Colonel Sajous, Commandant du cercle de Ziguinchor, à l’époque des faits, donne un portrait de Aline en ces termes : « Servie par le prestige d'avoir procuré aux Diolas un hivernage très pluvieux gage d'une excellente récolte de riz et succédant à une année 1941 sèche, elle prescrivait à son entourage de féticheurs de ne pas obéir aux Blancs, de leur refuser les hommes pour le service militaire, de ne pas accepter les achats obligatoires de paddy, de ne pas entretenir les routes » (Archives d'outre-mer d' Aixen-Provence, 14 MI 1835 2G 42, Rapport politique du Sénégal). Ce court extrait résume la volonté du colonisateur d’en finir avec elle. Ces propos seront confortés par Christian Roche, un historien, le dernier proviseur français du lycée de Ziguinchor, dans un article intitulé « Chronique casamançaise.

Le cercle de Ziguinchor au Sénégal pendant la guerre de 1939-1945 » ( Revue des Outre- Mères, revue d’histoire, 1986) . D’après Roche, parce que justement Aline avait une aura et un discours nationaliste, qui débouchait sur une sorte de subversion, le Lieutenant-Colonel Sajous a décidé « de frapper les imaginations ». Pour le militaire français, Aline Sitoé pouvait être considérée comme « l'inspiratrice des troubles » ayant secoué la Casamance. Cette déduction était suffisante pour justifier qu’il se rende en mission dans la zone d’évolution de Aline. Sajous est d’une grande barbarie. Il tue, frappe et menace de mettre le feu à tous les villages. Pour couper court à cette barbarie qui s’abattait sur des innocents, Aline a préféré se rendre. Roche précise que cet évènement a lieu le 31 janvier vers midi. « … la jeune prophétesse, appuyée sur des cannes en raison d'une infirmité congénitale, vint se livrer aux Français afin d'éviter toute effusion de sang », rapporte l’historien. Mais Sajous n’est pas content. Il veut humilier la nationaliste et la gifle ; ce qui ne passe pas .

Captive désormais, elle prend la direction de Ziguinchor en même temps que certains de ses proches, entre 20 et 23 personnes. Elle sera condamnée à la déportation. Dans un premier temps, elle est à Kayes. Elle finira par Tombouctou. L’historien sénégalais Papis Comakha Fall qui a travaillé sur les mêmes faits « Automne-hiver 2020 » (page 19, n° 9-10 ), insiste sur le caractère pacifique de la lutte engagée par Aline Sitoë Diatta. Malgré tout, l’armée française avait décidé de la réduire en silence avec la consigne suivante : « faire respecter les ordres, arrêter les rebelles et mettre fin par la force, à toute tentative de rébellion jusqu’à la soumission complète ». (Télégramme lettre n° 31 adressée au gouverneur général de l’AOF, Saint Louis, 22 janvier 1943). Dès lors, les mobiles ne devaient plus être compliqués. Ils seront condensés en trois points : « mensonges, escroquerie et rébellion ». Pour Roche, Aline a été condamnée « administrativement », parce qu’elle tenait un « message religieux qui préconisait un retour au riz rouge, au lieu du riz blanc recommandé par les Français, par sa prédiction que les Blancs partiraient un jour… . ».

La condamnation devenait possible du seul fait de l’application du décret colonial du 15 novembre 1924, une des illustrations du régime de l’indigénat. La volonté qui sous-tendait l’invocation de ce texte qui autorisait tous les abus était qu’ « il importe au plus haut point pour le retour de la tranquillité dans le pays que la visionnaire Aline Sitoë Diatta et ses adeptes soient écartés pour longtemps des lieux où ils ont exercé leur emprise ». ( Rapport d’ensemble tendant à faire interner la dame de Kabrousse, Aline Sitoë Diatta et ses principaux adeptes, 1943). L’autorité coloniale parle de la « rebellion d’Effok et des villages environnants qui croient, à la lettre, aux promesses que ( Aline) leur avaient faites » ( Archives Nationales du Sénégal, Rapport d’interrogatoire du 15 mars 1943). Aline Sitoë est donc coupable. Sur sa condamnation-même , nous n’avons pas trouvé meilleure source que Papis Fall. Il écrit que Aline Sitoë a été condamnée le 15 juin 1943, par un Arrêté général du Gouverneur. Le prononcé de l’acte admnistratif précise qu’il s’agit d’une peine de « dix ans de réclusion à passer dans le cercle de Kayes ». ( procès verbal d’interrogatoire du 15 mars 1943). On retrouve donc la trace de Aline à Kayes, mais pour quelques temps seulement.

L’administration a soudainement pris la décision de durcir les conditions de détention de la prisonnière en l’envoyant à Tombouctou. Le 27 août 1943, est pris l’arrêté qui fixe désormais son lieu de détention à Tombouctou. ( Histoire d’Aline Sitoë : mourir à Tombouctou, Soleil, mardi 11 octobre 1983, p.2). On sait maintenant que le « voyage » de Aline a été préparé à partir de Kayes. De Kayes, elle a embarqué dans un train pour Bamako et de Bamako à Koulikoro, le terminus du « Dakar-Niger » . De Koulikoro, elle a pris un bateau pour Tombouctou. Pour bien comprendre ce qui est arrivé à Aline Sitoë Diatta, il faut se placer dans le contexte de la deuxième guerre mondiale ; une guerre qui a ébranlé la France, dans ses fondements. En un quart de tour, Hitler a occupé Paris.

La France est divisée entre ceux qui pensaient qu’il fallait collaborer avec l’occupant nazi (Vichy, Pétain et consorts) et ceux qui appelaient à la résistance ( De Gaulle et alliés). La défaite de la France a eu un écho énorme dans les colonies. Mais la « puissance » ne voulait pas montrer de faiblesse. Les administrateurs fidèles à Vichy vont s’évertuer à briser toute forme de résistance locale. C’est dans ce contexte qu’il faut situer les évènements qui vont placer au devant de la scène Aline Diatta et Chérif Hamaoullah, entre 1941 et 1943. Voilà, pourquoi Aline a été mise aux arrêts et déportée à Tombouctou. La symbolique est forte. Aline Sitoë provient d’un milieu fondamentalement animiste. La condamner et l’interner à Tombouctou, une ville pieuse musulmane, était un autre supplice. Les colonisateurs ont apparemment vite réussi leur besogne. La résistante vivra à peine un an.

LA POLEMIQUE ET LA RECUPERATION

Le rapatriement des restes de Aline Sitoë est toujours de haute importance politique et stratégique au Sénégal. La question avait été soulevée depuis, sous le Président Senghor, dans la ligne de mire de l’indépendance du pays en 1960. Sans succès. Le 15 décembre 2011, une décision du Conseil des ministres du Sénégal s’est emparée du sujet. On y lit que : « Le Chef de l'Etat a, …, tenu à faire une déclaration solennelle sur sa volonté de faire rapatrier les restes de l'héroïne nationale Aline Sitoë DIATTA, très jeune résistante, enlevée puis déportée à Tombouctou au Mali où elle est décédée et enterrée dans un petit cimetière ….. Il a déjà obtenu l'autorisation du Président du Mali pour un éventuel rapatriement des restes d'Aline Sitoë DIATTA.

A cet effet, le Chef de l'Etat a instruit le Conseil de mettre en place une Commission, présidée par le Dr Christian Sina DIATTA et composée d'historiens, de chercheurs et de cadres casamançais, qui devra, suivant ses instructions, se rapprocher des autorités coutumières et religieuses de la Basse - Casamance, notamment, le Roi d'Oussouye et les autorités de Cabrousse, afin de solliciter leur avis. En cas d'avis contraire, le Président de la République a indiqué que le Sénégal demandera au Mali une concession pour y édifier un symbole digne du rang de notre héroïne nationale. » (Communiqué du conseil des ministres du Sénégal, 15 décembre 2011). Depuis, plus rien, jusqu’en 2019. Cette année-là, le militant des droits de l’homme, Alioune Tine a « reveillé » le dossier de Aline Sitoë. Il venait d’effectuer une mission à Tombouctou ; mission au cours de laquelle il a pris certaines informations.

Tine a placé son plaidoyer au plus haut niveau politique en interpellant directement le Président Macky Sall et Abdoulaye Baldé, le maire de Ziguinchor. Que dit Tine ? « Nous demandons solennellement au Président de la République Macky Sall et le maire de Ziguinchor Abdoulaye Balde de prendre toutes les initiatives diplomatiques opportunes auprès de leurs homologues maliens pour que le corps de Aline Sitoë Diatta soit rapatrié à Cabrousse auprès des siens », a-t-il lancé, sur sa page électronique. « Le Sénégal doit absolument promouvoir la mémoire de cette héroïne qui a été déportée comme d'autres résistants africains au colonialisme, comme Samory Touré, Serigne Cheikh Bamba Mbacké. », a-t-il ajouté. Ses arguments, il les tire encore de l’histoire, car « ne pas honorer la mémoire de Aline Sitoë, c'est comme la punir une deuxième fois après sa déportation, en confinant sa tombe dans un anonymat infamant.'' !

Ainsi donc, Alioune Tine entendait réussir une grande « mobilisation de l'opinion pour rapatrier au Sénégal la dépouille de l'héroïne Aline Sitoë Diatta enterrée de façon anonyme au milieu de nulle part à Tombouctou » ! Alioune Tine donne des informations capitales de façon pathétique. Il écrit : « Elle a été enterrée devant sa maison, juste devant le lit d'une rivière asséchée, pratiquement seule au monde ». « Les inscriptions en arabe sur sa tombe ont été effacées par les groupes armés djihadistes. La tombe est gardée par une famille musulmane très pieuse…. ». Il affirme avoir pu se recueillir sur la tombe

…. LES NECESSAIRES RECOUPEMENTS

Sur ce chapitre, il convient de relativiser le cri de coeur de Aliou Tine, car les faits se présentent autrement à Tombouctou. Tine et les autres sources, dont certaines sont encore vivantes, ne sont pas concordantes sur la matérialité des faits se rapportant à la mort de Aline Sitoë Diatta. Tine s’est, peut-être recueilli sur une tombe qui n’était pas celle de la grande dame de Casamance. Papis Fall reste toujours notre principale source d’information. Il est d’une grande précision dans le déroulement des faits qu’il écrit, que Aline a été placée dans « le camp des internés ». Aujourd’hui, cette place est occupée par l’école fondamentale qui porte le nom de « Bahadou Boubacar ».

Saloum Ould Elhaj, un instituteur et un historien de Tombouctou, d’une grande réputation confirme ces propos. Il nous a précisé, au cours d’une conversation téléphonique, que l’école « Bahadou Ben Boubacar » dont il s’agit est l’ancienne « école nomade » de Tombouctou ; école qui a connu des enseignants illustres comme Modibo Kéïta, le futur président de la République du Mali. Dans le camp des internés, rapporte Fall, Aline sera mise à l’isolement. Elle qui vient de la forêt va manquer de fruits. Sa santé ne va pas tarder à se dégrader. Elle est transférée au dispensaire local où elle va rendre l’âme, le 22 mai 1944. Elle a souffert du scorbut, une avitaminose sévère. La date du 22 mai est aussi celle qui a été communiquée, dans un rapport, par le président Abdou Diouf, sur la base d’une enquête menée à Tombouctou en 1989. Cependant, Jean Girard qui a travaillé de façon indépendante sur le même sujet ( « Genèse du pouvoir charismatique en Basse Casamance (Sénégal) », (Institut fondamental d'Afrique noire », (1969) avance une autre date qui se situerait en 1946. Mamadou Nkruma Sané, un des leaders du mouvement indépendantiste casamançais ne retient pas lui aussi la date du 22 mai, comme celle de la mort de Aline. Il penche pour 1945, car , soutient-il, à cette date, il dispose d’informations , notamment un rapport médical qui recommandait à l’administration coloniale de libérer Aline et son mari.

Aline, dit Sané, n’était même pas morte. Ses assurances, les voici : « Je peux vous confirmer qu’elle est vivante quelque part puisque son mari qui est plus âgé qu’elle n’est disparu qu’aux environs de 1998. La reine avait été arrêtée les 28-29 janvier 1943. Elle n’avait que 23 ans. En plus, elle n’a jamais été déclarée morte par ceux qui l’ont arrêtée et l’ont incarcérée à Tombouctou. C’està-dire l’autorité coloniale de l’époque. C’est cette même autorité coloniale qui a produit le document que je mets à votre disposition. Lequel document me dit qu’elle a été libérée vivante avec son mari et le reste des Casamançais qui étaient emprisonnés avec elle à Saint-Louis, Matam, Podor et Kayes. C’est elle seule qui n’a pas pu regagner sa terre natale.

Par contre son mari est rentré. Vous verrez le décret colonial qui avait motivé son arrestation et le second décret qui avait donné l’autorisation de la libération des détenus politiques casamançais arrêtés pendant la période coloniale. » ( Wal fadjiri, 2007, repris sur le site du Soleil, 26 décembre 2007). Sur la mort même de Aline Sitoë Diatta, Saloum Ould Elhadj est catégorique. Il parle de la consignation de ce décès dans le registre de la mairie de Tombouctou, document aujourd’hui malheureusement disparu depuis l’entrée barbare des djihadistes dans la ville en 2012. Saloum Ould El Hadj et plusieurs autres sources qui ont travaillé sur l’identification de la tombe de Aline Sitoë sont formels.

Aline repose, non pas au bord d’un quelconque ruisseau, mais bien au cimetière qui porte le nom de Sidi El Ouaffi Araouani, sis à Sarey Keyna, à quelques pas seulement du dispensaire où a été constaté le décès de la « dame de Kabrousse ». Du reste, se demande Saloum Ould Elhadj : « pourquoi l’enterrer au bord d’un ruisseau alors qu’il y a un cimetiere à moins de cent mètres ? » Saloum Ould Elhaj a les preuves de son affirmation en la personne de Gobi, à l’époque, Maçon du cercle de Tombouctou. C’est à ce titre, qu’à l’aide de quelques prisonniers, il a procédé à l’inhumation du corps. Cette version locale est crédible. Elle détruit littéralement les assertions de Alioune Tine qui dans son plaidoyer, affirme que « Aline a été enterrée devant sa maison, juste devant le lit d'une rivière asséchée, pratiquement seule au monde.

Les inscriptions en arabe sur sa tombe ont été effacées par les groupes armés djihadistes.La tombe est gardée par une famille musulmane tres pieuse qui nous a révélé que Aline Sitoé Diatta est considérée comme une sainte dans la ville aux 333 saints qu'est Tombuctou ». Outre Saloum Ould Elhadj, nous avons également pris contact avec Modibo Sidibé, un enseignant natif de Tombouctou. Modibo Sidibé qui a effectué de solides études en histoire est diplômé de l’Ecole Normale Supérieure de Bamako, promotion 1985. Il est très engagé dans la vie de la communauté. Au cours d’une entretien téléphonique, il nous a donné une confirmation irréfutable de l’existence d’une tombe au nom de Aline Sitoë Diatta à Sareykeyna. Au cours d’une visite, il a été surpris de constater qu’une stèle avait été posée sur un emplacement qui jouxtait une des tombes qu’il était venu visiter dans le cimetière cité.

La stèle était récente. Donc, Aline repose bien à Tombouctou et non « au mileu de nulle part ». L’épitaphe dit ceci : « Ici repose Ainsétou Assétou, Aline Sitoé Diatta, Décédée 29 Mai 1944 à Tombouctou ». Bien sûr que cette annotation induit de nouvelles interrogations. La première est relative au nom « Ainsétou Assétou ». Est-ce le nom par lequel, la résistante a été adoptée à Tombouctou ? Il y a une sorte d’homophonie qui peut soutenir cette hypothèse. La deuxième porte sur la date du décès de la personne. L’épitaphe parle du 29 mai, alors que les documents évoqués avant retiennent la date du 22 mai 1944. C’est dire que la confusion n’est pas encore à son terme. Il reste que la jeunesse de Tombouctou ne sait quasiment pas qui a été Aline Sitoë Diatta, qu’est ce qui l’a conduit ici et comment elle est passée dans la postérité mémorielle de son pays.

Au Sénégal, plusieurs infrastructures porte son nom : des écoles, des stades, une résidence universitaire, le ferry qui relie Dakar à Ziguinchor,….

Le sens de son combat doit être entretenu et évoqué dans la mémoire, car plus que la Casamance et le Sénégal, Aline est une combattante de la liberté pour l’Afrique. Elle ne se battait pas pour les femmes, mais pour son peuple. Il ne faut jamais perdre de vue qu’elle a été une victime, elle aussi, des partisans de Vichy. Elle est une preuve de la négation des droits de l’homme, tout court. La ville de Tombouctou pourrait ériger un monument en la mémoire de cette héroïne. Ne s’agit- il pas ici aussi d’un autre bien culturel ? Cela, au nom de la légendaire fraternité qui lie Tombouctou à la grande communauté sénégalaise, bien au-delà de la colonisation française. En témoignent la broderie, la musique, les arts culinaires, les échanges religieux…

*Paru dans L’Essor, le Quotidien national d’information du Mali, « Supplément culturel », du 12 mars 2021

DOCUMENTS CONSULTÉS

Archives d'outre-mer d' Aix-en-Provence, 14 MI 1835 2G 42, Rapport politique du Sénégal Archives Nationales du Sénégal, Rapport d’interrogatoire du 15 mars 1943 Christian Roche, Chronique casamançaise. Le cercle de Ziguinchor au Sénégal pendant la guerre de 1939-1945, Outre- Mères, revue d’histoire, 1986 Communiqué du conseil des ministres du Sénégal, 15 décembre 2011 Jean Girard, intitulé : Genèse du pouvoir charismatique en Basse Casamance (Sénégal), 'Institut fondamental d'Afrique noire (Ifan), 1969 Le Soleil , Histoire d’Aline Sitoe : mourir à Tombouctou, , mardi 11 octobre 1983, p.2 Papis Comakha Fall, « Automne-hiver 2020 » (page 19, n° 9-10) Télégramme lettre n° 31 adressée au gouverneur général de l’AOF, Saint Louis, 22 janvier 1943

CONSOMMER SENEGALAIS - AU-DELA DU SLOGAN ...

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L’ENTREPRISE CITOYENNE

Le magazine radiophonique du Conseil National du Patronat

En partenariat avec la Fondation Konrad Adenauer 

Diffusé le 27/03/2021

Sur Radio Sénégal International - 92.5 FM

CONTEXTE DE L’EMISSION

Consommer sénégalais, au-delà du slogan, c’est une volonté politique des dirigeants du pays, c’est une promesse des fournisseurs de biens et services, c’est un défi à relever pour les consommateurs citoyens qui en ces temps troublés par la pandémie du Covid-19, relèvent de l’urgence absolue.

En effet, le monde a découvert en 2020 l’impérieuse nécessité de réviser les fondamentaux de l’économie mondiale boostée par le libre-échange, pour revenir à des notions d’autonomie de fonctionnement, voire de souveraineté économique.

Recentrer le tissu industriel et les chaînes de valeur, développer les compétences locales, conscientiser les consommateurs aux vertus structurantes de la production locale en comparaison avec les importations, voilà le défi que les gouvernements doivent relever avec les industriels, sociétés de services et consommateurs nationaux.

A travers cette émission, le CNP donne la parole au Ministère du Commerce et des PME ainsi qu’à des entrepreneurs représentatifs du tissu industriel sénégalais afin de décliner les lignes directrices d’une politique devant consacrer le « Consommer Sénégalais » comme passeport pour l’Emergence.

 

CONDUCTEUR DE L’EMISSION :

00’ 17”  - Introduction

01’ 30”  - M. Seydina NDIAYE - Directeur des PME - Ministère du Commerce,

15’ 50”  - M. Alexandre ALCANTARA - DG de SIAGRO - Groupe Kirène,

21’ 32”  - Mme Valérie NDIAYE - DG de Estéval.

41’ 20”  - M. Bagoré BATHILY - PDG de la Laiterie du Berger,

50’ 40”   - Conclusion                                             

51’ 17”   - Générique

51’ 53”   - Fin

 

ANNONCE DU CNP

Le Conseil National du Patronat - CNP vous donne rendez-vous samedi 27 mars 2021 de 11h à 12h sur Radio Sénégal International - RSI 92.5 FM pour son émission radiophonique "l'Entreprise Citoyenne", produite en partenariat avec la Fondation Konrad Adenauer.

Thème : La promotion du "Consommer Local",

Avec comme invités :

- M. Seydina NDIAYE - Directeur des PME - Ministère du Commerce,

- M. Alexandre Alcantara - DG de SIAGRO - Groupe Kirène,

- M. Bagoré BATHILY - PDG de la Laiterie du Berger,

- Mme Valérie NDIAYE - DG de Estéval.

Pour tout savoir sur la promotion de l'emploi du Consommer Local, rendez-vous samedi 27 mars 2021 de 11h à 12h sur Radio Sénégal International - RSI 92.5 FM,

Avec le CNP.

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Banque et assurance : Ces pratiques qui révoltent les Sénégalais

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Banque et assurance : Ces pratiques qui révoltent les Sénégalais

Par: Babacar WILLANE - Seneweb.com | SENEWEB - 15 février 2021

Les Banques au Sénégal

Les services offerts aux Sénégalais par les banques et sociétés d’assurance ne sont pas toujours des meilleurs. Les manquements sont listés dans le rapport 2020 de l’Oqsf.

Les banques ont beaucoup d’efforts à faire pour que le Sénégal puisse dépasser ses 20% de taux de bancarisation. En effet, les Sénégalais ne manquent pas de griefs à l'encontre des banques, mais aussi de la microfinance et des sociétés d’assurance. C’est ce qui ressort du rapport 2020 de l’Observatoire de la qualité des services financiers (Oqsf), dirigé par le banquier Habib Ndao. Durant cette année, l’Oqsf a reçu 503 dossiers de médiation dont 347 pour les banques et Système financier décentralisé (Sfd) appelé microfinance et 156 pour les assurances.

Dans le secteur bancaire, on note, entre autres manquements, l’insuffisance des informations liées aux droits et obligations du client au moment de l’ouverture des comptes et durant tout son fonctionnement. Mais il se pose surtout le problème de la mobilité bancaire des clients. Cette problématique est liée, d’après le rapport, « au coût jugé élevé de la délivrance des attestations d’engagement et de non engagement par les banques et les SFD ; aux pénalités appliquées en cas de remboursement anticipé de crédit ; aux lenteurs concernant la délivrance aux clients demandeurs d’attestations d’engagement et d’attestation de non engagement ».

Autant d’obstacles que les banques mettent devant les clients pour empêcher la mobilité, alors que depuis le 1er octobre 2014, la Bceao a rendu gratuits 19 services bancaires parmi lesquels la clôture de compte. Un problème de confiance qui pourrait expliquer aussi le faible niveau de consentement préalable des clients.

Les dirigeants des banques, quant à eux, se plaignent du « volume relativement élevé des créances en souffrance » et du « coût jugé exorbitant des frais de droits de nantissement notamment les formalités d’actes notariés ».

La mauvaise volonté des assureurs

Dans les Sfd, c’est surtout le coût exorbitant du crédit et le niveau d’éducation financière des cibles jugé faible qui posent problème. Il s’y ajoute le surendettement et le papillonnage chez certains segments de clients, sans oublier les méthodes de recouvrement des gros calibres du sous-secteur, jugées inappropriées.

Dans le secteur de l’assurance, on dirait une mauvaise volonté de la part des assureurs. Car au-delà de la qualité de l’information avant le contrat, jugée insuffisante, on note des lenteurs dans la nomination des experts, « les retards récurrents dans le règlement des demandes de rachat formulées par les assurés ; le non-paiement à bonne date des capitaux échus par l’assureur de la rente scolaire ». Le tout sans compter la contestation des rapports des experts par les assurés et l’incapacité de l’assureur d’honorer ses engagements au terme du contrat, « malgré de multiples relances de la part de l’assuré ».

Face à tous ces écueils, l’Oqsf formule, entre autres recommandations, le renforcement de la transparence de l’information sur le crédit du côté des banques, la levée des entraves à la mobilité des usagers, « l’amélioration de la qualité du réseau des GAB en raison des défaillances récurrentes notées notamment en période de rush ».

La contribution des banques

Habib Ndao et Cie veulent également la mise à disposition des conditions tarifaires à l’Oqsf et aux associations de consommateurs ainsi qu’une meilleure collaboration des banques dans le traitement des conflits. Quant au secteur de l’assurance, les recommandations se résument en deux mots : transparence et diligence du fait de l’opacité et des lenteurs susmentionnées.

Malgré les manquements, les banques ont joué un rôle important dans l’accompagnement de l’économie sénégalaise face aux impacts de Covid-19. Parmi les actions phares des banques, « les mesures de reports d’échéances pour la clientèle impactée », que ce soit les ménages ou les entreprises. Un soutien possible grâce aux mesures prises par la Bceao et l’Etat du Sénégal à travers le fonds force Covid-19 doté de 1000 milliards. L’Etat a accordé des facilités de crédit et procédé à des remises fiscales, entre autres mesures, pour rendre l’économie sénégalaise résiliente.

En outre, souligne Habib Ndao, secrétaire exécutif de l’Oqsf, l’Etat du Sénégal continue à multiplier les initiatives pour renforcer le secteur financier. On note à ce point, la « concertation pour l’allégement des taux d’intérêt débiteurs, élaboration d’une stratégie nationale de l’inclusion financière, mise en place d’un groupe de travail sur l’éducation financière de masse, projet de mutualisation de l’offre de services financiers… ».

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Franc Cfa, le silence complice des progressistes français

Franc Cfa, le silence complice des progressistes français

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Par: SenePlus - Seneweb.com | 04 février, 2021

Franc Cfa, le silence complice des progressistes français

À quelques rares exceptions près, les progressistes français ne se sont pas intéressés aux récentes manœuvres du pouvoir macroniste qui visent à prolonger la durée de vie du franc CFA. Leur silence permet la poursuite de la logique coloniale de la France en Afrique.

Après l’avoir annoncée à grand renfort de publicité fin 2019, le pouvoir macroniste a soumis ces derniers mois aux députés et aux sénateurs une « réforme » du franc CFA d’Afrique de l’Ouest. Le débat était capital pour l’avenir de 14 pays africains, dont le destin reste orienté par cette monnaie coloniale. Il l’était d’autant plus que les changements proposés étaient mineurs.

Les progressistes français auraient pu saisir cette occasion pour soutenir concrètement ceux qui, en Afrique, aspirent à une indépendance complète et militent pour la fin de la domination monétaire de la France. À quelques rares exceptions près, ils ne l’ont pas fait.

Dans l’indifférence quasi générale, la « réforme » a été adoptée par l’Assemblée nationale le 9 décembre 2020, puis par le Sénat le 28 janvier.

Inertie de l’opinion publique et des médias

Souvenons-nous des observations de Mongo Beti formulées il y a plusieurs décennies : c’est parce que « l’opinion publique » française « et en premier lieu la presse » sont restées inertes que le pouvoir gaulliste a pu briser l’élan des progressistes camerounais et n’octroyer qu’un semblant d’indépendance au Cameroun en 1960 (Main basse sur le Cameroun, autopsie d’une indépendance, Maspero, 1972).

L’écrivain anti-colonialiste dénonçait la solidarité à géométrie variable des intellectuels français, lesquels ménageaient toujours les intérêts français en Afrique : alors qu’ils s’engageaient avec passion aux côtés des gauches d’Amérique latine ou d’Europe de l’Est pour dénoncer la dictature sévissant dans leurs pays, ils ne manifestaient aucune solidarité à l’égard des Camerounais en lutte contre un régime tyrannique installé et soutenu par Paris.

Le même phénomène est manifestement toujours à l’œuvre à propos du franc CFA, créé par un décret du général de Gaulle en 1945 et placé depuis sous la tutelle du Trésor français : ces dernières années, son caractère rétrograde et inique n’a suscité que peu d’intérêt et d’émoi en France.

Ainsi, les économistes hétérodoxes et les politistes français qui se sont emparé de la question se comptent sur les doigts d’une main. Les activistes, dont les militants de l’association Survie, sont eux aussi peu nombreux. Les quelques médias dits « de gauche » ont pour leur part assuré le service minimum. Certains d’entre eux ont même relayé en mai 2020 l’idée que la France « actait » officiellement la « fin du franc CFA », prenant pour argent comptant le récit officiel sur la réforme du président Emmanuel Macron.

La vérité est pourtant tout autre et n’est pas difficile à établir : le système CFA ne fait l’objet que de légères modifications de nature symbolique pour les huit États qui utilisent le franc CFA en Afrique de l’Ouest (Bénin, Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Guinée-Bissau, Mali, Niger, Sénégal, Togo), et il demeure inchangé pour les six pays d’Afrique centrale qui l’ont en partage (Cameroun, Congo, Gabon, Guinée équatoriale, République centrafricaine, Tchad). Tout ceci apparaît clairement dans les rapports et compte-rendus des débats parlementaires de ces derniers mois.

Il n’y a guère que des élus communistes, à l’Assemblée nationale et au Sénat, qui ont vraiment porté la contradiction à un gouvernement déterminé à préserver un dispositif décrié partout dans le monde, en mettant en exergue devant leurs collègues les limites et faux-semblants de la pseudo « réforme » du président Macron. Ils ont fait également des efforts de communication hors des hémicycles parlementaires. Mais ils n’ont pas réussi à briser le mur d’indifférence érigé autour du franc CFA depuis 75 ans et soutenu par toutes les couches de la société française – consciemment ou pas.

Un système appauvrissant

Or les enjeux sont cruciaux et les raisons de s’indigner sont nombreuses.

Le franc CFA est plus qu’une incongruité, c’est une seringue plantée dans les veines des pays africains qui vampirise leurs ressources. Il entretient un système colonial qui n’existe nulle part ailleurs, et sa persistance garantit celle de la pauvreté et de ses expressions multiples – dont l’émigration forcée vers la Méditerranée.

L’ancrage du franc CFA à l’euro, monnaie forte, pénalise en effet la compétitivité-prix des productions des pays qui l’utilisent, favorisant des économies rentières portées sur la consommation de marchandises importées, au détriment d’une politique axée sur l’augmentation des capacités de production nationales. À cause de la parité fixe avec l’euro, ces États ne peuvent pas se servir du taux de change en cas de crise économique et sont alors obligés de réduire leurs dépenses publiques.

Le mécanisme pousse par ailleurs les banques centrales de la zone franc à limiter les crédits bancaires qu’elles accordent aux ménages, aux entreprises et aux États. Conséquence, ces derniers voient leurs dynamiques productives paralysées et sont contraints d’emprunter sur les marchés financiers internationaux, à des taux élevés, pour financer leur développement. Quant au principe de libre transfert, l’un des piliers du fonctionnement du système CFA, il facilite des sorties colossales de capitaux.

Au bout du compte, les pays de la zone franc se trouvent enfermés dans un rôle de producteurs de matières premières et de consommateurs de produits importés. Le franc CFA contribue ainsi à l’augmentation du chômage, de la misère, de l’émigration dite « illégale »... Ce n’est sans doute pas un hasard si la plupart des personnes secourues en janvier 2021 par SOS Méditerranée étaient originaires de pays de la zone franc, dont le Mali (certes en guerre), la Côte d’Ivoire (qui n’est pas en guerre) et le Sénégal (pas en guerre non plus). Sur quatorze États membres de la zone franc, neuf sont aujourd’hui classés parmi les « pays les moins avancés » (PMA).

Pas de démocratie

L’hypocrisie des tenants du système CFA devrait aussi faire réagir tous ceux qui se préoccupent de démocratie, d’équité, de justice. Rendez-vous compte : la France garde son emprise sur le franc CFA sous le prétexte qu’elle joue un rôle de « garant », mais ce rôle est en réalité fictif !

Le président malien Modibo Keita l’a dit publiquement en 1962 (« La France ne garantit le franc CFA que parce qu’elle sait que cette garantie ne jouera pas effectivement »), le journaliste français Paul Fabra l’a écrit en 1972 dans Le Monde dans un article intitulé « Zone franc ou zone de pauvreté ? », et cette réalité a été rappelée à plusieurs reprises lors des derniers débats parlementaires. Au cours d’une séance de la commission des finances de l’Assemblée nationale en septembre 2020, un député a ainsi expliqué que la « garantie » française n’avait pas été activée depuis au moins 1994 et que tout était fait pour qu’elle ne le soit plus.

De plus, Paris gère le système dans l’opacité. Il suffit de lire le récent rapport de la commission des affaires étrangères de l’Assemblée nationale sur le projet de réforme, écrit par un député LREM, pour s’en rendre compte. « L’annonce du 21 décembre 2019 à Abidjan, par les présidents français Emmanuel Macron et ivoirien Alassane Ouattara, de la réforme monétaire a été une surprise pour tout le monde – élus, opérateurs économiques, banque centrale et population », note ce texte, parlant d’un « accord négocié dans le plus grand secret par une poignée de personnes à Paris et à Abidjan ».

Les dirigeants et citoyens des pays concernés par la réforme ont été ainsi mis devant le fait accompli par les présidents Macron et Ouattara. Ceux des États de la CEDEAO (Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest), dont ils font aussi partie, n’ont pu que constater la volonté de Paris de torpiller leur propre projet de monnaie commune (c’est l’un des trois objectifs non avoués de la réforme, les deux autres visant à réduire les critiques et à faire faire quelques économies au Trésor français).

Quant à la suite du processus d’adoption de cette « réforme » précipitée, elle est, elle aussi, stupéfiante, comme l’ont fait remarquer le sénateur communiste Pierre Laurent et le député communiste Jean-Paul Lecoq. Ce dernier a souligné devant ses collègues de l’Assemblée nationale combien il était aberrant et suspect que la France soit « le premier pays à ratifier cet accord, alors qu’en toute logique elle aurait dû attendre que les pays directement concernés l’aient fait d’abord ».

M. Lecoq a dû rappeler que la monnaie est une « institution politique et économique absolument fondamentale, puisque c’est elle qui permet à une zone de déterminer et de piloter son économie en se fixant des objectifs de développement ».

Toutes ces manœuvres du gouvernement pour prolonger la durée de vie du franc CFA (on peut ajouter que la « réforme » a été en partie appliquée avant même d’être soumise aux parlements français et africains) et la fiction organisée autour de la soi-disant « garantie » française n’intéressent donc pas les médias.

Sans gêne, la France officielle continue par conséquent d’imposer sa volonté aux autres (pour sauvegarder évidemment ses propres intérêts et ceux des entreprises françaises qui opèrent sur le continent et sont les premières bénéficiaires du système).

Les observateurs étrangers choqués

Ailleurs, les réactions sont très différentes : les journalistes, économistes et politistes des autres pays occidentaux sont choqués lorsqu’ils constatent que le franc CFA existe encore, soixante ans après les indépendances, et qu’il fonctionne sur la base des principes posés durant la période coloniale. En général, ils n’ont pas peur de le qualifier de « colonialiste », « impérialiste », « désastreux », « système d’exploitation », etc.

Dans un article publié en décembre 2020, le journaliste espagnol Jaume Portell Caño identifie le franc CFA comme l’une des cinq principales causes du phénomène migratoire partant du Sénégal vers l’Europe, une approche systémique que l’on trouve rarement dans la presse française.

Les Africains anglophones regardent eux aussi avec effarement cette domination monétaire française sur leurs voisins francophones. En 2018, la célèbre écrivaine nigériane Chimamanda Ngozi Adichie déclarait : « Je vois beaucoup de différences entre les mondes anglophone et francophone, dans l’occupation de l'espace en Afrique. Le franc CFA rattaché au franc français (aujourd’hui l’euro, ndlr), par exemple, me paraît complètement rétrograde. »

Le changement ne viendra pas des dirigeants africains, soumis à la France

Le fait que les relations de la France avec les pays de la zone franc soient autant viciées et malsaines est l’autre raison qui devrait interpeler les progressistes français. Car le changement ne viendra pas des dirigeants africains : parce qu’ils sont pour la plupart redevables envers les autorités françaises (qui les ont bien souvent aidés à conquérir le pouvoir et à s’y maintenir durablement) ou craignent des représailles, ils ne prendront pas le risque de déplaire à Paris. Ils ne bougeront pas non plus parce qu’ils font généralement partie de la petite élite africaine qui tire quelques avantages du système CFA.

C’est pourquoi les activistes, économistes, politiques, journalistes et citoyens des pays africains qui réclament l’abolition du franc CFA depuis plusieurs décennies ont besoin que leurs collègues français et européens se mobilisent.

Le franc CFA n’est pas une question annexe ou exotique qui ne concernerait que les pays africains, qu’il faudrait laisser aux fonctionnaires de Bercy ou aux lobbies françafricains, et garder reléguée dans les bas-fonds de l’actualité. Il est la clé de voûte de la domination que la France continue d’exercer sur des États formellement indépendants.

Tant que l’ensemble des progressistes français s’en désintéresseront, ils conforteront par leur silence l’État français dans son choix de poursuivre sa logique coloniale en Afrique.

Pour en savoir plus sur le franc CFA : L’arme invisible de la Françafrique, une histoire du franc CFA, Fanny Pigeaud et Ndongo Samba Sylla (La Découverte, 2018). En anglais : Africa's Last Colonial Currency, The CFA Franc Story, Fanny Pigeaud & Ndongo Samba Sylla (Pluto Press, février 2021).

Vaccin covid en 41 questions

Vaccins contre le Covid-19 : voici les réponses aux 41 questions les plus fréquentes que vous vous posez

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Par: francetvinfo.fr - Francetvinfo.fr | 04 février, 2021 à 20:02:02 | Lu 2475 Fois | 6 Commentaires

Vaccins contre le Covid-19 : voici les réponses aux 41 questions les plus fréquentes que vous vous posez

NB : La dernière mise à jour de ce contenu date du 26 janvier 2021. Certaines informations ont pu évoluer depuis. Une mise à jour sera effectuée dans les jours qui viennent.

Après des débuts timides et critiqués, la campagne de vaccination contre le Covid-19 en France, lancée le 27 décembre, semble désormais bien engagée. Un deuxième vaccin, celui de Moderna, a obtenu son autorisation et un troisième, développé par AstraZeneca, doit à son tour obtenir un feu vert fin janvier.

Ce déploiement suscite de nombreuses questions légitimes auxquelles franceinfo s'efforce de répondre ici, dans le cadre de son opération #OnVousRépond. Les plus curieux pourront également consulter le document (en PDF) réalisé par la Société de pathologie infectieuse de langue française (Spilf).
Efficacité des vaccins

> Le vaccin de Moderna a-t-il la même efficacité que celui de Pfizer ?


Ces deux produits ont la même efficacité. Les vaccins de Pfizer/BioNTech et de Moderna ont fait l'objet d'essais cliniques de phase 3, en double aveugle et avec groupe placebo, menés respectivement sur 43 000 et 30 400 personnes. Le premier a atteint une efficacité de 95% sur les formes graves après l'administration des deux doses. Le deuxième, lui, a atteint une efficacité de 94,1% après les deux doses. L'efficacité a atteint 90,9% chez les participants à risque de Covid-19 sévère.

> Y a-t-il des vaccins meilleurs que d'autres ?

Il est difficile de répondre à cette question, car tout dépend du critère adopté. Il existe aujourd'hui quatre grandes familles de vaccins, basés sur différentes technologies : à ARN messager (Pfizer, Moderna...), à vecteur viral (AstraZeneca...), à protéine recombinante et atténués (vaccins chinois des laboratoires Sinovac et Sinopharm...). Tous les produits mis sur le marché obtiennent de bons résultats. A ce jour, sur le plan clinique, il n'y a pas de raisons de privilégier le vaccin de Pfizer plutôt que celui de Moderna dans la stratégie vaccinale, estime d'ailleurs la Haute Autorité de santé. Elle souligne simplement que "les conditions de stockage sont moins contraignantes dans le cas du vaccin de Moderna". L'efficacité du vaccin développé par AstraZeneca est évaluée autour de 70%. A titre de comparaison, celle du vaccin contre les grippes saisonnières oscille entre 60 et 70% selon les années.

> Les vaccins sont-ils efficaces sur les nouveaux variants ?

Cela reste à confirmer. La seule chose dont on dispose pour le moment, c'est d'une pré-publication (en anglais) sur l'effet de la mutation N501Y – située au niveau de la protéine Spike, ou protéine S, et commune aux variants identifiés au Royaume-Uni et en Afrique du Sud. Les auteurs ont utilisé le sérum d'individus immunisés par le vaccin de Pfizer/BioNTech, et ont vérifié que cette modification ponctuelle (N501Y) n'avait pas d'impact sur la fixation des anticorps vaccinaux et leur capacité de neutralisation virale. Cette mutation-clé a pour effet d'améliorer l'affinité entre le virus et les enzymes ACE2, qui font office de points d'entrée dans les cellules. C'est ce qui explique que les variants concernés se transmettent davantage.

"Au total, nous avons donc maintenant testé 16 mutations différentes [du variant], et aucune d'entre elles n'a vraiment eu d'impact significatif. C'est la bonne nouvelle."
Phil Dormitzer, un scientifique de Pfizer spécialisé dans les vaccins viraux

dans un communiqué

Mais celui-ci reste prudent, car "cela ne veut pas dire que la 17e n'en aura pas". Il faut donc attendre les résultats pour toutes les mutations composant les variants. Cela passe, par exemple, par l'étude des effets éventuels de la mutation E484K du variant identifié en Afrique du Sud, qui suscite quelques inquiétudes.

Du côté de Moderna, on se veut rassurant. La société américaine a annoncé, lundi 25 janvier, que son vaccin permettait bien le développement d'anticorps contre les deux principaux variants du virus du Covid-19, apparus ces dernières semaines au Royaume-Uni et en Afrique du Sud. Les experts s'attendent à ce que le vaccin "protège contre les variants détectés à cette date", assure la firme dans un communiqué (en anglais), au terme d'essais. A l'avenir, si besoin, la technologie ARN pourrait toutefois permettre à Pfizer et Moderna d'adapter leurs vaccins en quelques semaines.

> Quelle est la durée de protection du vaccin ?


La durée de la protection n'a pas été établie à ce jour, rappelle la Haute Autorité de santé. Soulignons toutefois que le vaccin de Moderna a produit des anticorps au moins pendant 90 jours après la vaccination, selon une étude parue début décembre et menée sur 34 participants aux essais cliniques. Une légère baisse du niveau d'anticorps a été observée, tout en restant à un niveau plus élevé que dans le cas d'une immunité acquise après une infection. Ces trois mois sont un minimum et la durée d'immunité est sans doute plus longue.

Une autre étude, parue dans la revue Science, s'est penchée sur la persistance des anticorps après une infection naturelle. Les auteurs ont observé la présence d'anticorps sur une durée allant de six à huit mois dans près de 90% des cas, mais sur un petit échantillon d'une quarantaine de personnes. Et rien n'indique encore que les mêmes résultats soient obtenus avec le vaccin. Encourageant, mais pas plus. Il reste également à évaluer la "mémoire immunitaire", qui pourrait également prolonger cette protection contre la maladie dans le temps.

> Une fois vacciné, peut-on quand même être porteur et transmettre la maladie ?

La question de la transmission du virus par les personnes vaccinées n'est pas encore tranchée, car ce n'était pas l'objectif des essais cliniques de phase 3. Ceux-ci cherchaient en effet à démontrer la protection induite par le vaccin pour les formes symptomatiques de la maladie. Quelques données sont tout de même encourageantes. Chez Moderna, par exemple, le nombre de patients asymptomatiques était moins élevé (0,1%) dans le groupe vacciné que dans le groupe témoin (0,3%), après deux injections – ces données portent toutefois sur un petit échantillon. Chez AstraZeneca, une demi-dose lors de la première injection protégeait à 58% contre les infections asymptomatiques (pas d'effet avec une dose complète).

Par ailleurs, il est également fortement probable, même en cas d'infection, que la charge virale reste assez faible pour diminuer le risque de transmission. Mais des études complémentaires doivent être menées pour répondre à cette question. "Le vaccin protège des formes graves pulmonaires mais ça ne veut pas dire qu'il protège de la forme nasale ou de la forme oropharyngée", a estimé le ministre de la Santé Olivier Véran, sur BFMTV.

> Pourquoi est-il possible de retarder la seconde injection du vaccin Pfizer (jusqu'à six semaines) ?

La première dose offre déjà une certaine efficacité, mais la seconde est indispensable pour obtenir une réponse neutralisante. Cette décision de retarder la seconde injection vise à libérer davantage de doses pour vacciner un public plus large. Une telle décision est difficile à prendre, et le groupe Pfizer a lui-même rappelé qu'il ne disposait pas de données d'efficacité concernant une seconde dose injectée 21 jours après la première.

Cette modification du protocole peut toutefois être envisagée si le rapport risque/bénéfice est favorable. "On aura peut-être une petite perte d'efficacité, mais elle sera très largement compensée par le nombre de personnes qu'on va pouvoir vacciner", résumé sur franceinfo l'infectiologue Odile Launay, membre du Comité scientifique vaccin Covid-19.

Néanmoins, cette situation peut "favoriser la sélection de mutants capables d'échapper à cette réponse" partielle de la première dose, nuance le biologiste Claude-Alexandre Gustave, interrogé par franceinfo. Soumis à la pression de la première dose, le virus pourrait alors s'adapter afin de déjouer cette immunité partielle et non neutralisante. "Le fait d'allonger le délai entre les deux doses est possible, à condition d'assurer la seconde dose et d'éviter l'exposition au virus entre les deux." Le report de la seconde dose a donc été limité à six semaines maximum.

Mais quoi qu'il arrive, ce délai restera fixé à trois semaines dans les Ehpad, a fait savoir le ministère de la Santé.

> Peut-on se faire administrer la seconde dose avec un vaccin différent de celui utilisé pour la première injection ?

Cette solution n'est pas d'actualité en France. A ce jour, seul le Royaume-Uni a entrouvert la porte (PDF en anglais) au "mix vaccinal", mais un tel recours devra rester exceptionnel. Il sera envisagé uniquement en cas de pénurie ou si le vaccin utilisé lors de la première administration est inconnu du patient et du médecin. Les autorités britanniques justifient leur choix en soulignant les similitudes entre le vaccin à ARN messager de Pfizer et celui à vecteur viral d'AstraZeneca, tous les deux visant à déclencher la production de l'antigène (la protéine S) dans les cellules de la personne vaccinée. Mais à vrai dire, aucune étude n'a encore été menée sur cette approche hybride dans le cadre de l'épidémie de Covid-19.
Développement des vaccins

> Comment expliquer la rapidité d'élaboration du vaccin ?

Les chercheurs ne sont pas partis de zéro dans cette aventure. Ils avaient déjà ciblé un antigène pour les coronavirus, la protéine S, en raison des épidémies passées de Sars-CoV (2003) et de Mers-CoV (2012). Les fabricants de vaccins à ARNm disposaient également de données grâce aux essais menés contre plusieurs maladies. Juste après la publication de la séquence de l'antigène, en janvier 2020, le principe actif du vaccin était déjà prêt car on sait produire des brins d'ARN en laboratoire. Rapide à mettre en œuvre, cette technologie a logiquement pris l'ascendant sur les autres.

Voilà pour le volet recherche. Ensuite, les fabricants ont parfois superposé plusieurs phases des essais cliniques (1, 2 et 3), afin de gagner du temps. Enfin, les différentes autorités nationales et supranationales ont commencé à étudier les données des essais sans attendre un dossier complet, dans le cadre de procédures de "révision en continu" (ou rolling review). Cette mobilisation a permis de délivrer assez rapidement des autorisations de mise sur le marché "conditionnelles", qui nécessitent encore davantage de données pour être entérinées.

Bien entendu, d'importants investissements publics et privés ont été réalisés pour répondre à l'urgence de la situation. Les laboratoires ont pu rapidement disposer de crédits importants, ce qui a dopé leurs travaux.

> Les recherches sur les vaccins à ARN messager existent-elles vraiment depuis plus de vingt ans ?

En 1989, une société californienne est parvenue à insérer de l'ARN messager dans des nanoparticules de lipide avant de l'introduire dans des cellules, raconte le blog du Monde Réalités médicales. Et l'année suivante, des chercheurs du Wisconsin ont montré qu'un tel protocole permettait bien de guider la synthèse d'une protéine par les cellules. Il aura donc fallu plus de trente ans de travaux pour obtenir ce résultat. Cet "outsider" a surpris de nombreux observateurs, car la technologie avait déjà subi quelques revers dans des projets contre le Zika, la grippe, la rage et le cytomégalovirus, lors d'essais sur plusieurs centaines de participants. Est-ce pour cette raison que la Commission européenne a tardé avant de passer commande auprès de Pfizer et de Moderna ? Peut-être en partie.

> Qu'en est-il des vaccins développés par les laboratoires français et pourquoi tardent-ils ?

Le groupe français Sanofi développe un candidat vaccin à protéine recombinante en partenariat avec le Britannique GSK (pour la partie adjuvant). Les résultats des essais de phase 1/2, dévoilés mi-décembre, étaient positifs pour les adultes entre 18 et 49 ans mais décevants dans les catégories d'âge suivantes (réponse immunitaire induite insuffisante). Thomas Triomphe, vice-président de la branche "vaccins" du groupe, a expliqué que les réactifs utilisés par les chercheurs pour mesurer les volumes d'antigène "n'étaient pas d'une qualité ou d'une pureté suffisantes", dans un entretien au Wall Street Journal (en anglais) cité par Le Monde.

Cette erreur a grandement perturbé les travaux. "Je trouve grave qu'un acteur majeur comme Sanofi ne soit pas plus vigilant vis-à-vis de ses fournisseurs", a réagi auprès du quotidien français le coordinateur adjoint de la CGT-Sanofi, Fabien Mallet. Un nouvel essai doit débuter en février "avec une formulation d'antigène améliorée", explique le groupe. Mais une phase 3 ne pourra pas débuter avant le deuxième trimestre 2021, ce qui relègue une éventuelle commercialisation à la toute fin de l'année, au mieux. Par ailleurs, Sanofi travaille sur un projet de vaccin à ARN, en partenariat avec la start-up américaine Translate Bio. Les essais de phase 1/2 doivent débuter au premier trimestre.

Enfin, l'Institut Pasteur a annoncé lundi 25 janvier qu'il arrêtait le développement de son principal projet de vaccin, car les premiers essais ont montré qu'il était moins efficace qu'espéré. Cette annonce intervient après des résultats intermédiaires d'essais cliniques de phase 1, qui avaient débuté en août dernier.

> Quel est l'intérêt pour Sanofi de sortir un vaccin alors que plus de la majorité des citoyens sera vaccinée ?

Le laboratoire a pris du retard dans la course mondiale au vaccin. Mais le PDG de Sanofi France, Olivier Bogillot, défend tout de même l'intérêt de son vaccin candidat, dans un entretien à La Tribune, car, explique-t-il, "nous avons besoin de plusieurs vaccins et de milliards de doses pour lutter contre la pandémie actuelle". A l'heure actuelle, "nous ne sommes pas encore assez armés pour ne pas donner leur chance à tous les vaccins", ajoute Jean-Daniel Lelièvre, chef de service des maladies infectieuses à l'hôpital Henri-Mondor de Créteil (Val-de-Marne), interrogé à ce propos par Le Monde. "Le sujet [de la vaccination] sera-t-il clos en 2021, ou faudra-t-il se faire vacciner régulièrement comme pour la grippe ?", poursuit la ministre déléguée à l'Industrie, Agnès Pannier-Runacher, dans le même quotidien. "On aura besoin d'un vaccin qui limite la circulation du virus chez les moins de 50 ans pour l'Europe, mais aussi pour les pays en développement."

> C'est pour quand, l'arrivée du vaccin d'AstraZeneca ?

Le Royaume-Uni (ainsi que l'Inde) a déjà approuvé ce vaccin à vecteur viral développé conjointement par AstraZeneca et l'université d'Oxford, mais celui-ci est encore en phase de "révision en continu" au sein de l'Union européenne. Une demande d'autorisation conditionnelle a été déposée mardi 12 janvier et les experts du Comité des médicaments à usage humain (CHMP) doivent donner leur feu vert le 29 janvier. Ils terminent l'analyse des données sur la qualité de ce candidat vaccin.
Effets indésirables éventuels

> Y a-t-il des effets secondaires au vaccin ?

Oui, comme pour tous les vaccins. Mais il faut tout d'abord distinguer les "événements graves", quand un lien causal avec le vaccin n'est pas établi, et les "effets indésirables graves", quand ce lien est avéré. Voici le détail des événements les plus fréquents survenus dans les sept jours après chaque injection, pour les deux vaccins à ARN disponibles sur le marché. Ces tableaux permettent de comparer les signalements du groupe “vaccin” et du groupe “placebo” dans les essais cliniques.

Les événements les plus fréquemment observés avec le vaccin de Pfizer sont des douleurs au niveau de la piqûre (plus de 80%), de la fatigue (plus de 60%), des maux de tête (plus de 50%), des douleurs musculaires et des frissons (plus de 30%). Mais ils sont généralement d'une intensité faible à modérée et disparaissent en un jour ou deux. Leur fréquence diminue légèrement avec l'âge.

Avec le vaccin de Moderna, les principales réactions observées sont une douleur à l'endroit de la piqûre (92%), de la fatigue (70%), un mal de tête (64,7%) ou une douleur musculaire (61,5%). Là encore, ces effets sont d'une intensité faible à modérée, disparaissent rapidement, et leur fréquence diminue un peu avec l'âge.

> A-t-on déjà observé des complications graves ?

Une paralysie faciale temporaire est apparue chez quatre participants du groupe vacciné (aucun dans le groupe placebo) dans les essais de Pfizer, et ces cas sont toujours en cours d'investigation. Chez Moderna, trois cas de paralysie faciale périphérique ont été rapportés dans le groupe vacciné et un cas dans le groupe placebo. Une petite dizaine d'événements indésirables graves ont été recensés.

A la date du 23 décembre, 4 393 "événements graves" (0,2%) avaient été recensés aux Etats-Unis sur 1 893 360 doses administrées, selon les chiffres des Centers for disease control and prevention (CDC). On dénombrait 21 événements de réaction anaphylactique (0,0011%), avec des antécédents dans sept de ces cas. Une diminution temporaire de certaines cellules immunitaires (lymphocytes) a été observée dans un seul cas, un événement qualifié de "non grave".

Le ministère de la Santé a annoncé mardi 19 janvier que cinq personnes sont mortes après avoir été vaccinées, sans que le lien entre le vaccin et le décès puisse être formellement établi. Il s'agit de personnes âgées de plus de 75 ans et qui souffraient de comorbidités, selon le ministère de la santé.

Au total, 139 remontées d'effets indésirables graves ou inattendus ont été recensés en France depuis le début de la campagne de vaccination. Les centres régionaux de pharmaco-vigilance font partie des établissements chargés de surveiller et signaler les effets indésirables des médicaments et des produits de santé.

A la suite de la survenue de cas de paralysies faciales dans d'autres pays avec ce vaccin, une expertise a été demandée à un centre de pharmacovigilance. L'analyse de ces cas confirme que ces troubles surviennent de façon extrêmement rare avec une incidence qui ne dépasse pas celle observée chaque année en période hivernale dans la population générale, note l'agence sanitaire.

> Comment le suivi des injections est-il mis en place ?

Les médecins et pharmaciens sont soumis à l'obligation de déclarer tout effet indésirable suspecté d'être dû à un médicament. Les patients peuvent également signaler d'éventuels événements indésirables sur la plateforme nationale dédiée, à travers un téléservice utilisé lors de la vaccination ou sur le portail des signalements, disponible à cette adresse. En parallèle, des études de pharmaco-épidémiologie seront menées par plusieurs instances, dont Epi-phare, sur les personnes vaccinées et sur des groupes spécifiques pour identifier d'éventuels événements indésirables graves. Enfin, l'Inserm va suivre des cohortes dans la population.

Le premier rapport hebdomadaire sur l'ensemble des cas rapportés en France a été publié au cours de la semaine du 18 janvier. Un rapport sera ensuite publié toutes les semaines.

> Le vaccin à ARN messager modifie-t-il mon ADN ?

Non, les vaccins à ARN messager ne peuvent pas modifier le génome humain. Grâce à leur capsule graisseuse (couronne brune), ces brins (en bleu) entrent dans le cytoplasme (en jaune) des cellules et leur code est déchiffré par les ribosomes (en orange et violet), permettant la synthèse de l'antigène (protéine S). Mais le "matériel génétique de la personne vaccinée, qui se trouve dans le noyau de la cellule, ne va pas interagir avec l'ARN du vaccin", explique à franceinfo Etienne Simon-Lorière, responsable de l'unité de génomique évolutive des virus à ARN à l'Institut Pasteur. Ces brins sont ensuite dégradés, toujours dans le cytoplasme de la cellule. Ils y côtoient d'ailleurs de nombreux autres ARN d'origine étrangère à l'organisme, sans que cela nous émeuve.

Cet ARN messager est un peu comme la photocopie d'une page de livre (ADN), dont il est tout à fait incapable de réécrire les chapitres. En réalité, seuls les rétrovirus, comme le VIH, ont la capacité d'opérer une "rétro-transcription" de l'ARN à l'ADN, afin d'intégrer le noyau des cellules-hôtes. Les séquences ARN utilisées dans les vaccins de Pfizer et de Moderna ne contiennent pas l'enzyme (transcriptase inverse) permettant de rebrousser le chemin vers l'ADN, ni celle (intégrase) permettant d'intégrer le génome – le coronavirus "sauvage" entier non plus.

> Est-il possible que le vaccin contre le Covid-19 entraîne une infertilité chez les femmes ?

Non. Les anticorps induits par la vaccination ne peuvent pas être dirigés contre des protéines humaines, et donc contre la syncytine, nécessaire à la fabrication du placenta. Mi-novembre, 12 grossesses avaient été recensées dans le groupe vaccin de l'essai clinique de phase 3 de Pfizer (11 dans le groupe placebo). Des études complémentaires doivent être menées.

> Les vaccins de Pfizer et de Moderna intègrent-il des adjuvants ?

Le principe actif des vaccins de Pfizer et de Moderna est l'ARN. En raison du mode d'action, aucun produit n'est ajouté pour stimuler et améliorer la réponse immunitaire. Contrairement aux vaccins inactivés et à protéine recombinante, les vaccins à ARN n'ont donc pas besoin d'adjuvant.

Les différents composés nécessaires au vaccin sont disponibles sur le site (PDF, en anglais) de l'Agence européenne des médicaments. On retrouve tout d'abord les quatre composants des petites particules grasses qui encapsulent l'ARN, lui permettant d'entrer dans les cellules (lipide SM-102, cholestérol, lipide DSPC et lipide PEG2000 DMG). Figurent également dans la liste des sels et une solution tampon, qui permet de maintenir le PH (trométamol et hydrochloride de trométamol, acide acétique et acétate de sodium trihydratée). On trouve également du sucrose, pour la viscosité, et de l'eau stérile.

La liste des composants du vaccin de Pfizer et BioNTech est disponible à cette adresse (PDF, en anglais), avec là encore des composants pour les nanoparticules (lipide ALC-0315, lipide ALC-0159, lipide DSPC et cholestérol), des sels et une solution tampon (chlorure de potassium, phosphate de monopotassium, chlorure de sodium et phosphate disodique déshydraté), du sucrose et de l'eau stérile.

> Les vaccins sont-ils des remèdes de type thérapie génique ?

Non, ils ne relèvent en aucun cas des thérapies géniques. Cette expression désigne des techniques prometteuses permettant de réparer le gène d'un patient. Le pôle de recherche financé par le Téléthon, par exemple, a récemment obtenu le feu vert pour un essai clinique sur la myopathie de Duchenne, une maladie dégénérative des muscles. Le principe est d'acheminer la séquence ADN du gène en question dans le noyau des cellules, grâce à un vecteur viral adapté en conséquence. Comme évoqué plus haut, l'ARN des vaccins de Pfizer et de Moderna a pour principe de guider la production d'une protéine S au niveau des ribosomes, dans le cytoplasme. Il n'entre pas dans le noyau, ne côtoie pas les chromosomes et ne peut pas interagir avec eux.
Publics concernés

> Est-ce utile de se faire vacciner si on a déjà eu le Covid-19 ?

A ce jour, il n'y a pas de données permettant d'évaluer l'éventuel bénéfice de se faire vacciner après avoir été infecté, explique la HAS. Ce public n'est donc pas prioritaire. "Théoriquement, une personne qui a déjà rencontré le virus est protégée, expliquait Bruno Megarbane, chef du service de réanimation médicale à l'hôpital Lariboisière (AP-HP) à Paris, sur France 2. Il n'y a donc pas urgence à les vacciner". Si l'intérêt semble a priori limité, un ancien malade pourra tout de même bénéficier du vaccin après un échange avec son médecin, car "le risque même théorique chez ces personnes apparaît (...) très faible", précise encore la Spilf.

Le cas échéant, il faudra tout de même respecter un délai minimal de trois mois après le début des symptômes et ne pas présenter de symptômes persistants. Les personnes ayant été en contact avec une personne malade devront d'abord se faire tester avant d'envisager une vaccination.

> Pourquoi les personnes âgées sont-elles vaccinées en premier ?

Les premiers vaccins viennent juste d'être autorisés et les doses sont disponibles en nombre limité. Il faut donc faire des choix. Le gouvernement veut tout d'abord désengorger les hôpitaux. Il met donc l'accent sur les publics les plus vulnérables au virus et les plus susceptibles de développer des formes graves de la maladie. "Cette stratégie est celle qui permet la plus grande réduction des formes sévères et des décès", faisait valoir la Haute Autorité de santé (HAS) fin décembre, un mois après avoir recommandé de cibler en priorité?les résidents des Ehpad et autres hébergements collectifs. Ces derniers représentent en effet les premières victimes de la maladie depuis le début de l'épidémie.

Plusieurs observateurs, toutefois, ont fait remarquer que les données cliniques étaient encore incomplètes, voire inexistantes, pour les catégories d'âges les plus hautes. En réalité, des personnes âgées ont bien pris part aux essais cliniques menés par les fabricants – 4,3% des participants à l'essai de Moderna étaient âgés de plus de 75 ans, souligne LCI. Malgré tout, la HAS recommande de mener "des études complémentaires" dans la sous-catégorie des plus de 75 ans, afin de "confirmer les résultats rassurants de sécurité et d'efficacité du vaccin chez les plus âgés". La campagne a pu débuter car la balance bénéfice-risque est jugée positive.

"On peut vacciner les plus jeunes, mais si ça se trouve ils sont toujours aussi transmetteurs, donc ça ne sert à rien, a résumé sur franceinfo Dominique Le Guludec, présidente de la HAS. ll faut vacciner ceux qui sont la cible, ceux à qui ils peuvent le donner et qui ont un risque de forme sévère."

> Parmi les personnels de santé qui peuvent déjà se faire vacciner, les techniciens de laboratoire et les secrétaires médicales sont-ils inclus ?

Depuis le 5 janvier, les professionnels de santé âgés de 50 ans ou plus, ainsi que ceux présentant des risques de développer une forme grave de la maladie, peuvent se faire vacciner. Cela comprend les secrétaires médicales, les techniciens de laboratoire, les préparateurs en pharmacie, les ambulanciers, les manipulateurs radio et les pompiers. Il faut présenter un document justifiant de sa profession et de son âge, et le cas échéant, pour établir le risque ouvrant l'accès au vaccin (par exemple une ordonnance).

> Sait-on quand le gouvernement a prévu d'ouvrir la vaccination aux personnes souffrant de pathologies dites "à risque", comme le diabète par exemple ?

De nouveaux publics, en effet, ont été déclarés prioritaires et pourront donc bénéficier du vaccin dès lundi 18 janvier. Le ministre Olivier Véran a dévoilé jeudi soir la liste suivante, sur avis de la HAS et d'Alain Fischer, président du conseil d'orientation de la stratégie vaccinale : insuffisance rénale chronique sévère, cancer sous traitement, transplantés d'organe et personnes atteintes de trisomie. Ces personnes devront obtenir une ordonnance de leur médecin traitant. Cela concerne 800 000 personnes atteintes de maladies graves qui les rendent vulnérables à des formes graves du Covid-19. En revanche, le diabète n'a pas été mentionné par le ministre.

> Le vaccin contre le Covid-19 est injecté en intramusculaire. Quel est le protocole pour les personnes sous anticoagulants ?

La vaccination n'est pas contre-indiquée chez les patients sous anticoagulants, à condition de prendre les précautions nécessaires. La Haute Autorité de santé en détaille quelques-unes : injection dans le muscle deltoïde, aiguille de petit calibre, pression ferme sur le point d'injection sans massage ni frottement (pendant deux minutes au moins…). Par ailleurs, le patient doit être informé du risque d'hématome avant de bénéficier du vaccin.

> Pour les personnes séropositives, est-il important de se faire vacciner ?

Les personnes qui vivent avec le virus du VIH n'ont pas été exclues des études mais les données de ce groupe n'ont pas été incluses dans l'analyse de l'efficacité du vaccin de Moderna, par exemple. La Haute Autorité de santé recommande tout de même de leur proposer la vaccination, "quel que soit le nombre de CD4" (une protéine de surface dont le nombre détermine l'état immunitaire du patient). En Allemagne, les personnes qui vivent avec le virus du VIH sont intégrées dans le troisième groupe des personnes prioritaires. Au Royaume-Uni, elles figurent dans le sixième des neuf groupes prioritaires. En France, cette population ne fait pas l'objet d'une mesure de priorité.

> J'ai des maladies auto-immunes. Le vaccin est-il conseillé ?

Les personnes ayant un traitement immunosuppresseur et les personnes immunodéprimées (hors VIH) ont été exclues des études cliniques, rappelle la HAS (PDF). Mais la vaccination est tout de même recommandée dans ces situations, car ces populations font partie des personnes à risque de forme grave. Il convient d'en parler avec son médecin.

> Mon fils de 10 ans peut-il se faire vacciner ?

Ce n'est pas d'actualité. "Nous avons raisonné par ordre de priorité, et clairement les catégories jeunes ne font pas partie des plus à risque",expliquait début décembre au Parisien Daniel Floret, vice-président de la commission technique des vaccinations de la HAS. Mais surtout, les fabricants doivent d'abord obtenir une autorisation de mise sur le marché pour cette catégorie d'âge, qui n'a pas participé aux essais cliniques menés jusqu'ici. Pour le moment, Pfizer ne dispose d'une AMM que pour les personnes âgées d'au moins 16 ans et Moderna pour les personnes âgées d'au moins 18 ans. Le premier a débuté un essai en octobre avec des participants âgés entre 12 et 15 ans. Le second n'a pas encore débuté le recrutement pour un essai sur 3 000 volontaires de 12 à 17 ans.
Contre-indications

> La vaccination est-elle compatible avec la grossesse et l'allaitement ?

Lors des essais pré-cliniques menés par Pfizer et Moderna sur les animaux, il n'y a pas eu d'effets secondaires sur la fertilité, la grossesse ou le développement du fœtus. A ce stade, ce type d'étude spécifique n'a pas été mené chez les femmes enceintes, mais aucun événement indésirable n'a été signalé chez celles qui ont participé aux essais cliniques. Par simple mesure de précaution, des études spécifiques sont prévues et les femmes enceintes sont pour le moment exclues des campagnes de vaccination.

L'administration du vaccin ne sera envisagée que lorsque le bénéfice attendu sera supérieur au risque éventuel, ajoute l'Agence européenne des médicaments. Les autorités britanniques recommandent (PDF en anglais) par exemple aux femmes enceintes ou qui allaitent de solliciter l'avis d'un médecin ou d'un pharmacien avant de se faire vacciner. "Par mesure de précaution, vous devriez éviter de tomber enceinte au moins deux mois après le vaccin", est-il également mentionné. Par ailleurs, il n'existe pas encore de données sur une éventuelle excrétion de vaccin dans le lait maternel.

> Peut-on consommer de l'alcool une fois vacciné contre le Covid-19 ?

Cette question a notamment fait l'objet d'un débat en Russie, début décembre, après des consignes gouvernementales prônant deux semaines d'abstinence avant la première injection et trois semaines après la seconde, soit deux mois au total en comptant l'intervalle. "Si vous voulez être forts et avoir une réponse immunitaire forte, ne buvez pas d’alcool", a notamment déclaré la responsable de l'agence sanitaire russe. En France, le Haut Conseil de la santé publique avait d'ailleurs classé la surconsommation d'alcool parmi les facteurs pouvant expliquer une non-réponse au vaccin contre l'hépatite B.

Cette durée de deux mois semble toutefois exagérée et ne repose sur aucune donnée scientifique. Interrogé à ce propos par New Scientist (en anglais), le responsable du centre Gamaleïa de Moscou a simplement évoqué la nécessité d'adopter un comportement responsable, comme pour tous les vaccins, afin de laisser le corps former une réponse immunitaire dans de bonnes conditions – au moins pendant trois jours avant et après. Les fabricants Pfizer et Moderna n'ont émis aucun avertissement sur ce point, qui reste mal documenté scientifiquement.

> Je me fais vacciner contre le tétanos, pourrai-je ensuite me faire vacciner contre le Covid-19 ?

Oui, mais la Haute Autorité de santé préconise (PDF) tout de même un intervalle minimum de 14 jours entre un vaccin contre le Covid-19 et un autre vaccin, en l'absence de données sur une administration concomitante. Il est également conseillé "de ne pas faire un autre vaccin dans l'intervalle entre les deux doses de l'un ou l'autre des vaccins", précise l'HAS. Enfin, si le vaccin contre le Covid-19 est administré par inadvertance dans les 14 jours suivant l'administration d'un autre vaccin, il n'est pas nécessaire d'administrer une dose supplémentaire pour l'un ou l'autre de ces vaccins.
Organisation de la campagne vaccinale

> Les CPAM vont-elles adresser un courrier, comme pour le vaccin de la grippe, aux personnes dites prioritaires ?

Un courrier d'invitation sera prochainement envoyé par l'Assurance-maladie aux personnes âgées de 75 ans et plus, département par département, afin de les informer sur le centre de vaccination le plus proche de chez elles. Ces lettres seront envoyées progressivement, afin d'éviter une saturation des centres.

> Faut-il passer un test avant de se faire vacciner ?

Cela ne semble pas utile, sauf si vous avez été en contact avec une personne malade. Si vous avez eu le Covid-19, il suffit, comme expliqué plus haut, d'attendre trois mois après le début des symptômes, voire de prendre conseil auprès de votre médecin. Par ailleurs, la HAS ne recommande pas la réalisation d'une sérologie pour appuyer la décision de vaccination, car celle-ci "ne permet pas d'attester d'une immunité face au virus". Il est encore difficile, à l'heure actuelle, de définir "le marqueur immunologique de protection contre le SARS-Cov-2", détaille la Haute Autorité de santé.

> Pourra-t-on choisir le vaccin qui nous sera administré ?

Négatif. "Aujourd'hui, nous avons deux vaccins validés, deux vaccins à ARN messager avec la même efficacité [et] les mêmes indications", a déclaré le ministre de la Santé Olivier Véran sur BMFTV, le 7 janvier. "Il n'y a pas lieu de poser la question du choix", a-t-il ajouté. "Si les indications sont les mêmes que pour les deux premiers, vous serez vaccinés par l'un ou par l'autre. On ne va pas commencer avec : 'Moi je préfère un vaccin à virus atténué, moi un vaccin à ARN...' On ne ne s'en sortirait pas." Voilà qui a le mérite d'être clair.

> Il était question de pouvoir manifester son intention de se faire vacciner, par exemple sur l'appli TousAntiCovid. Qu'en est-il ?

Le ministre de la Santé Olivier Véran, en effet, avait annoncé sur RTL que les Français souhaitant avoir accès au vaccin pourraient bientôt s'inscrire sur internet, par téléphone ou sur l'application TousAntiCovid. Ce dispositif a été lancé le jeudi 14 janvier, mais à l'attention des publics concernés, à savoir les personnes âgées de plus de 75 ans. Un numéro national a été mis en place (0800 009 110), le site sante.fr a été actualisé et il est également possible de contacter directement l'un des centres de vaccination disponibles. A ce jour, en revanche, aucun calendrier de pré-inscription n'a été communiqué pour l'ensemble de la population.

> Pourquoi le ministre de la Santé français ne se fait-il pas vacciner devant les caméras ?

C'est un choix de communication politique. Faut-il donner l'exemple à ses compatriotes et lancer le mouvement, comme le président élu américain Joe Biden ou le Premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou ? Ou s'en tenir à la stratégie vaccinale adoptée, par souci de cohérence ? Le gouvernement français a choisi la seconde option. "Je n'aurai aucune difficulté à me faire vacciner, je peux même vous dire mon impatience à pouvoir être protégé par le vaccin, a déclaré fin décembre le ministre de la Santé, interrogé à ce propos sur France 2. [Mais] je suis à faible risque de forme grave, étant âgé de 40 ans, donc je laisse la place à celles et ceux qui doivent en bénéficier en priorité."

Et Olivier Véran de poursuivre : "Si je me faisais vacciner devant les caméras, les plus réfractaires d'entre nous diraient que ce n'est pas le vaccin qu'on m'a inoculé. D'autres diraient que j'ai pris la place d'une personne fragile." Il a de nouveau défendu cette position, lors d'une récente audition à l'Assemblée nationale. Depuis plusieurs jours, de très nombreux professionnels de santé publient des images de leur vaccination sur les réseaux sociaux, mais ils font partie des publics concernés par la campagne.

> Des "vaccinodromes" vont-ils être mis en place en France, comme en Allemagne ?

Cette question a fait l'objet d'un débat parfois animé entre des professionnels hospitaliers, plutôt favorables à cette option, et des médecins généralistes, qui y sont plutôt opposés. En Allemagne, certains "vaccinodromes" peuvent accueillir jusqu'à 5 000 personnes par jour, dans des espaces publics aménagés pour l'occasion. De son côté, la France privilégie la mise en route, d'ici à la fin janvier, de 600 centres médicaux – la liste est en train d'être dressée. Ils viendront en appui des hôpitaux et accompagneront le déploiement de la stratégie vaccinale, en accueillant d'abord les personnes âgées d'au moins 75 ans, en dehors des Ehpad.

La campagne devrait être ouverte à tous les Français, sans restriction, vers la fin du printemps. Le gouvernement semble privilégier une vaccination de proximité. Début décembre, le Premier ministre, Jean Castex, avait souhaité que le médecin traitant "soit au cœur du dispositif". A la fin du mois, Olivier Véran avait fait référence au précédent de la grippe H1N1, en 2009, et déclaré qu'on avait déjà "essayé [les 'vaccinodromes'] en France" et que "ça n'avait pas marché". Par ailleurs, la ministre du Travail, Elisabeth Borne, a estimé sur franceinfo que les entreprises pourraient "jouer un rôle" lors de l'ouverture de la vaccination au plus grand nombre.

> Pourquoi n'utilise-t-on pas les pharmacies comme relais pour la vaccination ?

Cette question n'a pas encore été évoquée par les autorités sanitaires. Il est vrai que les pharmaciens peuvent réaliser certaines vaccinations depuis l'an passé. Cet automne et cet hiver, ils ont vacciné 3,6 millions de personnes contre la grippe saisonnière, selon l'Union des syndicats de pharmaciens d'officine (USPO). Interrogé dans Le Figaro, son président Gilles Bonnefond réclame donc que les pharmaciens aient l'autorisation de participer à la campagne contre le Covid-19. "Les statistiques montrent que 40 heures de vaccination seraient nécessaires à chaque médecin, à raison de cinq vaccins par minute, abonde sur franceinfo Michaël Rochoy, médecin généraliste à Outreau (Pas-de-Calais) et membre du collectif Du côté de la science. Il faut déléguer la tâche aux pharmaciens."

Ce recours aux pharmacies, toutefois, semble plus aisé à mettre en route avec le vaccin développé par AstraZeneca, pour des raisons logistiques liées à la conservation des vaccins à ARNm.
Vie sociale et voyages

> Si nous nous faisons vacciner, allons-nous avoir un "passeport vaccinal" ?

Dominique Le Guludec, présidente de la Haute Autorité de santé, a affirmé sur franceinfo que ce n'était pas à l'ordre du jour : "Nous ne nous sommes pas penchés sur cette question parce que, tout bêtement, on ne sait pas si ce vaccin bloque la transmission, ça n'a donc pas de sens." Et même en cas de données convaincantes sur le blocage de la transmission, cette question restera débattue.

Après des protestations, le gouvernement a déjà remballé fin décembre un projet de loi sur les urgences sanitaires, qui prévoyait la possibilité future de "subordonner" certains déplacements et activités à la présentation d'un test négatif, d'un vaccin ou d'un traitement. Une telle mesure pourrait être "conforme aux droits fondamentaux, mais à certaines conditions assez exigeantes", explique à franceinfo Serge Slama, professeur de droit public à l'université de Grenoble-Alpes.

Le gouvernement a toujours répété que le vaccin ne serait pas obligatoire, mais un éventuel "passeport" vaccinal pourrait changer la donne. Par ailleurs, il faudrait d'abord rendre ce vaccin accessible à tous, prévoir des dérogations pour ceux qui ont des contre-indications médicales et préciser le champ d'application d'un tel sésame. Il faudrait également préciser la manière dont les contrôles seront réalisés, et quelle preuve utiliser (carnet de vaccination, application...). La question des données médicales est sensible.

> Une personne vaccinée contre le Covid-19 aura-t-elle toujours besoin de porter un masque ?

Oui. Au bénéfice du doute, une personne vaccinée devra continuer à porter le masque et à respecter les gestes barrières. Les chercheurs tentent de savoir si les anticorps induits par le vaccin ont la capacité de se projeter rapidement dans les muqueuses nasales, avant que le virus n'ait le temps de s'y répliquer et d'être transmis par voie aéroportée à un autre individu. Certains laboratoires planchent d'ailleurs sur des vaccins nasaux, qui permettraient de monter la garde très tôt en cas d'infection.

> Devra-t-on se faire vacciner tous les ans ?

Ce n'est pas exclu. "Il est possible que la Covid-19 devienne une maladie à recrudescence saisonnière comme la grippe, explique la Société de pathologie infectieuse de langue française (Spilf), ce qui pourrait justifier l'obtention d'une immunité à long terme". Il faudra donc surveiller deux paramètres : la durée de l'immunité induite par le vaccin, mais aussi l'évolution du virus. Si l'organisme n'est plus capable de reconnaître d'éventuels variants, il faudra alors adapter le vaccin en conséquence.

> Le vaccin sera-t-il imposé plus tard pour les voyages internationaux ?

Le ministre des Transports, Jean-Baptiste Djebbari, a répondu "plutôt non" à cette question, lundi sur LCI. Mais l'Association du transport aérien international élabore depuis l'an passé un "travel pass" ("passeport pour voyager") utilisable sur smartphone. Celui-ci permettrait de prouver sa vaccination aux compagnies aériennes et aux douanes. "Je ne pense pas qu'une compagnie aérienne, de son propre chef, ait la compétence juridique pour imposer ça à des passagers sans que ça ait été avalisé par des autorités administratives", rappelait toutefois Guy-Pierre Caron, avocat au barreau de Paris, sur France 2. A ce jour, aucun pays n'a introduit l'obligation de présenter un document prouvant sa vaccination. Enfin, le comité d'urgence de l'OMS s'est exprimé contre un certificat de vaccination nécessaire aux voyages internationaux.

DU CFA A L'ECO : UN AN APRES ?

LE FRANC CFA TOUJOURS BIEN VIVANT, UN AN APRÈS L'ANNONCE DE SA DISPARITION

"Cette réforme Macron-Ouattara est un coup de bluff", déplore l'économiste Ndongo Samba Sylla. Selon plusieurs observateurs, la Côte d'Ivoire, principale économie de la zone avec le Sénégal, n'est pas particulièrement pressée de faire bouger les choses

AFP  |   Publication 25/12/2020

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2020 devait voir naître l'eco, une monnaie commune pour remplacer le franc CFA en Afrique de l'Ouest, après 75 ans d'existence. Mais sur les marchés d'Abidjan ou de Lomé, les vieux billets continuent de s'échanger.

Un an après l'annonce en grande pompe par les présidents français et ivoirien Emmanuel Macron et Alassane Ouattara de la fin d'un des derniers vestiges de la "Françafrique", le traité est en train d'être ratifié par les parlementaires français.

Mais de nombreuses questions concrètes restent encore en suspens.

Eco/Franc CFA : quels changements ?

Outre le changement symbolique du nom de la devise, l'avènement de l'eco va modifier deux choses.

D'abord, la France va cesser de participer aux instances de gouvernance de l'Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA).

Ensuite, la Banque centrale des Etats d'Afrique de l'Ouest (BCEAO) ne devra plus déposer la moitié de ses réserves de change auprès de la Banque de France, obligation qui était perçue comme une dépendance humiliante vis-à-vis de la France par les détracteurs du franc CFA.

"Ce sont deux questions particulièrement symboliques qui cristallisaient la quasi-intégralité des critiques adressées au franc CFA", assure à l'AFP une source à l'Elysée.

Une chose ne change pas en revanche: l'indexation de la devise sur le cours de l'euro qui apporte une stabilité aux économies des pays de la zone mais les rend également dépendants de la politique monétaire de la Banque centrale européenne.

"Cette réforme Macron-Ouattara est un coup de bluff. Le cadre de la politique monétaire demeure inchangé, elle a juste porté sur les symboles qui fâchent comme le nom", déplore Ndongo Samba Sylla, économiste à la Fondation Rosa Luxembourg à Dakar.

"La question de la parité a été méticuleusement discutée en amont de l'annonce de la réforme et la réponse de nos interlocuteurs africains (…) était qu'il était souhaitable de maintenir cette parité, essentiellement pour des questions d'attractivité", répond une source à l'Elysée, reconnaissant un débat "légitime".

Une autre union monétaire en Afrique centrale, distincte de l'UEMOA, utilise également le franc CFA et n'est pour l'instant pas concernée par la réforme.

Une monnaie commune... avec qui ?

L'annonce de la nouvelle monnaie commune concerne les pays de l'UEMOA qui utilisaient le franc CFA : Bénin, Burkina Faso, Côte d'Ivoire, Guinée-Bissau, Mali, Niger, Sénégal et Togo.

Mais l'idée d'un eco plus large est régulièrement évoquée, en y intégrant d'autres pays comme le Ghana et surtout le Nigeria, poids lourd économique du continent qui pèse 70% du PIB de la sous-région.

A maintes reprises, la ministre des Finances, Zainab Shamsuna Ahmed, a toutefois répété que les pays ouest-africains n'étaient pas prêts à une quelconque union monétaire, tant qu'ils ne respecteraient pas les critères de convergence : un déficit budgétaire n'excédant pas 3%, une inflation à moins de 10% et une dette inférieure à 70% du PIB.

"La question derrière tout ça c'est de savoir quel est le degré de solidarité auquel sont prêts les pays africains entre eux ? C'est un débat difficile avec beaucoup de non-dits", analyse l'économiste togolais Kako Nubukpo.

Que manque t-il pour lancer l'eco ?

"L'eco n'existe pas encore. Aujourd'hui, nous sommes toujours avec le franc CFA. On a l'impression de tourner en rond", déplore M. Nubukpo qui prépare un rapport sur les modalités de transition entre les deux monnaies.

Le Covid a obligé les Etats à revoir leurs priorités mais l'épidémie n'est pas la seule raison qui explique cette mise en oeuvre poussive.

"Ce qui bloque, c'est un problème purement politique : il y a des dissensions entre les dirigeants d'Afrique francophone", estime l'économiste franco-ivoirien Youssouf Carrius.

Selon plusieurs observateurs, la Côte d'Ivoire, principale économie de la zone avec le Sénégal, n'est pas particulièrement pressée de faire bouger les choses.

Plusieurs fois, le président Alassane Ouattara a défendu le franc CFA, "une monnaie solide", dont la parité avec l'euro, assure une stabilité économique.

Payer en franc CFA, jusqu'à quand ?

L'arrêt du franc CFA suppose avant tout l'impression de nouveaux billets de banque.

Pour l'heure, ils sont toujours imprimés à Chamalières, dans le centre de la France, dans une imprimerie de la Banque de France.

Aucune date n'a pour l'instant été dévoilée pour changer les billets.

"C'est un calendrier africain. Il y aura cette question-là dans les sujets qui seront débattus au prochain sommet Afrique-France en juillet 2021", assure l'Elysée.

Un avis que partage Lambert N'Galadjo Bamba, conseiller au ministère de l'Economie et des Finances ivoirien : "Nous avons dû réactualiser la feuille de route en raison de la crise du coronavirus et nous donner plus de temps pour travailler sur la convergence. Tous ces processus demandent du temps, il faut compter quelques années encore" avant le lancement effectif de l'eco.

"Les Européens ont mis près de 30 ans pour avoir leur euro", rappelle l'économiste Ndongo Samba Sylla.

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LA FRANCE DOIT SORTIR TOTALEMENT DE NOS AFFAIRES MONETAIRES

Les décisions concernant notre avenir monétaire collectif ne doivent plus venir de Paris. Il est grand temps de soumettre à la sanction des peuples africains de vraies réformes du système monétaire actuel - FRONT POUR L'ABOLITION DU FCFA EN AFRIQUE

Publication 21/12/2020

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SenePlus publie ci-dessous, la déclaration datée du 21 décembre, du Front pour l’Abolition du franc CFA en Afrique, décriant la réforme de la monnaie ouest-africaine initiée notamment par le président français Emmanuel Macron.

« Aujourd’hui, 21 décembre 2020, cela fait un an que la France a entamé la réforme du franc CFA qu’elle a créé il y a 75 ans de cela, à une époque où aucun de nos Etats actuels n’existait.

Ce résultat est le fruit de la mobilisation anti-impérialiste de toutes celles et tous ceux qui se sont battus pendant des décennies pour l’abolition de la monnaie coloniale et qui ont donc contraint la France et ses affidés à annoncer précipitamment la « fin du Franc CFA » à l’occasion d’une visite du président français Macron à la base militaire du 43ème BIMA de Port-Bouet, près d’Abidjan l’an passé.

Mais, cette prétendue fin se résume en réalité à un changement de dénomination de la monnaie Franc CFA en ECO, la fin de la centralisation des réserves de change des Etats de l’Uemoa auprès du Trésor français, le « départ » du représentant de la France du conseil d’administration de la BCEAO.

Les changements annoncés en grande pompe par les présidents Macron et Ouattara n’étant que des modifications cosmétiques, c’est-à-dire de pure façade, après avoir fait l’objet d’une procédure d’approbation gouvernementale, puis parlementaire en France même, n’ont donné lieu à aucune réaction du côté des gouvernements et parlements africains concernés. Mieux ou pire, la création de cet ECO-Macron qui devait entrer en vigueur le 1er juillet 2020 n’est pas suivie d’effet à ce jour.

Cinq éléments au moins font que nous disons que la France et les présidents qui lui sont soumis ne cherchent qu’à duper la rue africaine en gommant du franc CFA ses éléments néocoloniaux visibles à l’œil nu afin de désamorcer la bombe souverainiste.

1- Le processus antidémocratique, antipopulaire excluant donc les peuples, les sociétés civiles, les patronats, les parlements africains…Processus initié par la France dans le but de ne laisser aucune marge de manœuvre à ses pantins africains ;

2-        L’accord monétaire avec la France a été renouvelé. Alors que nous exigeons la fin de l’occupation monétaire française. Nous demandons que la France sorte de nos affaires monétaires par la fin de l’accord entre nos pays et la France ;

3-        Le maintien de la parité fixe entre cet ECO-Macron et l’Euro qui est en réalité une préférence commerciale accordée à l’UE en général et à la France en particulier ;

4-        Ce maintien de la parité fixe entre l’ECO-Macron et l’Euro vise aussi à éliminer le risque de change pour les investisseurs en général européens et français en particulier ;

5-        Le choix par la France et ses valets de la dénomination ECO, qui a été volée à la CEDEAO, révèle une intention française : torpiller le projet de la monnaie CEDEAO afin d’étendre le franc CFA à d’autres pays africains avec une nouvelle dénomination ECO ;

Les décisions concernant notre avenir monétaire collectif ne doivent plus nous venir de Paris et il est grand temps de soumettre à la sanction des parlements et des peuples africains de vraies réformes du système monétaire actuel, en excluant la France de toute mainmise sur celui-ci. La France doit cesser d’être ce trait d’union entre nos pays, véritable frein au développement. La France doit sortir totalement, complètement de nos affaires monétaires.

C’est pourquoi nous :

-          dénonçons cette parodie de mise à mort du Franc CFA néocolonial et exigeons la fin de l’accord de coopération monétaire entre la France et nos pays ;

-          invitons toutes les africains, toutes les organisations progressistes à se mobiliser contre la présence monétaire française en Afrique et à faire barrage en Afrique et dans la diaspora à cette nouvelle tromperie monétaire ;

-          exigeons l’organisation de débats nationaux et de référendums nationaux sur la monnaie ;

-          saluons l’attitude progressiste et internationaliste de démocrates français qui contribuent à éventer ce complot impérialiste et invitons à la jonction de toutes nos forces pour la souveraineté monétaire de l’Afrique

Nous lançons un appel aux gouvernements, parlements africains concernés, en Afrique de l’ouest et du centre, ainsi que les organisations de la société civile, les syndicats et organisations patronales, les partis et mouvements politiques dans toute la zone monétaire du franc CFA à ouvrir un débat démocratique sur la question de la souveraineté monétaire de l’Afrique. Ces débats doivent aboutir à un referendum qui permettrait aux Africains de choisir directement soit de continuer à servir les intérêts de la France impériale, soit de prendre la voie de la souveraineté monétaire et donc de l’indépendance véritable, à l’image de nombreuses anciennes colonies françaises d’Asie, du Maghreb et d’Afrique noire.

Nous estimons qu’il s’agirait là de la procédure la plus démocratique pour la construction d’une sous-région ouest et/ou centre-africaine pleinement souveraines et maîtresses de leurs destinées, tant en matière de politique économique et financière que de stratégie de reconstruction autonome et de développement endogène. Il est à la fois inacceptable et humiliant de voir un pays non-africain continuer de prendre des décisions concernant notre monnaie et son fonctionnement. Les gouvernements et parlements africains, nous peuples africains concernés sommes donc à la croisée des chemins et devons enfin prendre nos responsabilités pour mettre fin à l’occupation monétaire française. »

 

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L'ÉCO, ENCORE UNE MONNAIE COLONIALE

Entretien avec Ndongo Samba Sylla, économiste et Martial Ze Belinga, économiste et sociologue animé par Chrystel Le Moing

Publication 15/06/2020

     https://youtu.be/6TXNA68x2VU

Entretien avec Ndongo Samba Sylla, économiste et Martial Ze Belinga, économiste et sociologue animé par Chrystel Le Moing. Cette émission est produite par le secteur international du Parti communiste français avec la fondation Gabriel Péri.

 

 

LE TALK DE MARIE-ROGER BILOA ET OUSSEYNOU NAR GUEYE

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L'ECO, LA NOUVELLE MONNAIE COLONIALE FRANÇAISE

EXCLUSIF SENEPLUS : La pression des nouvelles générations africaines aura-t-elle été décisive pour couper le cordon ombilical ? La monnaie de remplacement du franc CFA est-elle vraiment l’alternative attendue ?

Marie-Roger Biloa et Ousseynou Nar Gueye  |   Publication 13/06/2020

     https://youtu.be/BEa4crRcRU4

Dans ce numéro de ‘‘C’est dit, c’est à faire'', Marie- Roger Biloa reçoit Souleymane Ndao, professeur en économie et finances aux universités de Dakar et de Ouagadougou. Il a effectué un passage académique à la Banque de France où étaient justement stockées 50% des réserves de devises des 8 pays de l'UEMOA qui ont en partage le franc CFA d'Afrique de l'Ouest.

Il est question dans cette émission de la fin annoncée du Franc CFA en Afrique de l’Ouest et actée en deux étapes.

D’abord, par une déclaration des présidents français Emmanuel Macron et ivoirien Alassane Ouattara le 21 décembre 2019 à Abidjan. Ensuite par un vote du parlement français en avril dernier, entérinant cette décision. Cela faisait des décennies que se manifestait la demande accrue pour en finir avec cette monnaie qualifiée, à raison, de coloniale.

La pression des nouvelles générations africaines, renforcées par des voix expertes et même des soutiens étrangers a été décisive pour couper le cordon ombilical. Toutefois, la monnaie de remplacement du franc CFA en Afrique de l’Ouest n’est pas encore née. Même si on connait déjà son nom : l'ÉCO. Un nom disputé par l'UEMOA et la CEDEAO. Alors, quels sont les enjeux de cette réforme à la résistible ascension et les balises à respecter pour la réussir ?

L'invité Souleymane Ndao défriche les pistes de réponse, pour cette première émission d’une série à venir sur le franc CFA, qui accueillera plusieurs experts.

Ousseynou Nar Gueye intervient en éditorialiste invité.

Réalisation et montage par Boubacar Badji.

‘‘C’est dit, c’est à faire'' est un talk de SenePlus en partenariat avec MRB Networks et Tract.

 

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FRANC CFA, UNE SORTIE POLÉMIQUE

La polémique continue autour du passage du Franc CFA à l'Eco. En France, le projet de loi a été présenté la semaine dernière en Conseil des ministres. Un agenda qui fait débat

Publication 25/05/2020

Video :    https://youtu.be/Oq6vgDOawt8

La polémique continue autour du passage du Franc CFA à l'Eco. En France, le projet de loi a été présenté la semaine dernière en Conseil des ministres. Un agenda qui fait débat.

 

PAR FANNY PIGEAUD

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UNE RÉFORME DU FRANC CFA OUEST-AFRICAIN POUR SAUVEGARDER LE PRÉ CARRÉ FRANÇAIS

Retour sur les nombreux arguments développés par le député communiste Jean-Paul Lecoq pour démontrer à l'Assemblée nationale française que cette réforme ne changera rien et que le franc CFA va contre les intérêts des peuples africains

Fanny Pigeaud  |   Publication 11/12/2020

VIDEO : Du CFA à l’ECO : motion de rejet à l’Assemblée Nationale française par le Parti Communiste

VIDEO : Du CFA à l’ECO : motion de rejet à l’Assemblée Nationale française par le Parti Communiste

  • https://youtu.be/rP6fCk2X1PE

L’Assemblée nationale française a adopté ce 10 décembre le projet controversé de réforme du franc CFA ouest-africain – qui doit encore être soumis au Sénat et devra être signé par les pays africains concernés. Le communiste Jean-Paul Lecoq a développé de nombreux arguments pour démontrer que cette réforme ne changera rien et rappeler que le franc CFA va contre les intérêts des peuples africains.

L’Assemblée nationale française a adopté le 10 décembre le projet controversé de réforme du franc CFA d’Afrique de l’Ouest, qui concerne huit pays. Sur 73 députés votants, il y a eu 57 voix pour, 8 voix contre (groupe Gauche démocrate et républicaine/ France Insoumise) et 8 abstentions (le PS fait partie des abstentionnistes).

En début de séance, le communiste Jean-Paul Lecoq, rappelant que le sujet était « fondamental pour des dizaines de millions de personnes », a présenté une motion de rejet préalable qui n’a pas été retenue. « Cette monnaie, assumez-le, correspond aux intérêts des classes supérieures africaines tournées vers l’extérieur et des multinationales qui travaillent en euro ; pour les peuples et pour les PME africaines, elle peut être un véritable boulet. Votre majorité défend les intérêts des classes aisées et des multinationales en toutes circonstances et en tout lieu », a-t-il notamment dit, soulignant que la réforme proposée ne changeait rien sur le fond.

Le député s’est interrogé à propos de la manière dont s’est préparée cette réforme : « La méthode confirme la condescendance de la France vis-à-vis de ces pays. » Le nouvel accord monétaire qu’elle propose a été « négocié dans le plus grand secret par une poignée de personnes à Paris et à Abidjan », a lui-même reconnu le rapport de la commission des Affaires étrangères sur ce projet de loi.

« L’ordre dans lequel s’effectuent les ratifications » du nouvel accord monétaire est en soi « suspect », a aussi estimé Jean-Paul Lecoq : « Pourquoi la France est-elle le premier pays à ratifier cet accord, alors qu’en toute logique elle aurait dû attendre que les pays directement concernés l’aient fait d’abord ? »

Le verbatim de ses interventions lors de cette séance du 10 décembre est à lire ci-dessous.

Ses propos sont à mettre en lien avec ceux du député communiste Paul Cermolacce (d’ailleurs cité par Jean-Paul Lecoq) tenus devant l’Assemblée nationale le 19 juillet 1961, au sujet des « accords de coopération » conclus par la France avec la Côte d’Ivoire, le Dahomey, la Haute-Volta et le Niger et qui concernaient entre autres la monnaie et donc le franc CFA :

« Ces accords, négociés avec de grandes difficultés, constituent un nouveau compromis visant à maintenir, par des moyens détournés, l’essentiel des privilèges colonialistes, tout en s’efforçant de sauver la face aux yeux des peuples en cause. C’est bien là la marque de leur fragilité. Ce pseudo-libéralisme, dont on tente de parer la politique gaulliste, ne résiste pas aux faits. Il est en contradiction flagrante avec les prises de position du Gouvernement français sur les problèmes coloniaux, qu’il s’agisse des débats à l’Organisation des Nations unies, ou bien encore des questions algériennes. Les peuples d’Afrique, croyez-nous, ne sont pas dupes ; ils ne sont pas non plus crédules à l’égard de certains dirigeants africains qui se font les auxiliaires du colonialisme nouvelle forme ; ils aspirent à une véritable indépendance sans restriction ni arrière-pensée ».

(L’ensemble des débats de cette séance du 19 juillet 1961 est à lire ici : http://archives.assemblee-nationale.fr/1/cri/1960-1961-droit/044.pdf)

Soixante ans séparent l’intervention de Paul Cermolacce et celle de Jean-Paul Lecoq et la problématique reste la même… Stupéfiant !

On attend maintenant la réaction des députés des huit pays ouest-africains concernés par ce projet d’accord monétaire. Ils sont restés jusqu'ici bien silencieux et le flou demeure sur les modalités de signature de cet accord monétaire par leurs pays (Bénin, Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Guinée-Bissau, Mali, Niger, Sénégal, Togo).

Compte rendu intégral des interventions dans l’hémicycle de l’Assemblée nationale de Jean-Paul Lecoq, député communiste, au sujet du projet de loi portant sur la réforme du franc CFA, le 10 décembre 2020

Discours motivant la motion de rejet préalable du projet de loi portant réforme du franc CFA :

Jean-Paul Lecoq. C’est à regret que je me tiens ici pour défendre cette motion de rejet préalable du projet de loi autorisant la ratification de l’accord de coopération entre la France et les États membres de l’Union monétaire ouest-africaine – vous avez fait un lapsus, monsieur le ministre délégué, en parlant de l’Union économique et monétaire, qui ne recouvre pas exactement la même réalité. J’aurais en effet aimé croire qu’une réforme du franc CFA – initialement appelé, ne l’oublions pas, franc des colonies françaises d’Afrique – serait l’occasion d’un débat approfondi entre tous les pays concernés et d’un véritable changement en profondeur de nos relations économiques et politiques avec les pays de l’Afrique de l’Ouest francophone.

Pourtant, rien ne s’est passé ainsi. Sur le fond, cette réforme n’a pas été faite pour changer quoi que ce soit ; sur la forme, la méthode confirme la condescendance de la France vis-à-vis de ces pays – si l’on ne change rien, pas besoin de concertation.

Personne n’était au courant de l’annonce de la réforme, en décembre 2019, par Emmanuel Macron à Abidjan. Seul son acolyte ultralibéral Alassane Ouattara en avait connaissance, lui qui avait été installé par les chars français en 2011 et qui est le champion toutes catégories de la multinationale Afrique à forte composante française, lui qui vient d’ailleurs de s’arroger un troisième mandat inconstitutionnel, au prix d’une répression implacable de ses opposants.

Bastien Lachaud. Il a raison !

Jean-Paul Lecoq. Quant aux autres partenaires de l’UMOA qui gère le franc CFA, à savoir le Bénin, le Burkina Faso, la Guinée-Bissau, le Mali, le Niger, le Togo et le Sénégal, ils n’étaient même pas informés ; pas plus que ne l’était le gouverneur de la BCEAO, qui pilote cette monnaie.

Lorsque Emmanuel Macron a expliqué le sens de la réforme en décembre dernier, à Abidjan, il a dit : « j’ai souhaité pouvoir mettre à plat l’ensemble des sujets pour écrire une page nouvelle […] de notre histoire commune ». L’idée ne lui a donc pas été soufflée par les États membres de l’UMOA, comme on veut nous le faire croire, ce matin encore ; c’est encore et toujours Jupiter qui a décidé seul. 

Or un changement de monnaie, si l’on respecte un tant soit peu les peuples concernés, aurait dû faire l’objet d’un chantier démocratique, transparent et ouvert, quitte à être long. Prenons notre exemple : en 1992, lorsque la Communauté européenne a choisi de devenir l’Union européenne et de passer à l’euro, il y a eu, en France, un référendum sur les enjeux du passage à la monnaie unique, sept ans plus tard, avec un calendrier précis. Peu importe ce que l’on pense du résultat, force est de constater qu’au moins sur la méthode, les choses étaient plus démocratiques.

Ici, que nous propose-t-on ? Uniquement, la ratification d’un accord de coopération, sans même le calendrier de mise en place de l’eco. L’ordre dans lequel s’effectuent les ratifications est en soi suspect : pourquoi la France est-elle le premier pays à ratifier cet accord, alors qu’en toute logique elle aurait dû attendre que les pays directement concernés l’aient fait d’abord ? Notre parlement aurait ainsi pu tenir compte des débats démocratiques suscités par cette réforme chez les peuples en question. C’est un non-sens complet d’avoir procédé autrement, non-sens qui justifierait à lui seul que l’on rejette ce texte – ce que vous avez encore la possibilité de faire.

N’oublions pas en effet que l’on parle ici de monnaie, c’est-à-dire d’une institution politique et économique absolument fondamentale, puisque c’est elle qui permet à une zone de déterminer et de piloter son économie en se fixant des objectifs de développement.

Cette réforme du franc CFA va-t-elle permettre à l’UMOA de piloter ses taux de change afin de favoriser ses exportations où ses importations ? Va-t-elle laisser aux pays de la zone le choix de s’adosser à une monnaie plutôt qu’à une autre ? Va-t-elle leur permettre de piloter l’inflation, les taux d’intérêt, le poids de la dette ? Non. Rien ne changera, et le cordon ombilical qui relie le franc CFA à la zone euro va perdurer, au travers de l’arrimage à l’euro, de la liberté des transactions et de la convertibilité illimitée entre les deux monnaies, ce triple lien permettant à toute multinationale qui fait du commerce dans la zone monétaire du franc CFA de voir ses investissements sécurisés sur le long terme, de convertir en euros ses profits réalisés en francs CFA, puis de rapatrier ensuite ces capitaux vers la zone euro.

La parité fixe euro-franc CFA ne pose certes aucun problème à ceux qui travaillent en euros, mais c’est beaucoup plus compliqué dans tous les secteurs où la monnaie de référence est le dollar : l’euro – et donc, avec lui, le franc CFA – varie tous les jours face au dollar, et lorsque les taux de change sont trop volatiles, des secteurs entiers de l’économie peuvent perdre leur compétitivité du jour au lendemain – nous en avons fait l’expérience avant le passage à l’euro. L’Agence française de développement – AFD – avait d’ailleurs tiré la sonnette d’alarme il y a quelques années, en indiquant que la parité fixe avait été l’un des principaux facteurs de l’effondrement du secteur du coton au Burkina Faso. Retenons les leçons de l’histoire !

Il pourrait donc être dans l’intérêt de certains pays de s’arrimer à d’autres monnaies que l’euro, mais le système favorise le lien entre zone euro et zone CFA, entravant de ce fait le commerce entre les membres de l’UMOA ou de la CEDEAO. Cela explique que, cinquante ans après les indépendances, l’Europe soit encore le premier partenaire commercial de la plupart de ces pays, alors que le commerce intracontinental représente moins de 15 % de leurs échanges – le sujet doit vous parler, monsieur le ministre délégué ! Ce chiffre signe l’échec véritable du franc CFA et justifierait à lui seul que cette monnaie soit remisée au placard de l’histoire.

Il n’y a, au sein de l’UMOA, aucun mécanisme de solidarité, aucun marché unique, aucune union politique ; aucun intérêt économique non plus à adopter une monnaie unique dont rien ne dit qu’elle bénéficiera à chacun de ses membres.

Comparons à nouveau avec la zone euro : malgré une très forte intégration économique et un commerce intense entre les États membres, nous savons tous que son fonctionnement n’est pas évident. Mais là, il s’agit d’une union monétaire sans autre forme d’union. Lorsque l’on ne maîtrise pas sa politique monétaire et que l’on ne peut pas laisser filer l’inflation pour diminuer la dette, le seul outil pour se désendetter, en cas de crise, est la diminution des dépenses publiques – cela nous parle ici aussi. Comme dans l’Union européenne, le programme est l’austérité à perpétuité. Le rôle du franc CFA dans la situation économique et sociale catastrophique des États membres de l’UMOA est à étudier avec sérieux, même s’il n’en est évidemment pas l’unique facteur, nous en sommes d’accord.

Regardons la situation d’un point de vue historique : dans les années 1980, le Fonds monétaire international – FMI – et la Banque mondiale ont saigné les pays d’Afrique de l’Ouest. Les fameux plans d’ajustement structurel ont, avec la complicité du club de Paris, détruit ces États en pleine construction, les ont rendus dépendants des cours des matières premières, les ont obligés à tout privatiser et à réduire le plus possible les dépenses publiques. Ils avaient promis un renouveau économique qui n’est jamais arrivé.

Évidemment, ces cures d’austérité n’ont jamais fonctionné et l’endettement des pays est resté très élevé. Le franc CFA a empêché ces pays d’utiliser l’inflation pour se désendetter. Ceux-ci ont donc continué à diminuer leurs dépenses publiques pour les porter à des niveaux totalement inacceptables pour leur population. Voilà l’origine de leur crise ! En effet, cette politique a produit des systèmes éducatifs totalement dégradés, des systèmes de santé inefficaces et des salaires si faibles dans la fonction publique qu’ils ne peuvent empêcher la corruption.

Face à ces situations, l’aide publique au développement – APD – ne suffit pas à remonter la pente : la pauvreté et les inégalités explosent, le chômage devient de masse, des millions de jeunes sont touchés par le désespoir et l’exil contraint se développe. Le pire, c’est que même avec l’APD, la zone CFA est encore perdante. Tous les pays de l’UMOA figurent dans la liste prioritaire de l’AFD ; une partie importante de notre APD est donc dédiée au déploiement de programmes, dont certains consistent à construire des infrastructures. Or qui est favorisé lorsqu’il s’agit de gagner des marchés dans une monnaie arrimée à l’euro ? Nos multinationales, bien sûr ! Le métro d’Abidjan offre un exemple funeste de ce genre de projets,…

Marc Le Fur, rapporteur pour avis de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire. Vous préférez les Chinois ?

Jean-Paul Lecoq. …que le sénateur communiste Pierre Laurent a récemment dénoncés. Le chantier a été confié, à la suite d’immenses pressions du pouvoir français et sans appel d’offres, à un consortium d’entreprises françaises, à un prix astronomique. La transformation du franc CFA en eco ne changera en rien ce système.

Les trois choses qui vont changer sont le nom, la possibilité pour la BCEAO de déposer ses réserves de change ailleurs qu’au Trésor français et l’absence de Français dans la gouvernance de la zone monétaire – et encore. L’étude d’impact du projet de loi affirme que la fin de l’obligation de réserve de change au Trésor français ne modifiera absolument pas la tutelle monétaire. En revanche, cette disposition allégera le coût supporté par la France, qui n’aura plus à rémunérer les avoirs déposés sur le compte dédié ; voilà qui en dit long sur l’état d’esprit de ses auteurs !

Jacques Maire, rapporteur. C’est petit comme argument, très petit !

Jean-Paul Lecoq. Quant à l’absence de Français dans la gouvernance de la zone monétaire, la lecture attentive de l’article 4 de l’accord commande de la nuancer. En effet, il dispose qu’une personnalité indépendante et qualifiée sera nommée par le conseil des ministres de l’UMOA, en concertation avec la France, pour siéger au comité de politique monétaire de la BCEAO – je ne reprendrai pas ici l’interpellation de Mme Roselyne Bachelot cette semaine.

La France sort donc par la porte pour mieux revenir par la fenêtre. L’objectif de la France vis-à-vis de l’UMOA est clair : faire taire les critiques populaires sur le franc CFA par une réforme plus que minimaliste.

Le nom de la nouvelle monnaie est une tartufferie comme j’en ai rarement vu. Eco est le nom du projet de monnaie unique de la CEDEAO, communauté économique qui englobe tous les États de l’UMOA, ainsi que le Cap-Vert, la Gambie, le Ghana, la Guinée, le Liberia, le Nigeria et la Sierra Leone. La CEDEAO, ou ECOWAS en anglais, avait choisi le diminutif de son acronyme anglais pour nom de sa future monnaie. Nous avons affaire à une OPA hostile sur l’eco de la CEDEAO. L’objectif de la France vis-à-vis de la CEDEAO est clair : couper l’herbe sous le pied du projet monétaire de cette zone et imposer son eco comme un fait accompli, afin d’étendre l’influence de sa monnaie à tous les États membres de la CEDEAO. Le rapport de notre commission énonce clairement cet objectif, puisqu’on y lit à la page 22 : « Le fait que le changement de monnaie solde un héritage controversé est susceptible de générer une dynamique politique […]. Il peut permettre à d’autres pays, aujourd’hui extérieurs à l’UMOA, de rejoindre l’eco ».

Les pays concernés n’ont pas du tout apprécié cette visée de la France. Le Nigeria, poids lourd de la CEDEAO, a évoqué l’implosion de la zone si la réforme du franc CFA était mise en œuvre. Plusieurs États ont officiellement condamné cette initiative. Vouloir imposer l’eco à l’ensemble de la CEDEAO est une stratégie très dangereuse. L’exécutif français prend le risque d’une crise diplomatique dans cette zone déjà en proie à de fortes tensions.

L’objectif absolu s’agissant de la CEDEAO devrait plutôt être le renforcement des États, de leurs services publics et de leur économie : ces politiques seules seraient susceptibles d’offrir aux populations des perspectives de vie et de travail sur place.

Rodrigue Kokouendo, suppléant Mme Marielle de Sarnez, présidente de la commission des affaires étrangères. C’est ce qui est fait déjà en partie.

Jean-Paul Lecoq. Ces politiques seules seraient à même de lutter efficacement contre le terrorisme, qui ronge toute cette zone. Avec cette stratégie du chaos, la France affaiblit la CEDEAO. Or celle-ci est l’appui de l’Union africaine dans la politique de convergence économique et financière, et de développement d’une union douanière visant à créer des intérêts économiques communs dans la région et, surtout, à mettre en place une devise commune. Affaiblir la CEDEAO, c’est affaiblir le relais de l’Union africaine pour l’intégration régionale ; c’est affaiblir le multilatéralisme africain. Serait-ce là votre objectif ? Je ne peux pas y croire : vous parlez si souvent de multilatéralisme !

Voulons-nous être complices de cette stratégie de classe ? Que l’on me comprenne bien : je ne penche pas pour le très libéral projet eco de la CEDEAO, mais je constate que le Gouvernement français s’est invité dans ce débat pour en perturber le cours. Cette monnaie, assumez-le, correspond aux intérêts des classes supérieures africaines tournées vers l’extérieur et des multinationales qui travaillent en euro ; pour les peuples et pour les PME africaines, elle peut être un véritable boulet. Votre majorité défend les intérêts des classes aisées et des multinationales en toutes circonstances et en tout lieu.

Nous, députés communistes, nous opposons à cette réforme précisément parce que nous défendons, en toutes circonstances et en tout lieu, les plus précaires et les peuples. Pour cela, il faut un véritable renouvellement. L’exécutif français ne doit pas imposer sa volonté en faisant pression sur des dirigeants africains. Il est insultant de dicter à des pays indépendants leur politique monétaire et économique. Cette politique ne fait qu’alimenter le sentiment anti-français. Avec cette réforme, nous sommes à mille lieues de ce qu’il faudrait faire pour réparer et construire des relations respectueuses de coopération d’égal à égal entre nos pays et nos peuples.

Jacques Maire, rapporteur. Pompier pyromane !

Jean-Paul Lecoq. Il faut se poser la question de l’intérêt d’une telle réforme pour les peuples. À l’occasion de ce travail, nous n’avons rien trouvé qui aille dans ce sens : cette réforme n’est pas faite pour eux – eux qui pâtiront de ses mauvais côtés. Cette hypocrisie n’a que trop duré : il faut rejeter ce texte et repartir à zéro. Cette motion de rejet préalable vous en offre la possibilité : soutenez-la pour entamer un processus véritablement démocratique ! (M. Christian Hutin applaudit.)

Explication de vote concernant la motion de rejet préalable :

Jean-Paul Lecoq. Pour appuyer mon propos, je vais vous montrer que tous mes arguments figurent déjà dans le rapport de la commission.

À propos du manque de concertation, je vous invite à relire la page 26. À la page 21 est indiqué que la convention de garantie entre la France et la zone CFA n’est toujours pas conclue, ce qui prouve que nous votons sur une réforme qui n’est pas ficelée. Concernant les problèmes économiques que pose la réforme, le rapport pointe les mêmes faiblesses que celles que j’ai exposées. Plusieurs passages, aux pages 10, 12 et 13, indiquent que les entreprises multinationales et la frange aisée des populations sont favorisées par le franc CFA, alors que les PME locales et les populations pauvres en souffrent, surtout à cause des hauts taux d’intérêt et des coûts de production induits par la valeur élevée du franc CFA. En lisant ces pages, on se demande vraiment pourquoi vous vous félicitez de cette réforme, qui ne changera rien pour les peuples.

S’agissant de l’ambition défendue par Paris d’étendre l’eco à toute la CEDEAO, le rapport ne fait aucun mystère : aux pages 6 et 23, il indique que le franc CFA peut servir d’embryon à la future monnaie unique ouest-africaine. Les pages 22 et 23 montrent les tensions diplomatiques créées dans la CEDEAO par l’annonce précipitée de la réforme. Ce que j’ai indiqué à propos de la stratégie du Gouvernement français, consistant à prendre de vitesse la réforme monétaire de la CEDEAO pour tenter d’étendre à toute la zone une version quasi identique du franc CFA, figure dans le rapport.

Au-delà des problèmes de fond, la méthode n’est pas bonne : il aurait fallu au minimum laisser les parlements directement concernés s’exprimer avant nous. Je vous propose de rejeter dès maintenant le projet de loi. Peut-être pourrions-nous ensuite, et seulement ensuite, reprendre nos débats en fonction de ce qui se sera dit dans les parlements africains.

Intervention générale concernant le projet de loi portant réforme du CFA :

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Paul Lecoq.

Michel Herbillon. C’est un véritable festival !

Jean-Paul Lecoq. J’en ai encore à dire !

Franck Riester, ministre délégué. Encore ?

Michel Herbillon. C’est sa troisième prise de parole !

Bruno Fuchs. Il s’auto-allume !

Jean-Paul Lecoq. La relation de la France avec l’Afrique francophone ne pourra pas être assainie tant que les dirigeants de notre pays n’auront pas mis de côté leur obsession de l’influence politique et économique sur cette zone. La réforme que vous proposez est une nouvelle illustration de cette obsession…

Bruno Fuchs. Ça, c’est vrai !

Jean-Paul Lecoq. …et elle est aveugle aux dangers qu’elle pourrait faire naître.

La zone monétaire du franc CFA s’appelle « Union monétaire de l’Ouest africain » ; elle est composée du Bénin, du Burkina Faso, de la Côte d’Ivoire, de la Guinée-Bissau, du Mali, du Niger, du Sénégal et du Togo. Tous ces pays font également partie d’un ensemble plus large : la CEDEAO, c’est-à-dire la Communauté économique des États de l’Ouest africain, qui compte en outre le Cap-Vert, la Gambie, le Ghana, la Guinée, le Liberia, le Nigeria et la Sierra Leone.

Or les quinze États qui composent la CEDEAO ont pour objectif de converger économiquement, et entre autres, depuis des années, de travailler à une monnaie unique. Il n’y a pas de hasard : depuis 2019, la mise en place de cette monnaie unique de la CEDEAO s’accélère, et elle a reçu un nom, l’eco ; pourtant, en décembre 2019, sans que les membres de la CEDEAO, ni même les autres membres de l’UEMOA, ne soient au courant, Emmanuel Macron, président français, et Alassane Ouattara, président ivoirien, ont annoncé la mise en place de l’eco à l’échelle de la seule UMOA, en remplacement du franc CFA.

Cet eco-là ressemble à s’y méprendre au franc CFA, mais ignore totalement les critères retenus par la CEDEAO pour sa monnaie. Comme le dit l’économiste sénégalais Ndongo Samba Sylla, « une abolition du franc CFA aurait nécessité au moins, symboliquement, la fin de l’accord de coopération monétaire entre la France et les pays de l’UEMOA ». Or tel n’est pas le cas.

Alors pourquoi une réforme d’une telle ampleur a-t-elle été subitement proposée, sans concertation ? J’avancerai deux explications.

La première, c’est sans doute l’accélération du calendrier de réforme de la CEDEAO ; la peur française de perdre notre influence en Afrique de l’Ouest s’est alors réveillée, et les dirigeants français ont choisi de torpiller le projet de la CEDEAO, comme l’a dit l’économiste sénégalais Demba Moussa Dembelé. Mais cette stratégie a créé de très vives tensions diplomatiques, au sein de la CEDEAO – entre les pays utilisateurs du franc CFA et les autres –, mais aussi entre la CEDEAO et la France. Le président nigérian a même brandi la menace de dislocation de la CEDEAO. Cette stratégie de la tension est loin d’être innocente. C’est Justin Koné Katinan, ancien ministre ivoirien, qui l’explique le mieux : pour maintenir son influence en Afrique de l’Ouest, la France n’a que deux solutions, « soit avoir l’entièreté de la zone CEDEAO sous son contrôle grâce à sa monnaie, soit, à défaut, la désintégrer pour sauvegarder son espace, butin de son passé colonial ». Il n’y a pas de quoi être fier !

La deuxième explication, c’est la volonté de briser, au sein de l’UEMOA, « l’élan patriotique des Africains quant à la reconquête de leur souveraineté monétaire », selon les mots de l’économiste Séraphin Prao. Casser la dynamique naissante de l’eco, casser la dynamique anti-franc CFA qui émerge dans les sociétés civiles de l’UEMOA : voilà le pourquoi de la précipitation.

Au-delà du débat économique, on le comprend, c’est la sauvegarde du pré carré qui est en jeu. Or la politique de la terre brûlée engagée par cette réforme pourrait s’avérer très dangereuse ; prendre le risque d’un retour de flamme dans un espace géopolitique en proie à tant de dangers est totalement irresponsable. Cette irresponsabilité s’explique par l’histoire : cette réforme ne fait que poursuivre la fuite en avant entamée depuis le premier jour de la décolonisation.

D’ailleurs, le 19 juillet 1961, ici même, à l’occasion du débat sur le traité créant l’UMOA, le député communiste Paul Cermolacce disait : « les peuples d’Afrique […] aspirent à une véritable indépendance, sans restriction ni sans arrière-pensée. Vouloir aller contre ce courant, c’est aller à de nouveaux déboires. Nous nous refusons à cautionner votre politique. Notre position est claire : nous sommes pour de véritables rapports de coopération qui ne peuvent se concevoir et être durables sans une totale indépendance. » Il allait jusqu’à critiquer le fait que certaines élites africaines étaient corrompues par la France pour mieux faire accepter au peuple les décisions impopulaires exigées par Paris. Cela n’existe heureusement plus aujourd’hui – Raymond Devos ajouterait : « quoique ». Force est de constater que, soixante ans après cette intervention, nous voyons encore quotidiennement dans cette zone de l’Afrique les déboires dont parlait ce député communiste.

Le groupe de la Gauche démocrate et républicaine appelle donc à voter contre ce projet de loi, en espérant que cette fois-ci, le pouvoir entendra sa mise en garde.

Explication de vote sur l’ensemble du projet de loi portant réforme du franc CFA :

Jean-Paul Lecoq. Mes chers collègues, il me semble important d’insister encore sur le sujet tant il est fondamental pour des dizaines de millions de personnes, et tant il est délicat pour notre Parlement d’en débattre, puisqu’il ne concerne pas directement le peuple français. Les contours de la nouvelle monnaie reprendraient presque totalement ceux du franc CFA, notamment les trois principaux critères que sont la parité fixe avec l’euro, la garantie de conversion illimitée entre l’euro et l’eco, et la liberté de mouvement des capitaux entre les deux zones monétaires. Ces critères monétaires favorisent les multinationales travaillant avec l’euro et les classes africaines aisées, au détriment de l’emploi, de l’industrialisation et du dynamisme des PME locales. Le maintien de ces caractéristiques pour l’eco va donc à l’encontre des revendications des classes populaires d’Afrique de l’Ouest, victimes du chômage de masse et de la faiblesse du tissu économique, qui veulent depuis longtemps en finir avec cette monnaie issue de la colonisation française.

En même temps, la réforme de l’eco proposée par Paris entre en conflit avec la volonté de la CEDEAO de mettre en place une monnaie unique, l’eco CEDEAO. Cette stratégie a créé une très forte tension au sein de la CEDEAO qui a l’impression de se faire voler sa réforme par Paris.

Christian Hutin. Absolument !

Jean-Paul Lecoq. C’est une stratégie tout à fait volontaire : l’exécutif français veut couper court aux exigences de la réforme de la zone monétaire CFA par une réforme minimale qui supprime, notamment, le nom de la monnaie, afin d’empêcher une réforme monétaire de la CEDEAO qui mettrait en danger ses avantages économiques en Afrique de l’Ouest.

Une structure monétaire inchangée, une réforme précipitée au bénéfice des multinationales européennes, la volonté d’affaiblir le projet monétaire de la CEDEAO pour en prendre la place : tous les éléments sont réunis pour que la réforme ne fasse qu’empirer la situation actuelle. Je vous invite à voter contre le projet de loi.

Franc Cfa, le silence complice des progressistes français

franc cfa et progressistes français.jpg

Par: SenePlus - Seneweb.com | 04 février, 2021

À quelques rares exceptions près, les progressistes français ne se sont pas intéressés aux récentes manœuvres du pouvoir macroniste qui visent à prolonger la durée de vie du franc CFA. Leur silence permet la poursuite de la logique coloniale de la France en Afrique.

Après l’avoir annoncée à grand renfort de publicité fin 2019, le pouvoir macroniste a soumis ces derniers mois aux députés et aux sénateurs une « réforme » du franc CFA d’Afrique de l’Ouest. Le débat était capital pour l’avenir de 14 pays africains, dont le destin reste orienté par cette monnaie coloniale. Il l’était d’autant plus que les changements proposés étaient mineurs.

Les progressistes français auraient pu saisir cette occasion pour soutenir concrètement ceux qui, en Afrique, aspirent à une indépendance complète et militent pour la fin de la domination monétaire de la France. À quelques rares exceptions près, ils ne l’ont pas fait.

Dans l’indifférence quasi générale, la « réforme » a été adoptée par l’Assemblée nationale le 9 décembre 2020, puis par le Sénat le 28 janvier.

Inertie de l’opinion publique et des médias

Souvenons-nous des observations de Mongo Beti formulées il y a plusieurs décennies : c’est parce que « l’opinion publique » française « et en premier lieu la presse » sont restées inertes que le pouvoir gaulliste a pu briser l’élan des progressistes camerounais et n’octroyer qu’un semblant d’indépendance au Cameroun en 1960 (Main basse sur le Cameroun, autopsie d’une indépendance, Maspero, 1972).

L’écrivain anti-colonialiste dénonçait la solidarité à géométrie variable des intellectuels français, lesquels ménageaient toujours les intérêts français en Afrique : alors qu’ils s’engageaient avec passion aux côtés des gauches d’Amérique latine ou d’Europe de l’Est pour dénoncer la dictature sévissant dans leurs pays, ils ne manifestaient aucune solidarité à l’égard des Camerounais en lutte contre un régime tyrannique installé et soutenu par Paris.

Le même phénomène est manifestement toujours à l’œuvre à propos du franc CFA, créé par un décret du général de Gaulle en 1945 et placé depuis sous la tutelle du Trésor français : ces dernières années, son caractère rétrograde et inique n’a suscité que peu d’intérêt et d’émoi en France.

Ainsi, les économistes hétérodoxes et les politistes français qui se sont emparé de la question se comptent sur les doigts d’une main. Les activistes, dont les militants de l’association Survie, sont eux aussi peu nombreux. Les quelques médias dits « de gauche » ont pour leur part assuré le service minimum. Certains d’entre eux ont même relayé en mai 2020 l’idée que la France « actait » officiellement la « fin du franc CFA », prenant pour argent comptant le récit officiel sur la réforme du président Emmanuel Macron.

La vérité est pourtant tout autre et n’est pas difficile à établir : le système CFA ne fait l’objet que de légères modifications de nature symbolique pour les huit États qui utilisent le franc CFA en Afrique de l’Ouest (Bénin, Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Guinée-Bissau, Mali, Niger, Sénégal, Togo), et il demeure inchangé pour les six pays d’Afrique centrale qui l’ont en partage (Cameroun, Congo, Gabon, Guinée équatoriale, République centrafricaine, Tchad). Tout ceci apparaît clairement dans les rapports et compte-rendus des débats parlementaires de ces derniers mois.

Il n’y a guère que des élus communistes, à l’Assemblée nationale et au Sénat, qui ont vraiment porté la contradiction à un gouvernement déterminé à préserver un dispositif décrié partout dans le monde, en mettant en exergue devant leurs collègues les limites et faux-semblants de la pseudo « réforme » du président Macron. Ils ont fait également des efforts de communication hors des hémicycles parlementaires. Mais ils n’ont pas réussi à briser le mur d’indifférence érigé autour du franc CFA depuis 75 ans et soutenu par toutes les couches de la société française – consciemment ou pas.

Un système appauvrissant

Or les enjeux sont cruciaux et les raisons de s’indigner sont nombreuses.

Le franc CFA est plus qu’une incongruité, c’est une seringue plantée dans les veines des pays africains qui vampirise leurs ressources. Il entretient un système colonial qui n’existe nulle part ailleurs, et sa persistance garantit celle de la pauvreté et de ses expressions multiples – dont l’émigration forcée vers la Méditerranée.

L’ancrage du franc CFA à l’euro, monnaie forte, pénalise en effet la compétitivité-prix des productions des pays qui l’utilisent, favorisant des économies rentières portées sur la consommation de marchandises importées, au détriment d’une politique axée sur l’augmentation des capacités de production nationales. À cause de la parité fixe avec l’euro, ces États ne peuvent pas se servir du taux de change en cas de crise économique et sont alors obligés de réduire leurs dépenses publiques.

Le mécanisme pousse par ailleurs les banques centrales de la zone franc à limiter les crédits bancaires qu’elles accordent aux ménages, aux entreprises et aux États. Conséquence, ces derniers voient leurs dynamiques productives paralysées et sont contraints d’emprunter sur les marchés financiers internationaux, à des taux élevés, pour financer leur développement. Quant au principe de libre transfert, l’un des piliers du fonctionnement du système CFA, il facilite des sorties colossales de capitaux.

Au bout du compte, les pays de la zone franc se trouvent enfermés dans un rôle de producteurs de matières premières et de consommateurs de produits importés. Le franc CFA contribue ainsi à l’augmentation du chômage, de la misère, de l’émigration dite « illégale »... Ce n’est sans doute pas un hasard si la plupart des personnes secourues en janvier 2021 par SOS Méditerranée étaient originaires de pays de la zone franc, dont le Mali (certes en guerre), la Côte d’Ivoire (qui n’est pas en guerre) et le Sénégal (pas en guerre non plus). Sur quatorze États membres de la zone franc, neuf sont aujourd’hui classés parmi les « pays les moins avancés » (PMA).

Pas de démocratie

L’hypocrisie des tenants du système CFA devrait aussi faire réagir tous ceux qui se préoccupent de démocratie, d’équité, de justice. Rendez-vous compte : la France garde son emprise sur le franc CFA sous le prétexte qu’elle joue un rôle de « garant », mais ce rôle est en réalité fictif !

Le président malien Modibo Keita l’a dit publiquement en 1962 (« La France ne garantit le franc CFA que parce qu’elle sait que cette garantie ne jouera pas effectivement »), le journaliste français Paul Fabra l’a écrit en 1972 dans Le Monde dans un article intitulé « Zone franc ou zone de pauvreté ? », et cette réalité a été rappelée à plusieurs reprises lors des derniers débats parlementaires. Au cours d’une séance de la commission des finances de l’Assemblée nationale en septembre 2020, un député a ainsi expliqué que la « garantie » française n’avait pas été activée depuis au moins 1994 et que tout était fait pour qu’elle ne le soit plus.

De plus, Paris gère le système dans l’opacité. Il suffit de lire le récent rapport de la commission des affaires étrangères de l’Assemblée nationale sur le projet de réforme, écrit par un député LREM, pour s’en rendre compte. « L’annonce du 21 décembre 2019 à Abidjan, par les présidents français Emmanuel Macron et ivoirien Alassane Ouattara, de la réforme monétaire a été une surprise pour tout le monde – élus, opérateurs économiques, banque centrale et population », note ce texte, parlant d’un « accord négocié dans le plus grand secret par une poignée de personnes à Paris et à Abidjan ».

Les dirigeants et citoyens des pays concernés par la réforme ont été ainsi mis devant le fait accompli par les présidents Macron et Ouattara. Ceux des États de la CEDEAO (Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest), dont ils font aussi partie, n’ont pu que constater la volonté de Paris de torpiller leur propre projet de monnaie commune (c’est l’un des trois objectifs non avoués de la réforme, les deux autres visant à réduire les critiques et à faire faire quelques économies au Trésor français).

Quant à la suite du processus d’adoption de cette « réforme » précipitée, elle est, elle aussi, stupéfiante, comme l’ont fait remarquer le sénateur communiste Pierre Laurent et le député communiste Jean-Paul Lecoq. Ce dernier a souligné devant ses collègues de l’Assemblée nationale combien il était aberrant et suspect que la France soit « le premier pays à ratifier cet accord, alors qu’en toute logique elle aurait dû attendre que les pays directement concernés l’aient fait d’abord ».

M. Lecoq a dû rappeler que la monnaie est une « institution politique et économique absolument fondamentale, puisque c’est elle qui permet à une zone de déterminer et de piloter son économie en se fixant des objectifs de développement ».

Toutes ces manœuvres du gouvernement pour prolonger la durée de vie du franc CFA (on peut ajouter que la « réforme » a été en partie appliquée avant même d’être soumise aux parlements français et africains) et la fiction organisée autour de la soi-disant « garantie » française n’intéressent donc pas les médias.

Sans gêne, la France officielle continue par conséquent d’imposer sa volonté aux autres (pour sauvegarder évidemment ses propres intérêts et ceux des entreprises françaises qui opèrent sur le continent et sont les premières bénéficiaires du système).

Les observateurs étrangers choqués

Ailleurs, les réactions sont très différentes : les journalistes, économistes et politistes des autres pays occidentaux sont choqués lorsqu’ils constatent que le franc CFA existe encore, soixante ans après les indépendances, et qu’il fonctionne sur la base des principes posés durant la période coloniale. En général, ils n’ont pas peur de le qualifier de « colonialiste », « impérialiste », « désastreux », « système d’exploitation », etc.

Dans un article publié en décembre 2020, le journaliste espagnol Jaume Portell Caño identifie le franc CFA comme l’une des cinq principales causes du phénomène migratoire partant du Sénégal vers l’Europe, une approche systémique que l’on trouve rarement dans la presse française.

Les Africains anglophones regardent eux aussi avec effarement cette domination monétaire française sur leurs voisins francophones. En 2018, la célèbre écrivaine nigériane Chimamanda Ngozi Adichie déclarait : « Je vois beaucoup de différences entre les mondes anglophone et francophone, dans l’occupation de l'espace en Afrique. Le franc CFA rattaché au franc français (aujourd’hui l’euro, ndlr), par exemple, me paraît complètement rétrograde. »

Le changement ne viendra pas des dirigeants africains, soumis à la France

Le fait que les relations de la France avec les pays de la zone franc soient autant viciées et malsaines est l’autre raison qui devrait interpeler les progressistes français. Car le changement ne viendra pas des dirigeants africains : parce qu’ils sont pour la plupart redevables envers les autorités françaises (qui les ont bien souvent aidés à conquérir le pouvoir et à s’y maintenir durablement) ou craignent des représailles, ils ne prendront pas le risque de déplaire à Paris. Ils ne bougeront pas non plus parce qu’ils font généralement partie de la petite élite africaine qui tire quelques avantages du système CFA.

C’est pourquoi les activistes, économistes, politiques, journalistes et citoyens des pays africains qui réclament l’abolition du franc CFA depuis plusieurs décennies ont besoin que leurs collègues français et européens se mobilisent.

Le franc CFA n’est pas une question annexe ou exotique qui ne concernerait que les pays africains, qu’il faudrait laisser aux fonctionnaires de Bercy ou aux lobbies françafricains, et garder reléguée dans les bas-fonds de l’actualité. Il est la clé de voûte de la domination que la France continue d’exercer sur des États formellement indépendants.

Tant que l’ensemble des progressistes français s’en désintéresseront, ils conforteront par leur silence l’État français dans son choix de poursuivre sa logique coloniale en Afrique.

Pour en savoir plus sur le franc CFA : L’arme invisible de la Françafrique, une histoire du franc CFA, Fanny Pigeaud et Ndongo Samba Sylla (La Découverte, 2018). En anglais : Africa's Last Colonial Currency, The CFA Franc Story, Fanny Pigeaud & Ndongo Samba Sylla (Pluto Press, février 2021).

RESILIENCE : JULIETTE BA LA SURVIVANTE

Juliette BA : “Je n’ai plus d’utérus, mon mariage secoué, mes comptes vides, mon égo maltraité”

 

VIDEOS DE COACH JULIETTE :

En toubabie, tu fais tout toute seule : https://fb.watch/2JuHVCq3H4/

Journée mondiale de l’endométriose : https://youtu.be/0mJqtDJQlIA

Arnaque ! MAIGRIR avec des tisanes et comprimés : https://youtu.be/ZXrz1iXFZt8

Ton changement, ça ne peut pas plaire à tout le monde : https://youtu.be/L3wLoZKR2qU

Tu veux un ventre plat ? : https://fb.watch/2JtSNr54nR/

Recette système immunitaire : https://fb.watch/2Ju8yYzwHR/

Zoiyeuss Korité : https://fb.watch/2Juvsc3Dy3/

Salaam à tous …
Je suis vraiment très touchée du post paru dans ce groupe. Cet hommage était juste waouh !!!
Oui je suis Juliette BA alias …
Juliette MissEndopositive
Juliette Ba Lifestyle
J’ai effectivement commencé ma carrière à SUD FM en 1995 ou je présentais la matinale en alternance avec Ama Soya Sakho. J’avais 19 ans. À l’époque j’étais en fac de philo à l’UCAD au département dirigé par O. Kane… J’ai ensuite intégré la rédaction de Sud aux côtés de Michel Diouf, Sakhou Faye, Pascal Faye etc … où je suis passée au reportage et à la présentation des différents journaux.

J’ai quitté Sud en 2002. Après un break de deux ans à Paris. (où je commence à écrire pour le magazine Miss Ébène). En parallèle j’ai participé à l’aventure TRACT avec Ibou Fall le Dir pub. Je signais : Doc Gynéco.

Nous sommes en 2004. J’ai 28 ans. Je présente un magazine sportif: SPORTS 2S où je m’efforce d’être la voix de TOUTES les fédérations … Lorsque naît 2STV je deviens Directrice de la rédaction, recrute des journalistes et mets en place un certain nombre d’émissions : Bantamba, Senseï, Courses hippiques et mon bébé SPORTS 2S continue de grandir…

Je pose également un baluchon à Radio Nostalgie … on m’entend les mercredi dans EN FILIGRANE et les jeudi dans CALIENTE. Je propose un nouveau concept à 2S : LA MATINALE. On fait bien des matinales à la radio non ? Eh non …Malgré un très joli pilote, la direction ne me suit pas …” Donc les gens vont se lever à 4h du matin pour venir blablater de bougies, de bouquins et de bien-être sur un plateau, quoi !” (Il faut croire que oui… mais quelques années plus tard…
Je suis mon père de substitution M. Baal, lorsqu’il réintègre la RTS et est nommé directeur de la télévision …On me confie la présentation du JT de 23h. Puis le 13h. D’abord les week-end, puis la semaine. Comme j’aime le matin, je propose à Baal mon éternelle tranche horaire… Samay rabb bougouniu ma nelaw …

Baal me fait confiance : Ainsi naît Kinkeliba… Réveiller les gens le matin, dans la joie et la bonne humeur, mon kiff depuis Sud fm… Quelques mois plus tard me voilà repartie pour d’autres horizons… Lorsque Baal me demande qui pourrait reprendre les rênes de la matinale … Je lui chuchote : Sarah Cissé… Juliette BA “je n’ai plus d’utérus, mon mariage secoué, mes comptes vides, mon égo maltraité…” Cette fois ce sera la RDC. Goma puis Bukavu. Là bas c’est la guerre… et je suis tout sauf correspondante… de guerre. Donc… Je vais mettre le journalisme entre parenthèses…

Passionnée depuis toujours par le bien-être, Je décide de faire une formation en Hygiène vitale et en Naturopathie. Une certification en réflexologie, une en Aromathérapie, une autre en diététique et Nutrition option Rééquilibrage alimentaire et je passe un diplôme de Professeur de Yoga.Tout cela m’aide beaucoup dans la gestion de l’Endométriose, maladie dont je souffre depuis l’âge de 14 ans et qui m’envoie régulièrement à l’hôpital, me laissant sans force et démoralisée… En 2010, je rentre à Dakar, j’ouvre mon Centre de Mieux-Être, L’EVEIL, je donne des consultations naturopathiques, des cours de yoga et commence mon aventure de Coach…Je renoue également avec mes vieilles Amours sur Nostalgie… Caliente redémarre ! En parallèle, je suis recrutée par une nouvelle télévision AFRICA 7 : J’y présente la Matinale et un magazine des sports.

Tout se passe à merveille mais rapidement la mauvaise gestion et les difficultés financières vont entraîner une vraie catastrophe “humanitaire”. Je quitte le navire avant le naufrage et je renonce à tous mes arriérés de salaire. Sur Nostalgie c’est aussi le naufrage financier. Mon salaire pour la Matinale que je présente n’est plus payé depuis 6 mois. Je travaille pour la gloire et les auditeurs… C’est la dégringolade… Un matin mon téléphone sonne, la Directrice du bureau ivoirien de Vox Africa Télévision recherche quelqu’un pour s’occuper de la Rédaction… Je réfléchis… 6 mois que j’ai quitté Africa 7 et Nostalgie… je balance mon CV un peu partout… Plus rien… Je donne mes cours de yoga et mes consultations naturo. J’ai des expats, quelques libanais… La plupart de mes soeurs sénégalaises mettent une fortune dans leurs perruques et leurs vêtements mais trouvent que mes tarifs sont trop chers… Le jour où le fils d’une célébrité regarde mon CV et me sort: c’est intéressant, on va vous rappeler, je me dis que je n’ai plus rien à perdre … Me voilà dans le premier avion, direction Abidjan …

Là, ma distribution de CV porte ses fruits. Personne ne me reproche plus d’être assimilée, toubabée ou avant-gardiste… Au contraire on salue mon originalité en m’offrant la matinale en co-présentation sur Nostalgie Abidjan… On salue mon coté “choko” et intello en m’offrant la présentation de Génies en Herbe. Et consécration, je présente une émission sur TV5 MONDE : “Ça Roule”. Un programme Auto et Tourisme. Je fais le tour du monde, rencontre plein de gens, essaye plein de voitures …

Je me remarie. 3e mariage, cette fois c’est le bon… Le bébé ne vient pas mais ce n’est pas grave …Et puis un jour la maladie s’intensifie… Les douleurs deviennent insupportables…Et tout s’enchaîne : Septicémie, Réanimation, Hystérectomie. Je perd mon travail…La télé, la radio, les contrats de com, les contrats publicitaires… Me voilà bloquée en France pour de longs mois… Mon pauvre corps fatigué de toutes ces interventions chirurgicales… Mes neurones fossilisés par toutes ces anesthésies générales… Mon mariage secoué, mes comptes vides, mon égo maltraité… Seule mon Âme sage accepte car elle sait que les voies et méthodes du Tout-Puissant sont justes impénétrables… Longue convalescence. Les mois s’écoulent, finalement je m’installe en France dans l’anonymat le plus total, sans famille, sans amis, juste mon mari… Je réapprends à bouger, à marcher…Je suis diminuée, je n’ai plus d’utérus, je ne serai jamais biologiquement Maman… mais je suis tellement reconnaissante d’être en vie. Arrive 2020. Le Covid, le Confinement… Prise de conscience, Mélancolie du ventre définitivement vide… Je cherche du travail mais la période est peu propice et mon réseau trop peu développé… Même pour du baby-sitting, des ménages, de la vente… On m’ignore, on me parle mal, on me méprise …Trop âgée, mais surtout “Over qualifiée”. Moi je veux juste travailler… Quelques mois plus tard j’entre en Vraie déprime, puis en DÉPRESSION. Ça dure plusieurs mois… Plusieurs propositions et promesses professionnelles qui n’aboutissent pas… J’envisage un temps de rentrer. J’active mes réseaux au bled. Des promesses, encore des promesses …Je suis sous l’eau… Et je sens que ça devient confortable …Je me délecte de mes peines et je lèche mes plaies, comme un animal blessé. Moi la Coach Mieux-Être, je prends 10 kilos. Pinaisss ! 10 kilos de blessures réouvertes, de détresse et de désolation. Je suis désorientée… Mon Estime de moi est en sourdine… Je vais mettre du temps à remonter la pente… Zoyeux DimanSs

Mais après la pluie vient toujours le beau temps …Les clientes de mes coaching sont là… Elles ne m’ont jamais lâchée… Me sollicitant alors que je suis au plus bas… Je ne sais plus qui coache qui mais ce qui est sûr, c’est quechacune m’aide à guérir…

Je garde la foi, qui me guide et me porte. Les “gros” clients arrivent petit à petit… On me fait de vrais contrats… Grâce à moi les gens perdent du poids, réparent leur mariage, retrouvent la joie de vivre… La Coach Mieux-Être renaît de ses cendres… Je reperds mes dix kilos, me remets au sport… J’ai 44 ans. Je revis !

Les Médias sont désormais loin derrière. Mais la Vie m’offre tous les jours de nouvelles opportunités de faire comprendre aux gens l’importance de toujours garder la foi et ne jamais baisser les bras et surtout de comprendre à quel point prendre soin de mes délicieuses imperfections reste primordial… Je crée d’ailleurs deux coaching et deux groupes facebook :“Ronde, Belle et en Bonne Santé” et “Délicieusement Imparfaite” ainsi que deux chaînes Youtube “Mademoiselle Endo, Vivre avec l’Endométriose” et “Coach Juliette, la Go du Bled”. Alors je voulais vous dire MERCI. Par cet hommage vous m’avez mis du baume au coeur. Un vrai réconfort… MERCI ! Ce n’est pas simple d’être une pseudo ”star des médias” au Sénégal. La célébrité ne paye pas le loyer et est loin de garantir le confort matériel. Surtout lorsque tu te bats pour rester intègre et apolitique et que tu n’optes pas pour la promotion canapé… C’est épuisant de faire du kharmatt une seconde nature… C’est épuisant de prendre sur ses heures de sommeil pour écrire ou corriger des articles, rédiger des discours, présenter des évènements quand tu dois te reveiller à 4h30 pour présenter la matinale. Tous les projecteurs sont braqués sur toi… Tout le monde pense que tu roules sur l’or parce que l’on te voit à la télé…Et c’est épuisant de se ”prostituer” en acceptant des tarifs toujours plus bas… pub, voix off, MC… il y en aura toujours une pour accepter un plus petit cachet. Alors tu acceptes. Tu supportes les délais, les boîtes vocales, les appels sans réponses…Tu fais bonne figure et tu souris même si tes comptes sont dans le rouge … Même si tu n’es pas solvable, même si tu n’es pas propriétaire et que tu n’as pas de voiture haut de gamme …Et un jour, lasse, démotivée, vidée… tu t’en vas vers d’autres horizons…Alors ne jugez pas trop durement tous ces journalistes et animateurs qui se sont envolés pour d’autres contrées… vers des jardins un tantinet plus verts… Pour aller cueillir leurs rêves …De 1995 à 2015 je me suis battue comme une lionne pour nourrir la presse et les médias sénégalais … Et après 20 ans je l’avoue… j’ai jeté l’éponge … C’était elle ou moi, bilaay…

LES TIRAILLEURS , CES OUBLIES DE L'HISTOIRE COLONIALE

Tirailleurs sénégalais en faction dans le maquis algérien pendant la guerre d'Algérie. © ECPAD

Tirailleurs sénégalais en faction dans le maquis algérien pendant la guerre d'Algérie. © ECPAD

Liens sur Le Point Afrique :

https://www.lepoint.fr/afrique/docu-tele-france-5-les-derniers-tirailleurs-racontent-25-09-2020-2393653_3826.php

https://www.lepoint.fr/afrique/tierno-monenembo-tirailleurs-le-grand-reveil-de-l-histoire-africaine-de-la-france-09-09-2019-2334381_3826.php

https://www.lepoint.fr/afrique/un-heros-sort-de-l-ombre-charles-n-tchorere-venu-du-gabon-mort-pour-la-france-19-08-2014-1859196_3826.php

https://www.lepoint.fr/afrique/histoire-tirailleurs-une-memoire-vivante-13-11-2017-2172088_3826.php

Docu télé – France 5 : « Les Derniers Tirailleurs » racontent

À partir de témoignages d'anciens tirailleurs sénégalais, ce film jette une lumière crue sur une page sombre de l'histoire de France.

Par Le Point Afrique Publié le 25/09/2020

Les tirailleurs sénégalais sont au cœur de l'histoire de France depuis 1857. C'est cette année-là que les généraux Faidherbe et Mangin créent à Saint-Louis du Sénégal la Force noire. Ils ont participé à toutes les phases de la conquête coloniale en Afrique, puis à celle de Madagascar, vers 1890, et à ce qu'on a appelé la « pacification » du Maroc, à partir de la fin du XIXe siècle.

D'un effectif de 15 000 personnes, en 1914, ils étaient déjà 200 000 personnes et ne venaient plus seulement du Sénégal mais de toutes les nations africaines dépendant alors de l'Empire français. Ces tirailleurs ont été de tous les combats, des tranchées de 14-18 au débarquement de Provence en passant par les rizières d'Indochine et les montagnes d'Algérie.

Ils ont servi l'armée française dans ses pages les plus glorieuses : la libération de Toulon, le débarquement de Provence. Mais aussi dans des moments plus sombres, comme la répression du soulèvement du Constantinois en Algérie en mai 1945 ou la répression à Madagascar en 1947.

Ils se firent particulièrement remarquer à la prise du fort de Douaumont, en 1916. Trente mille d'entre eux moururent au champ d'honneur. En 1939, 140 000 furent engagés dans la bataille et 24 000 furent faits prisonniers ou tués. Sans eux, il n'y aurait eu ni Bir Hakeim, ni la Marne, ni la conquête de l'île d'Elbe, ni la prise de Toulon.

Durant la Seconde Guerre mondiale, les Allemands choisissent de maintenir leurs prisonniers africains en France pour des questions de « pureté raciale ». Les tirailleurs ont donc été envoyés dans des fermes, des usines, des exploitations forestières, vivant quasiment au sein de la société française.

Lire aussi Aïssata Seck : « Il y a une forte méconnaissance de l'histoire coloniale »

Un travail de mémoire salutaire

Mais durant la chute de l'Empire colonial, tout change. Les derniers tirailleurs d'origine guinéenne, qui pourtant se sont battus sous les couleurs tricolores, sont rejetés par la France et par leur pays d'origine, qui les voit comme des traîtres, des mercenaires au service du colonisateur. Internés au camp de Rivesaltes en 1964, ces soldats guinéens, derniers tirailleurs, racontent la triste fin de la force noire.

À partir des années 2000, les Africains ont commencé à se réapproprier cette histoire, et surtout à voir ces tirailleurs différemment de leurs aînés qui ont pu les considérer, aux indépendances, comme des collaborateurs de l'État colonial.

Par exemple, dès 2004, le rond-point situé face à la gare ferroviaire de Dakar a été rebaptisé « Place du Tirailleur ». Au milieu trône une statue d'un poilu et d'un combattant sénégalais, côte à côte. Depuis lors, une journée d'hommage aux soldats africains des deux guerres mondiales est célébrée chaque année.

De l'autre côté, il faudra attendre plusieurs décennies et la sortie du film Indigènes en 2006 pour que la République française leur rende enfin justice. Comme leurs frères d'armes français, ils touchent désormais 336 euros tous les six mois.

Depuis, que sait-on de leur histoire ? Que reste-t-il de leurs récits ? Pour la première fois, un documentaire leur donne la parole.

Âgés de 86 à 89 ans, ils s'appellent Yao, Manoula, Keïta ou Abdoulaye, et ont sorti pour l'occasion leurs calots et leurs médailles qu'ils ont accrochés au revers de leurs vestes. Dignes et silencieux, ils racontent leurs souvenirs, intacts de leurs années de guerre, mais aussi la triste fin de la force noire. Jean-Yves Le Naour et le réalisateur Cédric Condon ont fait le choix d'aller à la rencontre de ces anciens combattants africains obligés de résider six mois par an en foyer Sonacotra en France pour toucher l'intégralité de leur pension.

Tierno Monénembo - Tirailleurs : le grand réveil de l'histoire africaine de la France

CHRONIQUE. Tout donne à penser qu'il y aura un avant et un après-discours de Saint-Raphaël à propos de ces héros de l'ombre, « ces dogues noirs de l'Empire… que personne ne nomme » pour paraphraser Senghor.

Par Tierno Monénembo Publié le 09/09/2019 à 10:49 | Le Point.fr

Le discours fait à Saint-Raphaël sera-t-il suivi de concret ou restera-t-il un simple effet d'annonce ? Croisons les doigts. Les promesses sont rarement tenues quand il s'agit de l'Afrique. Il reste que le geste de Macron est sans précédent. Jamais un président français n'avait été aussi loin dans le souci de la vérité historique : après avoir assimilé la colonisation à un crime contre l'humanité, voilà qu'il exhorte les maires à donner aux tirailleurs sénégalais les noms de leurs rues et de leurs places. Une occasion pour nous de pousser un « ouf » de soulagement et, pour la France, de réparer une cruelle injustice

Lire aussi : Débarquement de Provence - Macron : « La France a une part d'Afrique en elle »

Lire aussi : Un héros sort de l'ombre : Charles N'Tchoréré, venu du Gabon, mort pour la France

La réparation d'une injustice flagrante

En effet, les tirailleurs sénégalais lui ont beaucoup donné et rien, sinon très peu, reçu en retour. Alors qu'ils se trouvaient souvent aux avant-postes et effectuaient les missions les plus périlleuses, ces « chairs à canon » comme on les surnommait dans les tranchées furent jetées comme des pneus crevés dès que sonna le clairon de l'armistice. Pensez donc ! Jusqu'en 2007, leurs prestations valaient à peine la moitié de celles de leurs collègues blancs. Les métropolitains touchaient alors 400 euros, eux 190 ; les Algériens 90 et les Vietnamiens, à peine 40. Et si ces prestations ont été revalorisées depuis lors, elles ne concernaient que la pension du feu, à savoir la retraite du combattant et la pension militaire d'invalidité. Et si elles ont été revalorisées depuis, il a fallu attendre 2010 pour que la mesure soit étendue à la pension de retraite et indexée sur les prestations de leurs collègues français. En bref, une ségrégation parfaitement légale sous le toit d'une République connue pour ses intarissables leçons sur la liberté, l'égalité, la fraternité, les droits inaliénables de l'homme et tutti quanti.

Lire aussi : Histoire : tirailleurs, une mémoire vivante

Lire aussi : Sur les tirailleurs : « Il me paraissait nécessaire de raconter leur histoire, qui est aussi la nôtre »

Retrouver leur vraie place...

Pourtant, la réalité est là, aussi irréfutable que l'éléphant d'Alexandre Vialatte : les tirailleurs sénégalais sont au cœur de l'histoire de France, et ce, depuis 1857. C'est cette année-là que les généraux Faidherbe et Mangin créèrent à Saint-Louis du Sénégal la Force noire, un effectif de 15 000 personnes qui participa à la conquête de Madagascar et à la « pacification » du Maroc. En 1914, ils étaient déjà 200 000 personnes et ne venaient plus seulement du Sénégal mais de toutes les colonies d'Afrique noire. Ils se firent particulièrement remarquer à la prise du fort de Douarmont, en 1916. 30 000 d'entre eux moururent au champ d'honneur. En 1939, 140 000 furent engagés dans la bataille et 24 000 furent faits prisonniers ou tués. Sans eux, il n'y aurait eu ni Bir-Hakeim, ni la Marne, ni la conquête de l'île d'Elbe, ni la prise de Toulon.

Lire aussi : Débarquement de Provence : l'Armée d'Afrique y a été déterminante

... dans l'histoire de France

Ces soldats sans peur et sans reproche que le maréchal Foch appréciait particulièrement méritent d'occuper la place qui leur revient dans l'histoire de France. En ce sens, le discours fait à Saint-Raphaël ne se perçoit pas comme un geste de générosité, mais comme la reconnaissance d'un dû. Quoi de plus normal que dès demain – pourquoi pas dès ce soir ? - les petits Français découvrent une place, un pont, une rue baptisé du nom d'un Africain et d'interrogent. On pourra par exemple leur répondre que le capitaine N'Tchoréré fut un illustre officier d'origine gabonaise tué à la bataille d'Airennes en 1940 après avoir tenu compte avec sa compagnie à une colonne de chars allemands, que Yorgui Koli était un tirailleur originaire du Tchad qui s'est illustré dans les batailles de Giromagny et de Belfort en novembre 1944, qu'Addî Bâ, d'origine guinéenne, a fondé le maquis de la Délivrance dans les Vosges et a été fusillé par les Allemands en 1943. Seulement, les rues et les ponts ne suffiront pas, président Macron. Il faudra aussi – j'allais dire surtout – une bonne dose de pédagogie. Il est grand temps que la France raconte à ses enfants son histoire africaine sans autre souci que celui de rétablir les faits tels qu'ils se sont déroulés.

Le capitaine Charles N'Tchoréré (1896-1940) a donné son nom à une rue à Airennes mais aussi au Prytanée militaire de Saint-Louis du Sénégal. © DR

Le capitaine Charles N'Tchoréré (1896-1940) a donné son nom à une rue à Airennes mais aussi au Prytanée militaire de Saint-Louis du Sénégal. © DR

Charles N'Tchoréré, ce héros français d'Airaines venu du Gabon 

SOUVENIR. Mort le 7 juin 1940, ce capitaine a donné son nom au prestigieux Prytanée militaire de Saint-Louis, au Sénégal, dont la devise est « Savoir pour mieux servir ».

Par Le Point Afrique Publié le 19/08/2014 à 17:10 | Le Point.fr

Le capitaine Charles N'Tchoréré a été tué à Airaines par un  soldat de la division Panzer de Rommel qui n'a pas accepté de traiter l'Africain qu'il était comme un officier violant ainsi les lois de la guerre.  © DR

C'est le 15 novembre 1896 que Charles N'Tchoréré naît au Gabon, à l'époque une colonie française de l'Afrique-Équatoriale française (AEF). Son parcours de vie s'achèvera au champ d'honneur le 7 juin 1940 à Airaines du fait d'un acte anti-militaire d'un soldat de la division de panzers de Rommel qui ne supportait pas de voir ce capitaine noir de l'armée française revendiquer un traitement d'officier alors que sa compagnie se rendait faute de munitions. D'ailleurs, tuer Charles N'Tchoréré n'aura pas suffi. Un char allemand lui roulera dessus pour le broyer. Qu'importe, son honneur était sauf et c'est bien là l'essentiel. En ces temps de commémoration du Débarquement de Normandie, prélude à des victoires décisives contre toutes les barbaries dont le racisme actuellement au coeur de l'actualité, il convient de réveiller la mémoire d'un homme qui a fait son devoir et tenu à défendre son honneur de soldat jusqu'au bout .

Lire aussi Normandie : sur les traces des soldats du Débarquement

N'Tchoréré est engagé dès la Grande Guerre

Charles N'Tchoréré se trouve au Cameroun quand la guerre éclate en 1914. Employé dans une entreprise tenue par des Allemands, il retourne dans son pays d'origine, le Gabon, une colonie de l'Afrique-Équatoriale française, pour échapper à d'éventuelles représailles. Les combats font rage et s'éternisent. La France a besoin de bras valides. Elle fait donc appel à ses "indigènes". Avec l'accord de son père, Charles s'engage en 1916. À la fin de la guerre, il sera élevé au grade de sergent. Il décide par la suite de faire carrière dans l'armée française. Pour sa première mission, il est envoyé au Maroc, où un certain Abdel el-Krim et ses hommes ont pris les armes pour réclamer une République sécessionniste. Nous sommes en 1919.

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Il passe par l'École des officiers d'outre-mer de Fréjus

Dès son retour en France, Charles N'Tchoréré intègre l'École des officiers d'outre-mer de Fréjus. Il en sort major en 1922. Puis il part de nouveau en mission. Direction la Syrie. Charles N'Tchoréré n'aura pas de chance cette fois. Il est grièvement blessé à la mâchoire au cours des combats. On lui décerne la croix de guerre avec étoile d'argent pour son courage exemplaire. Remis de sa blessure, il est affecté dans l'administration. Il rédige des articles pour La Revue des troupes coloniales et un rapport sur la promotion sociale des sous-officiers indigènes. Il demande ensuite sa mutation au Soudan, où il prend le commandement de la compagnie hors rang du 2e régiment des tirailleurs sénégalais à Kati. Il dirige parallèlement une école des pupilles de l'armée. En 1933, Charles N'Tchoréré est nommé capitaine. Une belle fin de carrière en perspective l'attend au Sénégal à la tête du 1er régiment des tirailleurs sénégalais.

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La Seconde guerre mondiale déclarée, il revient en métropole pour combattre

Mais lorsque la France et l'Allemagne entrent en guerre en septembre 1939, il abandonne tout et vole au secours de la métropole. Il prend le commandement de la 5e compagnie du 53e régiment d'infanterie colonial mixte sénégalais. Ses hommes et lui ont pour mission de défendre la commune d'Airaines, près d'Amiens, de la menace nazie, ce qu'ils vont faire avec bravoure malgré les difficultés de communication. Quelques éléments de sa troupe, des Africains, ne parlent pas français. Mais Charles N'Tchoréré sait les galvaniser. Et quand, le 5 juin 1940, les Allemands commencent à bombarder la bourgade, le bataillon ne plie pas. Il résiste et tient tête à l'armée d'Hitler, qui perd huit de ses chars. Une soixantaine d'Allemands sont faits prisonniers.

Malheureusement, les Français sont à court de munitions. Ils tentent donc un repli vers le sud. Pour couvrir leur fuite, Charles N'Tchoréré reste à Airaines avec une poignée de soldats. Après soixante-douze heures de combat, le natif de Libreville et quinze de ses hommes rendent les armes. Les Allemands sont en admiration. Ils ne s'attendaient pas à une telle résistance et leur surprise est grande de devoir traiter avec un capitaine des colonies. Mais contrairement au règlement militaire, certains d'entre eux veulent le séparer des officiers blancs. Charles N'Tchoréré proteste et revendique, en allemand, son statut d'officier. Un soldat sort son arme et l'abat froidement, malgré les protestations des prisonniers allemands qui venaient d'être libérés.

La stèle en mémoire de Charles N'Tchoréré et des combattants d'Afrique noire, à Airaines, près d'Amiens. © DR

La stèle en mémoire de Charles N'Tchoréré et des combattants d'Afrique noire, à Airaines, près d'Amiens. © DR

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"Nos neveux seront fiers d'être français et pourront lever la tête sans honte"

Peu avant sa mort, Charles N'Tchoréré avait écrit à son fils Jean-Baptiste, qui mourra, lui aussi, au combat, quelques jours avant la défaite des troupes françaises et l'armistice de juin 1940. Il lui dit : "Mon fils, j'ai là sous les yeux ta dernière lettre. Comme je suis fier d'y trouver cette phrase : Quoi qu'il en arrive, papa, je serai toujours prêt à défendre notre chère patrie, la France. Merci, mon enfant, de m'exprimer ainsi ces sentiments qui m'honorent en toi... La vie, vois-tu, mon fils, est quelque chose de cher. Cependant, servir sa patrie, même au péril de sa vie, doit l'emporter toujours !" Et d'ajouter : "J'ai une foi inébranlable en la destinée de notre chère France. Rien ne la fera succomber et, s'il le faut pour qu'elle reste grande et fière de nos vies, eh bien, qu'elle les prenne ! Du moins, plus tard, nos jeunes frères et nos neveux seront fiers d'être français et ils pourront lever la tête sans honte en pensant à nous." Au-delà de cette citation, c'est bien l'histoire de l'Afrique et de la France qui se mêle. Pour l'honneur et la liberté. Contre la barbarie et le racisme. 

Histoire : tirailleurs, une mémoire vivante

VIDÉO. Après l'inauguration en novembre 2018 du Monument aux héros de l'Armée noire à Reims, hommage est à nouveau rendu aux combattants des Armées d'Afrique à l'occasion du 75e anniversaire du débarquement de Provence. Témoignages.

Par Esther Thwadi-YimbuModifié le 15/08/2019 à 11:38 - Publié le 13/11/2017 à 18:48 | Le Point.fr

Le 15 avril 2017, on a reparlé à nouveau des tirailleurs... ces anciens soldats africains ayant combattu sous le drapeau français. Car à la suite d'une pétition lancée par Aïssata Seck, petite fille de tirailleur sénégalais, réclamant l'attribution de la nationalité française pour ces anciens combattants, le désormais ex-président François Hollande décidait de « réintégrer » ces vétérans en leur accordant des titres officiels français. Et ce, près de soixante ans après la fin de leur enrôlement au sein de l'armée française... Que reste-t-il de leurs récits d'Indochine, de leurs nuits froides dans les montagnes d'Algérie ? Âgés de 86 et 89 ans, cette troisième génération de tirailleurs présente des souvenirs, intacts de leurs années de guerre.

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Une histoire chevillée au corps

Yoro Diao, 89 ans, nous reçoit dans sa coquette chambre du foyer Adoma. Le « doyen » des tirailleurs, à la voix claire, est rompu à l'exercice depuis sa récente médiatisation. Le vétéran commence, naturellement, à évoquer son enfance au Sénégal, à l'école française. Une scolarisation, interrompue par la Seconde Guerre mondiale, qui a vu ses enseignants français mobilisés dans l'Hexagone. À la fin de la guerre, le jeune garçon reprend ses études et enchaîne quelques petits boulots jusqu'au mois de mai 1951. Année décisive.

À tout juste 22 ans, Yoro Diao entre dans l'armée française par volontariat. Il intègre le 24e RTS, Régiment des tirailleurs du Sénégal. Après un stage en France, le jeune appelé fera ses premières armes en Indochine, en rejoignant le 24e régiment de marche en tant qu'infirmier-brancardier à Tonkin. Trente-six mois durant (au lieu de 24), il est éloigné de ses terres sénégalaises et de son Dagana natal. À peine cinq mois de congé plus tard que le sergent-chef prend de nouveau le bateau, direction : l'Algérie, au sein du 22e RIC, Régiment d'infanterie coloniale.

Au service des armées française et sénégalaise

À l'indépendance du Sénégal, Yoro Diao rejoint l'armée nationale durant vingt-six ans, après avoir servi la France durant dix ans. Sous la cadence des aiguilles de son horloge, Yoro Diao rythme ses souvenirs de guerre en faisant, par moments, quelques pauses, les yeux brillants. En évoquant l'Indochine, et ses allers-retours effectués sous le fracas des armes lourdes pour ramener les blessés et les morts, Yoro Diao répétera, par quatre fois, lors de son deuxième « baptême de feu », la centaine d'hommes tombés durant cette sombre année 1954. Comme une manière de ne pas oublier ses anciens compagnons...

Plusieurs fois décoré, par deux croix de guerre notamment, Yoro Diao a reçu la Légion d'honneur le 3 avril 2017. Une reconnaissance bienvenue pour l'ancien combattant, lui-même fils de tirailleur qui s'était engagé sous le drapeau français lors de la guerre 14-18.

LA PROTECTION DES DONNEES PERSONNELLES

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La protection des données personnelles

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L’ENTREPRISE CITOYENNE

Le magazine radiophonique du Conseil National du Patronat

En partenariat avec la Fondation Konrad Adenauer 

Diffusé le 12/12/2020

Sur Radio Sénégal International - 92.5 FM

 

CONDUCTEUR DE L’EMISSION : 

00’ 18”- Introduction

01’ 15”- M. Alioune BA – Secrétaire Général Adjoint du CNP,

06’ 11”- Pr Mamoudou NIANE – Secrétaire Permanent du le Commission de Protection des Données Personnelles – CDP,

39’ 18” - Mme Khoudia GUEYE NDOYE – Directrice des Infrastructures et des Systèmes Informatiques de l’Université Virtuelle du Sénégal – UVS,

49’ 08” - Conclusion

49’ 37” - Générique Fin

50’ 14” - Fin de l’émission

CONTEXTE DE L’EMISSION

La protection des données personnelles est un des enjeux majeurs de notre époque marquée par la numérisation tous azimut. Le Sénégal est partie prenante des conventions internationales qui régissent cette question, et sous la gouverne de la Commission Nationale pour la Protection des Données Personnelles – CDP, a mis en place une stratégie de sensibilisation et de contrôle des données personnelles en direction des entreprises et des citoyens.

Entre déclarations obligatoires pour les entreprises et plaintes des citoyens auprès de la CDP, la culture de la protection des données à caractère personnel se consolide au Sénégal, contribuant ainsi à son insertion dans la civilisation de l’Information.

 

ANNONCE DU CNP

Le Conseil National du Patronat - CNP vous donne rendez-vous samedi 12 décembre 2020 de 11h à 12h sur Radio Sénégal International - RSI 92.5 FM pour son émission radiophonique "l'Entreprise Citoyenne", produite en partenariat avec la Fondation Konrad Adenauer.

Thème : La protection des données personnelles

Avec comme invités :

-Pr. Mamoudou NIANE – Secrétaire Permanent de la Commission de Protection des Données Personnelles - CDP,

-Mme Khoudia GUEYE NDOYE – Directrice des Infrastructures et des Systèmes d'Information de l'Université Virtuelle du Sénégal - UVS,

-M. Alioune BA – Secrétaire Général Adjoint du CNP.

Pour tout savoir sur la protection des données parsonnelles, rendez-vous samedi 12 décembre 2020 de 11h à 12h sur Radio Sénégal International - RSI 92.5 FM,

Avec le CNP.